Vitoria-Gasteiz, une « capitale verte » au sud de l’Europe
Après Stockholm et Hambourg, une ville du sud de l'Europe a été choisie pour être la capitale verte de l’Union Européenne en 2012. Reportage à Vitoria-Gasteiz, au pays basque espagnol, pour comprendre les recettes écologiques de cette petite cité de 240 000 habitants.
1er volet d'une série de reportages sur les villes les plus vertes d'Europe
Vitoria-Gasteiz, capitale de l'Europe. Depuis 1980, la "petite" ville de 240 000 habitants est la capitale administrative du Pays Basque espagnol. En 2012, elle deviendra la "Capitale verte européenne" – à la suite de Stockholm et de Hambourg. "Vitoria a attiré l’attention parce que c’est une ville du Sud de l’Europe et non du Nord ou du Centre", explique Patxi Lazcoz, le maire socialiste de Vitoria-Gasteiz.
La ville a surtout été choisie par l'UE pour "son potentiel à servir de modèle aux autres villes et promouvoir les meilleures pratiques dans d’autres villes européennes". Cette distinction vient récompenser trois décennies d'efforts pour un environnement plus sain. “Deux éléments nous ont distingués, poursuit l'édile.
Premièrement, tous les partis politiques participent à l’engagement environnemental de Vitoria. Les trois partis qui se sont succédé au pouvoir en trente ans ont suivi des trajectoires très similaires en la matière. Deuxièmement, cet effort a été possible grâce à la collaboration des habitants.
"Une ville de rêve"
Pas de châteaux en Espagne à Vitoria, mais des progrès bien concrets. La consommation d’eau y a diminué de 20% entre 2001 et 2009, grâce notamment à une politique de colmatage des fuites et de restauration de l’équipement, en plus des campagnes de communication adressées aux habitants pour une utilisation optimale de cette ressource, précieuse en Espagne. Les espaces verts représentent 48% de la surface de la ville et la circulation a été gérée de façon à privilégier les transports publics.
Collecte pneumatique des déchets
Tous les Vitoriens interrogés par Myeurop ne sont pourtant pas au courant de l’engagement vert de la mairie. Il n’empêche, pour la plupart peu loquaces, certains prennent toutefois le temps souligner combien la vie est agréable dans la ville verte, coquette avec ses hautes maisons agrémentées des traditionnels bow-windows, préservant à la fois de la chaleur estivale, et du froid en hiver, très pluvieux dans cette région : "C’est une ville de rêve", affirme un chauffeur de taxi. "C’est agréable de vivre à Vitoria : c’est propre, c’est vert…", commente Sandra, une serveuse d’une vingtaine d’années qui vit à Vitoria depuis dix ans. "La ville fait beaucoup pour le recyclage. Je trouve ça très bien. Là où je vivais avant, ça ne se faisait pas", ajoute-t-elle. Vitoria-Gasteiz n’a, en effet, pas ménagé ses efforts en la matière. Outre le tri sélectif, elle a mis en place depuis 2002 dans plusieurs quartiers un système de collecte pneumatique : les déchets sont aspirés jusqu’au centre de collecte, grâce à un réseau de tubes souterrains. Cela permet de réduire le nombre de passage des camion-poubelles.
Un tram pas nommé désir
Tout n'est cependant pas rose dans la ville verte. La politique de transports, en particulier, ne fait pas l’unanimité. "Dans le cadre du Plan de Mobilité Durable, nous avons notamment multiplié par trois les taxes de parking, ce qui a suscité le rejet de la population", reconnaît le maire. Il tient malgré tout à préciser que le changement "du jour au lendemain" des parcours des transports publics, il y a un an, a, lui, été très bien accepté.
Mais, l’objet de toutes les récriminations reste le tramway. "Personne ne voulait du tramway qui a coûté des millions", râle Roberto, d’une cinquantaine d’années. Entre 2008 et 2011, le budget du Plan de Mobilité durable qui inclut le tramway s’élevait à 38 millions d’euros. "Le tramway n’aurait pas dû s’imposer dans les zones piétonnières comme celle-ci", estime Sonia, qui utilise ce mode de transport pour se rendre travail, et désigne du doigt une rue passante du centre ville. "Cette zone n’a jamais été piétonnière", affirme-t-on toutefois à la mairie. "C’est vrai, reconnaît un autre habitant, mais avant on pouvait se promener sans crainte alors qu’aujourd’hui, on ne peut plus lâcher nos enfants. Ce sont tout de même des trains qui circulent en pleine ville !"
La ceinture verte, frontière idéologique
Sous la pluie glaciale de décembre, les Vitoriens sont nombreux à se promener dans le centre ville, partiellement piétonnier, à la recherche des derniers achats de Noël. Le vieux centre historique, qui domine la ville entouré par une muraille en cours de restauration, est quant à lui désert. Désert également, "l’anillo verde" (anneau vert), un espace semi-rural de près de 600 hectares récupérées en partie sur des zones dégradées qui bordent la ville.
Il ne fait pas un temps à aller admirer les espèces animales de la région préservées dans cet espace, comme le vison européen. Il est également peu probable que les personnes qui disposent pendant un an dans l’anillo verde d’une parcelle de potager qu’elles s’engagent à cultiver de façon écologique, soient d’humeur à arracher les mauvaises herbes.
"L’anneau vert" ceint presque entièrement la ville, l’empêchant de s’étendre au-delà de ses frontières actuelles. "Il s’agit d’une frontière idéologique. Cela permet de maintenir la taille moyenne de la ville face aux méga-villes, comme dans le nord-est des États-Unis ou en Chine, qui permettent l’émergence de conflits sociaux très graves. Au lieu de cela, nous préférons fomenter la création d’un réseau de villes moyennes bien connectées (le TGV espagnol arrivera en 2012 à Vitoria. NDLR), pour favoriser la cohésion sociale et environnementale", conclut le maire de Vitoria.
A sa manière, la ville basque pleine d'ambitions applique le slogan écologiste Think global, act local.