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Modalisboa, la « fashion folly » du Portugal

mardi, 28 septembre, 2010 - 20:40

Prenez l’audace du styliste Dino Alves, mélangez avec les couleurs flashy du duo angolais Mental, servez à un parterre enthousiaste, et vous avez la recette d’une fin de semaine de Mode à Lisbonne plutôt réussie. Un bon coup de pied dans le marasme ambiant.

Modalisboa est la première fashionweek organisée après les grands défilés européens : Milan Paris, Londres… Cette semaine de la mode à Lisbonne n’en a pas la dimension, mais la qualité des défilés et l’audace des créateurs qui se surpassent dans un univers très concurrentiel a de quoi réchauffer les esprits les plus chagrins. Comme la clôture de l’événement, dimanche 14, confiée à  Dino Alves.

Aussi  talentueux styliste que vrai créateur d’évènement, surnommé « l’enfant terrible » (en français) parce qu’il aborde le vêtement à la façon de Jean-Paul Gaultier (première époque), Dino Alves est la coqueluche du public pour ses défilés différents et provocants. Cette fois encore, Dino a fait son show : une déferlante d’athlétiques mannequins hommes pour présenter des vêtements faits pour les femmes, mais empruntant tout ou presque à la garde-robe masculine : chemise, cravate, veste, pantalon. Perruques évoquant la cour de Louis XIV, chaussures de marquis assorties, pour faire chalouper à l’extrême les mannequins. Dans une ambiance survoltée, et à un rythme effréné, les mannequins sont ensuite revenus sur la « passerelle » pour un dernier passage, munis d’un mouchoir blanc pour se démaquiller. Une inspiration empruntée à l’univers du Tabuki, le théâtre japonais.

A peine remis de ses émotions, le public enthousiaste et séduit a assisté au défilé de « Mental », un  duo de créateurs angolais. Débauche de couleurs, mise en scène burlesque, et style afro-occidental,  Tekasala et Shunnoz n’avaient encore jamais montré leur travail hors d’Angola. L’Africain vu par les blancs, ou l’africain vu par les autres africains, le sage, le fou, le m’a-tu-vu et sa jolie femme, le marché et ses couleurs bigarrées, les bassines pleines de légumes et de fruits, et sur les vêtements le même épanchement de couleurs. Au point d’ailleurs de faire des costumes bicolores, gris vert et rose flashy, tranchés napolitains. Une dualité destinée à évoquer tous les drapeaux que l’africain immigré promène avec lui, celui de son pays et celui de ses terres d’accueil. Un « Mental » d’acier pour un défilé franchement drôle, plus piquant qu’original et qui veut se servir du Portugal – pays frère – comme d’un tremplin potentiel vers d’autres marchés. L’Angola vit un développement économique important et veut désormais exporter de plus en plus de « talents » et non plus seulement de la main-d’œuvre bon marché. A l’exemple de l’agence « Xiiks » (prononcez « chic’s) à l’origine de l’évènement.

Modalisboa la vitrine branchée du Portugal

La semaine de la mode de Lisbonne et celle de Porto sont les fers de lance d’une industrie textile qui est encore aujourd’hui l’un des piliers de l’économie portugaise. Elle représente 3% du PIB, et près d’un million d’emplois directs ou indirects, tous secteurs confondus (Vêtements, Tissus et accessoires, Maison et décoration). Dans un pays où le chômage atteint 10,5% de la population, le secteur textile est lui particulièrement touché, avec 15 % de taux de chômage, et des bassins d’emplois sinistrés. En 2009, l’état a débloqué une enveloppe de  850 millions d’euros  pour un plan d’aide à l’industrie de la mode (incluant la chaussure) passant par le financement, les exportations, la modernisation technologique et la promotion extérieures de ces secteurs. Modalisboa n’est dans ce contexte qu’une infime partie d’un iceberg fondant lentement sous les coups répétés de la mondialisation. La semaine de la mode, rendez-vous bi annuel pour les collections été et hiver est revenue dans le centre de la capitale portugaise après un « exil » logistique à Cascais, à 25 km de Lisbonne. L’évènement veut tisser des liens avec le MUDE le musée de la mode et du design, lui-même situé non loin du quartier branché du Bairro Alto où s’installent les designers et les créatifs contemporains. Une nouvelle synergie pour tenter d’enrayer la fuite en avant du secteur ? Sur les rives du Tage ont croit dur comme fer que « l’espérance est toujours la dernière à mourir ».


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