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Avions “présidentiels”: Merkel voit plus grand que Sarkozy

dimanche, 21 novembre, 2010 - 17:31

A l'occasion de son voyage à Séoul, Nicolas Sarkozy a étrenné son nouvel avion présidentiel : Un A330 dont le coût avait créé la polémique. Pourtant, dans ce domaine de la flotte gouvernementale, les Allemands engagent des dépenses bien supérieures. En Espagne et en Italie, l’utilisation abusive des avions officiels est sans cesse dénoncée.

Un ministre, ça ne se déplace pas en mobylette !”, avait reproché le chef de l'Etat à son ministre de la culture Frédéric Mitterrand, victime d'un accident de scooter début 2010. Nicolas Sarkozy, il est vrai, utilise plutôt l'avion. Pour se rendre au sommet du G20, le 11 novembre dernier, il a étrenné le nouvel Airbus présidentiel. Grâce à cet A 330-200 entièrement réaménagé, il a pu rejoindre Séoul sans escale. Et le temps, c'est de l'argent.

La preuve : le coût du total “Air Sarko One” est estimé à 176 millions d'euros. Rigueur oblige, c’est un avion d’occasion acheté à la compagnie Air Caraibes et financé par des crédits du ministère de la Défense. Tout juste 60 millions d’euros, selon un rapport parlementaire. Rien d’excessif puisque, à titre de comparaison, le dernier avion livré au Premier Ministre de Turquie – fabriqué par le constructeur américain Gulfstream aerospace corporation – a été facturé au printemps 2009 61 millions de dollars (45 millions d’euros).

Mais, en ce qui concerne le "navire amiral" français, il faut ajouter 91,5 millions pour l'aménagement à bord, 20,5 millions pour la sécurisation des communications et les systèmes d'écoutes, et 4 millions pour la qualification de l'appareil. Rien d'anormal pour le rapporteur de la mission "défense" à l'Assemblée nationale Michel Fourgouslors chargé de l’examen de la loi de finances 2010:

En pleine mondialisation, notre président voyage comme d’autres présidents de grandes nations.

Air Sarko One” n'a en effet rien a envier à “Air Force One”, l'appareil du président des Etats-Unis auquel il doit son surnom. Une salle de réunion occupe le centre de l'A330. Près de la cabine de pilotage se trouve une chambre avec lit double, dressing et coin douche – mais pas de baignoire ni de jacuzzi, contrairement à la rumeur. Le président de la République a également fait installer un centre médical équipé d'une mini-salle d'opération. Par ailleurs, une salle de communication est dotée des technologies dernier cri permettant d'envoyer des messages cryptés à tout moment.

Jusque-là, le président et le gouvernement disposaient de deux A319 CJ entrés en service en 2002, d'une capacité d'une trentaine de places et d'une autonomie de 7 000 km seulement, contre 12 000 km pour leur successeur. Ces deux avions ont été retirés du service et le premier a déjà été vendu au Sénégal pour 32 millions d’euros.

Italie: toujours un parfum de scandale

En Italie, ce sont toujours des Airbus A319 CJ qui composent la flotte “présidentielle”. Mais ils sont au nombre de trois. L’un d’eux dispose d’un aménagement interne particulier : salle de réunion, écrans plasma et peut transporter une cinquantaine de personnes. C’est l’avion d’ordinaire utilisé par le président du onseil, Silvio Berlusconi, qui jusqu'à il y a trois ans, possédait lui-même un avion de ce type qu’il a ensuite vendu. Le président du Conseil possède aussi un hélicoptère personnel Agusta Westland 319 qu’il utilise régulièrement à ses propres frais.

Les plus hauts responsables de l’Etat peuvent en outre embarquer sur l’un des dix Jet Falcon 50 et Falcon 900 CX pouvant transporter 12 personnes chacun. La flotte d’Etat compte enfin deux hélicoptères SH3D/TS dont l’un est toujours à disposition du Pape, en tant que chef d’Etat étranger.

Régulièrement des scandales font rage autour de l’utilisation des vols d’Etat. Dernier scandale en date, en juin 2009 : une enquête avait été ouverte après que des photos volées avaient révélé que Silvio Berlusconi utilisait les avions de la République pour acheminer ses invités à villa Certosa (une des villas du président du conseil) en Sardaigne. L’enquête a été close peu après.

Allemagne: Angela voit les choses en grand

L'Allemagne a également décidé, en mars dernier, de renouveller sa flotte officielle. Pour des questions de sécurité. Et le gouvernement a vu grand: à la suite de nombreuses pannes et retards des avions du gouvernement (certains dataient encore de l'époque de la RDA), la chancelière Angela Merkel a commandé six avions moyen-courrier neufs (deux Airbus 319 et quatre Bombardier Global 5000) ainsi que deux Airbus 340 et 300 d'occasion pour les voyages long courriers. Ils devraient être livrés d'ici 2011. Au total, le programme de renouvellement de la flotte s'élève à 650 millions d’euros, mais certains évoquent la somme de un milliard !

Dans les nouveaux Airbus, le coin VIP sera garni de 12 larges sièges de cuir blanc, et disposera d'une salle de conférence. Un deuxième compartiment accueillera les membres de la délégation et fournira, selon un porte-parole de la Lufthansa, tout le confort nécessaire aux longs voyages. L'avion possède en outre 4 réservoirs supplémentaires, et un système de protection renforcé (l'installation d'un système anti-missile est en cours de négociation), un système de soins intensifs pour d'éventuels blessés, ainsi qu'un équipement complet de téléphone, fax, et internet.

Royaume-Uni: du coup par coup

En temps de crise, le coût des transports officiels est un sujet sensible au Royaume-Uni. C'est pourquoi le premier ministre anglais, David Cameron a choisi en juillet dernier, pour se rendre à Washington, de voyager en business class dans un avion de ligne normal de British Airways. Une première. Jusqu'alors, les Premiers Ministres louaient un Boeing 747 ou 767 pour un coût d'environ 350 000 euros pour les longs voyages.

Mais cet acétisme a été de courte durée puisque, quelques jours après, David Cameron se rendait en Turquie dans un "petit" avion loué pour ses assistants et lui. Les ministres britaniques volent aussi, à l'occasion, sur des jets de l'armée. C'est aussi l'usage dans la plupart des pays (dont la France), où la flotte "présidentielle" appartient et est gérée par l'armée.

Espagne: une utilisation critiquée

Le gouvernement espagnol dispose, via l’armée de l’air qui gère la flotte gouvernementale, de deux Airbus A310 achetés en 2002 à Air France et réaménagés, ainsi que de cinq Falcon 900. L’aménagement luxueux de ces derniers avions et le coût élevé de la minute de vol a déjà valu au président du gouvernement Jose Luis Zapatero plusieurs articles critiques, notamment sur le site internet “libertad digital”.

Surtout, l’utilisation de ces avions officiels a été jugée scandaleuse. En juin 2009, trois ministres du gouvernement sont partis à Bruxelles à une heure d’intervalle en empruntant chacun un Falcon ! Et toujours en 2009, Jose Luis Zapatero a utilisé un Falcon 900 du gouvernement pour se rendre à un meeting du PSOE, le parti qu’il préside. Zapatero qui, en outre, se fait régulièrement “allumer” dans la presse parce qu’il ne cesse de fumer dans “son” avion alors qu’il s’affiche comme un pourfendeur du tabagisme…


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