La coalition gouvernementale explosera dès le mois de janvier. Alors que l'agence Moody's vient de rétrograder de cinq crans la note de l'Irlande, Brian Cowen ne pourra donc plus diriger son pays d’ici aux élections, prévues au plus tôt au mois de mars.
Les agences de notation continuent à faire la pluie et le beau temps dans la finance internationale. Malgré leurs nombreux manquements, et notamment leur incapacité à prévoir la crise financière actuelle, les investisseurs suivent au pied de la lettre chacune de leurs annonces. L’abaissement de cinq crans, vendredi, de la note souveraine de l’Irlande (de Aa2 à Baa1, soit le huitième cran sur une échelle de vingt-et-un) par l’agence américaine Moody’s a fait grimper les rendements de la dette irlandaise à 10 ans de 7,5 points de base à 8,52%. La semaine dernière, l’agence anglo-américaine Fitch avait déjà dégradé la note du tigre celtique de trois rangs.
Cette nouvelle va accentuer les difficultés du pays à se sortir du marasme actuel, et ce malgré l’annonce d’un accord général d’entraide obtenu à Bruxelles quelques heures plus tôt. Economiquement, le ministre des finances Brian Lenihan a beau assurer que « les prévisions du budget pour une croissance économique de 1,7% en 2011, en ligne avec le consensus des prévisions, reste d’actualité », les analystes s’avèrent moins optimistes. Pour l’économiste en chef de Bank of Ireland, Dan McLaughlin,
il semble très clair que les dépenses des consommateurs ont chuté, nous savons que les dépenses du gouvernement diminuent également, comme les dépenses en capital. La demande intérieure reste très faible.
Heureusement pour Dublin, la gravité de la situation actuelle a provoqué un resserrement des rangs de la coalition au pouvoir. Lors du vote du budget, le parti vert a respecté sa promesse de soutenir l’offre négociée par le chef du gouvernement Brian Cowen et tous ses parlementaires ont voté en sa faveur.
La cohésion autour du leader du Fianna Fail ne durera pourtant plus bien longtemps et celui-ci vit donc ses dernières semaines au pouvoir. Fin novembre, le leader du parti vert et ministre de l’environnement John Gormley avait annoncé son retrait de la coalition gouvernementale dès le mois de janvier. Le premier parti national se retrouvera donc en minorité et ne pourra vraisemblablement plus diriger le pays. Pour atténuer la pression sur ses épaules, satisfaire ses opposants et ainsi faciliter le vote du budget, Brian Cowen avait annoncé la dissolution du Parlement dès le budget voté et des élections anticipées pour le mois de mars ou d’avril.
Sa légitimité ne cesse pourtant de s’écorner. L’Irish Times/Ipsos MRBI le place à un record d’impopularité depuis le début de ses sondages d’opinion en 1982 : 14% des sondés s’avouent satisfaits de sa politique et 8% d’entre eux apprécient le travail de son gouvernement. En charge du pays sans discontinu depuis 1997, le Fianna Fail aura bien du mal à demeurer en place.
Record d'impopularité
Si l’élection devait avoir lieu ces jours-ci, le quotidien explique qu’il remporterait 17% des votes et son allié 2%. Le parti espère donc que Brian Cowen mènera la campagne de son parti : sans aucun espoir de victoire, il laisserait ensuite sa place à une nouvelle génération, chargée de retrouver une crédibilité auprès de la population.
L’opposition, composée principalement de Fine Gael et du Labour (travaillistes), se retrouvent donc on ne peut mieux placés pour arriver au pouvoir. Il paraît cependant improbable qu’aucun des deux ne pourra obtenir la majorité : 30% des sondés se disent favorables au premier, 25% au second. Le pays se dirige donc une fois de plus vers une coalition.
Si les affrontements entre les deux partis s’annoncent probables – le Labour s’oppose à toute réforme du service public, largement encouragée par le Fine Gael-, ils pourraient profiter des coupes budgétaires mise en place par le pouvoir actuel. Celles-ci sont en effet sensées réduire l'impasse budgétaire de 30% à 3% du produit intérieur brut et relancer la confiance en l’économie. Sans avoir à agir, ils pourraient donc être célébrés par la population.
Le dernier gagnant de la situation actuelle se nomme le Sinn Fein. Le parti nationaliste irlandais recueille actuellement 15% des intentions de vote. De quoi faire largement sourire son leader Gerry Adams, dont la popularité ne cesse de croître malgré sa récente implication dans de nombreuses affaires dévoilées par les télégrammes diplomatiques de Wikileaks.