Syndicate content

Galère de Noël à Roissy Charles de Gaulle

vendredi, 7 janvier, 2011 - 11:49

Jusqu’à 3 000 personnes coincées à l'aéroport de Roissy, 200 le soir de Noël. Le trafic du plus important aéroport parisien, comme celui des terminaux de Londres-Heathrow et Francfort, a particulièrement souffert des intempéries pendant les dernières vacances. La gestion des voyageurs est pointée du doigt.
Témoignage de notre reporter prise au piège.

De très nombreuses annulations de vol dues à la neige ont été à l'origine d'une véritable pagaille ces dernières semaines dans les principaux aéroports européens : 40% d'annulations à Roissy-CDG, 37% à Francfort et 30% à Londres-Heathrow au plus fort de la tempête. Et des milliers de voyageurs bloqués sans solution de remplacement. Au-delà des contraintes climatiques sur lesquelles Aéroports de Paris (ADP) n’a évidemment aucun pouvoir, c’est la gestion des voyageurs bloqués qui est particulièrement mise en cause. Alors que la ministre des Transports, Nathalie Kosciusko-Morizet, a demandé une "mission d'inspection", Air France et Aéroports de Paris se renvoient la responsabilité.

Le témoignage de notre journaliste :

"J’y étais, à Roissy, aéroport Charles de Gaulle, durant la nuit du 23 au 24 décembre 2010. J’y étais à errer dans les couloirs et les halls de l’aérogare, passagère anonyme en transit entre Lisbonne et sa température agréable de 16 degrés et la Sibérie parisienne. Mon avion, affrété par  une compagnie low cost avait quitté Lisbonne avec plus de 2 heures de retard le 23, ce qui l’a fait arriver bien après le départ du dernier TGV, ”mon” TGV, à destination d'Angers.

A ma grande surprise et alors qu’il n’est que 23 heures, les 13 ou 15 guichets de la gare TGV internationale de Roissy Charles de Gaulle sont vides…d'employés ! Seul un guichet est ouvert dans la partie SNCF Paris, mais l’unique  fonctionnaire de service se contente d'annoncer la mauvaise nouvelle: un accident corporel- c’est le terme utilisé- empêche la circulation des trains vers Paris.

La solution? Il n'y en a pas! Commence alors une longue errance à la recherche d'un lieu où se poser ou d'un humain compréhensif et compétent capable d’offrir une aide ponctuelle. Bien que des centaines d'individus semblent, eux aussi, victimes du même cauchemar et que leur flot grossit avec les voyageurs du TGV en provenance de Bruxelles finalement arrivé avec 4 heures de retard, un immense sentiment de solitude m’envahit.

Comble de malchance, ma valise dont la fermeture est défaillante ne veut pas s’ouvrir: adieu chaussettes, gros pulls et sandwichs préparés en prévision!  Perrette de l’aéroport, je me se sent bien dépourvue alors que la bise fut venue. Tout est désespérément fermé et pas le moindre pot au lait! Je finis par trouver l’unique bar ouvert qui me déleste de 10 euros pour une maigre pitance, quand une jeune femme portant une veste de la Croix Rouge m’explique qu’un "camp" pour les réfugiés du rail vient d'être monté au fond du hall du terminal 2.

"Ne trainez pas, me conseille la demoiselle, je ne garantis pas qu’il y aura encore des places dans 3 heures". L’espoir renait… mais il est de courte durée: le militaire qui est à l’entrée du campement m’informe sèchement que l’espace est réservé aux familles et personnes âgées, en me remettant une simple couverture. Je proteste face à une telle ségrégation envers une faible femme. Car telle est à cette heure tardive ma triste condition. On me remet alors un tapis de sol en mousse: à moi de me débrouiller. Je m’éloigne furieuse, à la recherche d’un endroit improbable à la fois à l’abri des courants d’air et pas trop isolé pour improviser un couchage rudimentaire, la valise en coupe-vent. De nombreux voyageurs exténués sont étendus un peu partout.

Pas rassurée, Perrette! Une ronde militaire va sans doute pousser les sauveteurs à ouvrir plus largement le campement de secours : les gendarmes invitent les épaves que nous sommes à rejoindre le campement qui s’est considérablement agrandi depuis ma première visite infructueuse.

Il faut dire que tous les vols sont annulés pour cause d’intempéries, et les rares sont les voyageurs ayant trouvé une chambre d’hôtel. Il est 2 heures du matin. Le va-et-vient est incessant, le hall où nous sommes est glacial, et le bruit – des avions qu’on tente en vain de dégivrer ?-  persistant.

Un lit de camp, deux couvertures rugueuses de plus, et je finirai par m’endormir.

A 6h 15 du matin, le 24 décembre, je suis à nouveau devant les guichets de la gare internationale TGV de Roissy, par un froid devenu polaire, dans une file interminable de personnes au regard hébété, j’apprends que TOUS les TGV sont pleins.

Ben oui, c’est Noël, c’est plein madame! Mais vous pouvez tenter votre chance dans le prochain pour Angers à 10h30.

Le calme de mes compagnons de misère me contraint à la résignation. Le train, plusieurs fois annoncé finira par partir avec deux heures de retard. Le comble, c’est que le TGV n’est absolument pas bondé et beaucoup de voyageurs ont opté pour le voyage sans billet. J’ai de la chance: le mien, non utilisé de la veille, est considéré valable par le contrôleur.

En 24 heures d'un voyage harassant, il aura été finalement le seul agent de la SNCF à remplir son rôle. Mon voisin, resquilleur malgré lui, s’en tirera sans payer l’amende. Arrivée à destination: 14h30. J’étais partie la veille à 13h00."

Pays