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UMP: Copé désigné par le prince

dimanche, 14 novembre, 2010 - 18:13

Jusque-là leader du groupe UMP à l’assemblée, Jean-François Copé a été désigné secrétaire général du parti majoritaire par le président de la République. Dans les autres grands pays européens, pareil fait du prince ne saurait se concevoir.

Il voulait le poste. Le président le lui a donné. "On a topé" a même dit Jean-François Copé qui va quitter sa fonction de chef du groupe parlementaire UMP à l’Assemblée nationale pour celle de secrétaire général du parti majoritaire occupée depuis 2008 par Xavier Bertrand, lui-même nommé ministre du travail et de la santé. Une fonction éminemment stratégique à 18 mois d’une élection présidentielle qui s’avère pour le moins difficile pour l’actuel hôte de l’Elysée.

On est en droit de s'étonner de voir le Chef de l'Etat nommer de facto le chef du parti au pouvoir. Aux termes de la constitution de la Vème République, le président est d'abord un arbitre qui "assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics" et "nomme aux emplois civils et militaires de l'État".

En outre, dans l’esprit de la loi fondamentale de 1958, l’exécutif ne procède pas des partis politiques qui "concourent à l’expression du suffrage" mais tire sa légitimité de l’élection elle-même. C’est d’autant plus vrai du chef de l’exécutif depuis qu’il est élu au suffrage universel, ce qui lui confère une légitimité propre.

Dans tous les autres pays européens, l’organisation des pouvoirs publics est d’une essence différente. Le régime parlementaire confère aux partis politiques un rôle officiel dans la mesure où le chef du gouvernement n’est pas nommé (sinon de façon formelle) par le chef de l’Etat mais préalablement désigné par le parti vainqueur des élections. Il y a également confusion entre le leader du parti vainqueur et le chef du gouvernement.

C’est le cas dans les quatre grands pays européens voisins de la France.

En Allemagne, Angela Merkel a été élue présidente fédérale de la CDU (Union Chrétienne démocrate) en avril 2000. Lors des élections générales de 2002, elle n’a toutefois pas représenté l’opposition en tant que candidate à la Chancellerie, laissant ce rôle à Edmund Stoiber, leader du parti-frère de la CSU (les chrétiens-sociaux de Bavière). Mais c’est bien elle qui sera candidate – et élue – en 2005 et 2009. Chancelière, elle reste présidente de sa formation.

En Espagne, José Luis Zapatero a été élu président du PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol) en juillet 2000. Il devra attendre 2004 et la victoire surprise de son parti aux élections générales pour devenir président du gouvernement. Il continue bien sûr de diriger le parti. Récemment, il a notamment sécurisé la majorité absolue à la chambre pour son gouvernement en concluant un accord avec le parti nationaliste basque et la coalition canarienne.

Au Royaume-Uni, David Cameron a été élu au second tour, en octobre 2005, leader du parti conservateur par les parlementaires tories. Deux mois plus tard, il est confirmé dans cette fonction par l’ensemble des militants conservateurs. Il devient premier ministre en mai 2010.

En Italie, Silvio Berlusconi, est redevenu président du conseil en 2008 en tant que leader de la coalition « le Peuple de la liberté ». Cette coalition s’est transformée en mars 2009 en parti politique et c’est tout naturellement que le « cavaliere » en a été élu « par acclamations » président lors du congrès constitutif.

En France, Xavier Bertrand, le secrétaire général de l’UMP qui vient d’être remplacé, a voulu imposer en 2008 cette confusion toute parlementaire des rôles entre le chef de l’Etat et la présidence du parti majoritaire. Selon lui, le président de la république reste "moralement" le président de l’UMP qu’il était avant son élection de 2007. D’où la disparition officielle de cette fonction.

Mais cela implique-t-il que le nouveau leader du parti, le secrétaire général, soit du coup désigné par le chef de l’Etat ? C’est non seulement contradictoire avec les statuts du parti qui stipulent que le secrétaire général est "élu" par le bureau politique. C’est surtout très contraire à la fonction du Président de la république dont la désignation n’est aucunement d’essence parlementaire ou partisane.


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