Du 20 au 23 août, les pêcheurs de Viana do Castelo, dans l'Alto Minho, rendent hommage à leur sainte patronne, Notre-Dame de l'Agonie. Trois jours de parade et de fête.
«C’est elle ! Notre-Dame de l’Agonie ! » Les pêcheurs de Viana do Castelo , dans le Alto Minho, et leurs familles se pressent sur le port pour voir leur sainte patronne. La messe et la bénédiction à peine terminées, c’est la ruée. Des centaines d’embarcations sont prises d’assaut, on escalade des échelles de coupée et l’on saute à bord pour participer à cette procession en mer. Puis les bateaux pavoisés ramèneront la petite statue de la vierge de douleur sur le quai. C’est là que l’attend Antonio Basto. Il n’est que frère de pêcheur, mais consacre toute son énergie à organiser les fêtes en l’honneur de la vierge de l’Agonie. « Dès que la statue est débarquée, nous lui réservons une surprise. Nous avons passé la nuit à composer les motifs sur le pavement des rues ! », s’exclame-t-il.
Les rues de la Ribeira, le quartier du port, sont couvertes d’un curieux tapis, mélange de fleurs en papier et de sel teint. Les motifs, qui évoquent la mer et les pêcheurs, sont élaborés en grand secret pendant des mois. Et pour que les pêcheurs et leurs familles puissent tranquillement tapisser la chaussée, on a organisé un bal pour tenir les curieux à l’écart. Alors, lorsque la vierge de douleur, pleurant les hommes perdus en mer, foule symboliquement le tapis floral, l’émotion est à son comble.
Un cortège de jeunes filles…
Au travers du dédale des petites rues, la curieuse vierge de l’Agonie, vêtue de violet en signe de deuil, revient, dans un silence recueilli, vers la chapelle baroque qui lui est consacrée. Les portes de l’édifice à peine refermées, une clameur s’élève pour célébrer le départ imminent du cortège de la Mordomia. C’est le clou du festival.
Depuis le matin, les curieux s’agglutinent sur les trottoirs pour voir passer le cortège de quatre cents jeunes filles vêtues du costume traditionnel. La foule trépigne, car les jeunes filles tardent à apparaître. Le costume d’apparat n’est pas facile à revêtir : plusieurs jupons recouverts d’une courte jupe et d’un tablier brodé, puis un chemisier fin, lui aussi brodé, sur lequel on porte un gilet richement orné. Les jambes sont couvertes de bas de laine et les pieds chaussés de sabots. Savamment noué, un foulard de couleur vive dissimule les cheveux. « Seuls les initiés savent distinguer les couleurs des différentes paroisses et quartiers. Le costume le plus célèbre est d’un rouge flamboyant, c’est celui de la ville de Viana. Les jeunes filles sont choisies pour représenter leurs quartiers, et c’est un honneur », explique Isabel, une habituée du défilé.
… dans un ruissellement d’or
Les parures en or, les colliers, les croix, les filigranes, les contas (petites boules d’or que l’on accumule tout au long de la vie) attirent tous les regards… Des trésors qui représentent parfois un poids de plusieurs kilos autour du cou. « Elles portent non seulement leurs propres bijoux, mais aussi ceux des femmes de leur famille et parfois celui des voisines ou des amies. Les jeunes filles sont accompagnées par des gardes discrets. Et gare à celui qui oserait s’approcher », reprend Isabel. Éblouissantes madones, les jeunes filles avancent dans un ruissellement d’or sous les vivats criés des balcons.
La dernière corolle s’est à peine évanouie, sur l’avenue des Combattants, que Viana frémit déjà pour un autre événement, le défilé ethnographique. Des chars allégoriques, des danseurs et des fanfares. Près de deux mille figurants reconstituent le passé (forcément glorieux) de la ville. « On nous a donné rendez-vous dans une école pour nous attribuer notre rôle et notre déguisement. Moi, je suis vêtue en Vianense, avec une myriade de jupons. J’en rêvais. Pour nous, les gens du coin, c’est une fierté de participer aux fêtes », raconte Nathalie, une jeune femme émigrée à Lisbonne, mais très attachée à Viana. Elle va, durant des heures, arpenter les rues aux bras d’un jeune homme. Sous un soleil de plomb.
Qu’importe ! Nathalie vit la fête à l’unisson avec sa ville. Ce soir, un feu d’artifice sur le pont Eiffel, qui enjambe le Lima à son embouchure, illuminera, dans un dernier sursaut d’orgueil, la bonne ville de Viana.
Les fêtes de Notre-Dame de L’Agonie.
Chaque année, le dernier week-end d'août.
Viana do Castelo (capitale de la région de l’Alto Minho).
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Les demeures seigneuriales du XVIe au XVIIIe siècles, la place de la République et sa Casa da Misericordia (demeure Renaissance) valent le détour. Tout comme le mont Santa-Lucia et sa vue imprenable sur Viana et les environs. Voir aussi les plages, les moulins et l’arrière-pays du Minho. Ne pas rater les exceptionnelles broderies d’or de Viana et leurs filigranes.
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