Confrontés à une démographie déclinante, une croissance faible et des déficits publics en hausse, les pays de l’UE sont tous contraints de réformer leurs systèmes de retraite.
Trois Européens sur dix auront 65 ans et plus en 2050 : tous les systèmes de retraite des pays de l’Union doivent s’adapter à cette réalité démographique incontournable. Pour compenser la baisse prévue du nombre de cotisants et l’augmentation des bénéficiaires, les caisses de retraite, ici et ailleurs, n’ont que deux solutions : augmenter les recettes ou diminuer les dépenses. Dès lors, c’est la course à l’échalote dans tous les pays pour réformer les systèmes de retraite.
En France, la majorité conservatrice a approuvé le 15 septembre une réforme des retraites qui repousse de 60 à 62 ans l’âge légal de départ à la retraite. Un passage en force en quelques mois. Le gouvernement avait dévoilé son plan le 16 juin. Trois mois seulement de concertation et de débats -dont le mois d’Août. Ceci pour ce qui devait être selon l’Elysée, la « réforme des réformes » du quinquennat de Nicolas Sarkozy ! Et pas question de s’inspirer de celles mises en œuvre ailleurs, souvent après une longue concertation avec les partenaires sociaux.
« Chaque régime national de retraite s’insère dans un cadre unique », avait prévenu le député Arnaud Robinet, secrétaire national de l’UMP auteur du rapport préparatoire sur le financement des retraites. L’exception française a le dos large !
Pourtant, la majorité des pays de l’UE tentent tous de sauver leurs systèmes de retraites par répartition avec des mesures souvent draconiennes.
Les pays qui ont pris de l’avance…
A l’inverse de la France, après 10 ans de discussions pour atteindre un consensus social et politique solide et durable, la Suède a réformé dès 1998 son régime de retraite jusqu’alors financé en bonne partie par l’impôt. Les Suédois doivent, depuis, consacrer 18,5% de leurs revenus à leur retraite, dont 16% pour les caisses de retraite par répartition et 2,5% versés à des fonds de pensions publics ou privés au choix du cotisant. Un système hybride puisque les actifs paient les pensions des retraités (système par répartition) en alimentant un compte d’épargne virtuel (comme s’il s’agissait d’une capitalisation).
L’Italie, la Norvège, la Finlande, le Portugal et la Pologne se sont inspiré de ce modèle pour leurs réformes les plus récentes.
L’Allemagne a mené deux réformes dans les années récentes. En 2003, elle a décidé de rabaisser de 70% à 64% le taux moyen de remplacement des retraites. Les retraités qui touchaient en moyenne une pension correspondant à 70% de leur dernier salaire ne percevront que 64% d’ici à 2030. Ensuite, en mars 2007, l’âge légal de départ à la retraite a été repoussé de 65 à 67 ans. L’adaptation se fera pas à pas de 2012 à 2029.
Crucifiée par les marchés et les autorités européennes, la Grèce a été contrainte réformer en catastrophe son régime des retraites en juillet 2010. Avec un État au bord de la faillite, une espérance de vie record et un plafond légal à 60 ans pour la retraite des femmes, les Grecs ont massivement manifesté pour freiner les réformes entreprises par le socialiste Georges Papandreou. Peine perdue : le passage de 37 à 40 ans de cotisation pour obtenir 100% du montant de la retraite et généralisation à 65 ans de l’âge légal de retraite pour hommes, femmes et…, fonctionnaires a été entériné par le Parlement !
… et ceux qui vont réformer
En Espagne, les syndicats ont lancé un appel à la grève générale 29 septembre.
« Il faut forcer le gouvernement à revenir sur ses pas dans la réforme du marché du travail et éviter la prochaine réforme des retraites », réagit Gaspar Llamazares, porte-parole de Izquierda Unida au Parlement.
Le premier ministre vient d’annoncer une réforme des retraites avant la fin de l’année. L’objectif de Zapatero: repousser l’âge légal de retraite de 65 à 67 ans d’ici à 2025, de même pour l’âge légal des préretraites de 52 à 58 ans, puis changer le mode de calcul de la pension pour ne plus prendre en compte que la moyenne des dernières 15 années.
Aux Pays-Bas, où la formation du gouvernement patine depuis 6 mois, le libéral conservateur Mark Rutte, vainqueur des élections en juin, tente d’arriver à un accord avec le xénophobe Geert Wilders et les démo-chrétiens pour mettre en œuvre une réforme qui recueille le consensus des principaux partis politiques politiques, travaillistes inclus :
« Il faut repousser l’âge légal de la retraite de 65 à 67 ans pour éviter de lester les finances publiques », nous explique le sociologue Bob van den Bos, ancien europarlementaire du D66 (libéraux de gauche).
Au Royaume-Uni, le nouveau premier ministre conservateur, David Cameron, a annoncé une accélération des réformes des retraites prévues par son prédécesseur travailliste, Gordon Brown. Au menu : passage de l’âge de retraite de 65 à 66 ans d’ici à 2016 et plus tard à 68 et 70 ans.
Sur la question du calcul du montant de la pension, l’Autriche prévoir abandonner la méthode du salaire moyen des 15 dernières années travaillées. D’ici à 2028, ce sera la moyenne des 40 années. Même tarif au Portugal où l’on se basait jusque-là sur la moyenne des 10 dernières années travaillées.
A côté de toutes ces mesures d’économies, quelques pays ont axé pour l’essentiel leurs réformes sur une augmentation des ressources. C’était jusque-là le cas de la France qui, depuis 1994, a rehaussé progressivement le taux de ses cotisations de 21,5% à 26% (chiffres OCDE).
La Finlande à décidé d’augmenter ses cotisations de 3% entre 2003 et 2013 pour combler les effets de la génération Baby-Boom. Une mesure prise également par Chypre.
Mais la championne européenne des hausses de cotisations reste l’Italie, qui en a augmenté le taux de 26% à 32% ces dernières années.
L’Espagne a instauré en 2003 un fonds de réserve où le gouvernement verse l’excédent annuel de la Sécurité Sociale. À présent, cette tirelire est dotée de 62 milliards d’euros et le modèle pourrait inspirer la Grèce prochainement.
En France, un fonds de réserve des retraites a également été instauré en 1999 pour faire face au choc démographique attendu après 2020. Il est alimenté par un prélèvement social de 2% sur les revenus du patrimoine et de placement. Le gouvernement souhaite utiliser les 36 milliards de ce fonds sans attendre 2020 comme prévu initialement.