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Le RSA doré des anciens commissaires européens

vendredi, 24 septembre, 2010 - 11:59

Les anciens commissaires européens perçoivent une généreuse indemnité mensuelle de transition destinée, sur le principe, à subvenir à leurs besoins dans l'attente d'une réinsertion. Problème: ils cumulent cette rémunération après avoir retrouvé un emploi.

L'information publiée ce matin par le Financial Times Deutschland a été confirmé par la Commission européenne: 17 anciens commissaires européens continuent de toucher des indemnités après la fin de leur mandat. Et pas des pacotilles.

Ce revenu complémentaire est d'au moins 96 000 euros par an alors que dans le même temps, ils occupent déjà de nouveaux emplois comme lobbyistes ou politiques. La somme peut, en effet, aller de 40 à 65% de leur ancien traitement pendant trois ans – sachant qu'un commissaire européen gagne 20 278 euros – pour leur permettre de se "réinsérer".

Ceci au nom du règlement européen 422/67/CEE. Ce texte prévoit des indemnités pour les anciens "président et membres de la Commission et anciens présidents, juges, avocats généraux et greffiers de la Cour de justice" de l'Union européenne lorsque ces derniers quittent leur fonction.

Un bonus de 11 000 euros par mois

Et l'article 7 de ce règlement permet de cumuler à la fois cette "retraite complémentaire" européenne avec son nouveau salaire, si ce dernier n'excède pas l'ancien.

L'ancien commissaire irlandais, Charlie McCreevy, toucherait ainsi 11 000 euros par mois des institutions européennes, alors qu'il est membre du conseil de surveillance de la compagnie aérienne Ryanair pour 47 000 euros annuels et vient de rejoindre une société britannique, NBNK Investments.

Le Français Jacques Barrot, aujourd'hui membre du Conseil constitutionnel (12 000 euros par mois en 2009), bénéfierait, lui aussi, de ce complément de rémunération qui fait figure de "Revenu de Solidarité Active" (RSA) pour ex-commisaires fortunés.

De plus, pour ceux qui ont des enfants, l'article 7 leur permet aussi de conserver les allocations familiales de la Commission européenne pendant trois ans.

Ces avantages sont accordés alors que, par ailleurs, les Commissaires, comme tous les fonctionnaires européens, ne paient pas d'impôts nationaux, mais seulement un impôt communautaire retenu à la source allant de 8 à 45%. Impôt compensé pour partie par une "indemnité de dépaysement" de 16%. N'en jetez plus la coupe déborde…

Si certains commissaires restent néanmoins officiellement dans la légalité, de tels privilèges sont difficilement justifiables quand au même moment, l'UE prône une plus grande rigueur budgétaire et un allongement de la durée des cotisations retraites.

Conflit d'intérêts

Indirectement, cela soulève aussi la question de la reconversion pour les anciens hauts responsables de l'UE et des possibles conflits d'intérêts que leurs nouvelles fonctions peuvent représenter. En 2006 Melchior Wathelet, ancien juge de la Cour de Justice de l'Union européenne (Cour de Justice des Communautés européennes à l'époque) avait ainsi aidé la compagnie Microsoft à se défendre face à cette même Cour de Justice.

La situation de Charlie McGreevy est d'autant plus "délicate". Ancien Commissaire à la concurrence et maintenant associé à Ryanair, il avait également durant son mandat européen suivi le dossier qui interdisait à son nouvel employeur de racheter son concurrent, Aer Lingus.

Les exemples sont nombreux et des ONG ainsi que le Parlement européen voudraient que soit revu le code éthique de la Commission européenne. Sans aucun résultat pour le moment.

Des politiciens toujours généreux avec eux-mêmes

Ce statut d'indemnisation privilégié accordé aux hauts responsables européens par les institutions qu'ils dirigent, n'a rien d'exceptionnel et rappelle ceux des élus nationaux qui sont souvent bien plus généreux pour eux-mêmes que pour les citoyens.

Alors que les députés français viennent de voter la réforme des retraites, ces derniers n'ont besoin que de cinq années de cotisations (soit un mandat) pour être assurés de toucher 1550 euros de pension.

Faites ce que je dis. Pas ce que je fais.


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