L’agriculture autrichienne respectueuse de l’environnement préfigurait-elle le nouveau visage de l’Europe agricole après 2013 ? Au moment où les négociations sur la future Politique agricole commune (PAC) entrent dans leur dernière ligne droite, c’est, pour le commissaire européen en charge de ce secteur, le modèle à suivre.
Le monde paysan retient son souffle. D’ici la fin de l’année, il connaîtra la forme que prendront les aides agricoles qui lui seront destinées après 2013. Après avoir lancé un débat public pendant deux mois sur le sujet – 5 000 contributions ont été adressées sur un site Internet dédié – le commissaire européen à l’Agriculture, Dacian Ciolos, en visite à Vienne, a donné les grandes lignes de la philosophie qui inspirera la prochaine réforme de la PAC (Politique agricole commune). Souhaitant tout mettre en œuvre pour permettre de maintenir « la diversité agricole européenne », il s’est également prononcé en faveur d’un système plus juste – actuellement 80 % des aides sont perçues par 20 % des agriculteurs, essentiellement les grandes exploitations industrielles – et plus respectueux de la santé des consommateurs grâce à l’amélioration de la qualité des produits et plus soucieux de l’environnement.
Championne du bio
Cette accentuation des inflexions déjà timidement engagées ressemble comme deux gouttes d’eau au modèle agricole développé en Autriche. La République des Alpes, faiblement compétitive en matière agricole, a, en effet, choisi d’orienter près de la moitié des subventions reçues par ces agriculteurs au financement d’actions en faveur du développement rural, faisant une large place aux dispositions visant à limiter les atteintes à l’environnement. Non sans résultats : seule 1,6 % des eaux souterraines dépasse les 50 mg/litre de nitrate quand ce pourcentage atteint 50 % en Allemagne, 20,9 % aux Pays-Bas ou 13,6 % en France (1). Premiers bénéficiaires de ces orientations : les agriculteurs bio soutenus par la demande des consommateurs. Le pays est devenu le champion européen du bio, y consacrant plus de 13 % de sa surface agricole.
42% du budget pour 4% de la population
La mise en avant du modèle autrichien risque toutefois de faire tousser les grands pays agricoles européens qui auront beau jeu de rappeler qu’il est difficilement exportable. Reste que la poursuite de la politique actuelle n’est pas viable. Comment justifier que l’agriculture européenne qui emploie 4,2 % de la population active de l’UE contre plus de 8 % il y a dix ans, continue de bénéficier de 42 % du budget de l’Union européenne dans un contexte où les scandales alimentaires à répétition et la pollution grandissante des sols et des eaux ont largement terni son image auprès des opinions publiques ? Des « sacrifices » d’autant plus contestables qu’ils n’ont pas permis à l’Europe dont l’agriculture était encore considérée il y a vingt ans comme son « pétrole vert » de maintenir ses positions sur le marché international. Les exportations européennes vers les pays tiers diminuent d’année en années, concurrencées par les pays émergeants, Brésil en tête…
(1) Ces chiffres sont issus d’un bilan de la directive nitrate et correspondent aux moyennes enregistrées entre les années 2004 et 2007.