C’est la course au bio. Depuis l’annonce du scandale de la dioxine, les consommateurs allemands, par peur de la contamination, se ruent sur les produits de la filière biologique. Qui a pourtant, elle aussi, été touchée par la dioxine l'an passé.
Depuis quelques jours, les rayonnages des magasins spécialisés de Kreuzberg, quartier très bobo de Berlin, sont dévalisés, comme en témoigne Silke Unwetter, employée chez Bio Company, interrogée par l’AFP :
Nous vendons au moins deux fois plus de viande et d'oeufs. Nous devons organiser des livraisons supplémentaires pour faire face à la demande.
Suite aux annonces des autorités fédérales sur la contamination à la dioxine de milliers de produits, et alors que 490 exploitations étaient encore fermées mardi soir, les Allemands ne cachent pas leurs inquiétudes et affichent une confiance sans borne pour le bio. "Auparavant, j'économisais clairement sur la viande. Pour les oeufs, j'achetais des oeufs issus de poules élevées en plein air. Mais maintenant j'achète bio", témoigne un berlinois client de LGP Biomarket.
Le bio, là où tout a commencé
Ce n'est pourtant pas la première fois que l'Allemagne connait un tel scandale alimentaire. L'an passé, ironie de l'histoire, ce sont même des fermes d’agriculture biologique qui ont été touchées.
Le 16 mars 2010, des analyses de routine effectuées par l’organisme allemand de contrôle des œufs, le KAT, mettaient en évidence dans ces aliments une présence de dioxine supérieure à la norme européenne autorisée (6,5 picogrammes par gramme de graisse, contre 6 pg). Aucune réaction des autorités sur le moment, et il faut attendre le 21 avril pour que de nouvelles analyses beaucoup plus alarmantes (13,5 picogrammes par gramme de graisse) amènent le KAT à publier ces chiffres.
Le scandale, révélé par la presse allemande, est d’une ampleur incomparable : 2 500 tonnes de maïs bio contaminées à la dioxine !
Une contamination européanisée
Comment les 19 fermes allemandes et les 8 hollandaises, dénombrées par WorldPoultry.com, ont-elles pu être touchées ? Ces exploitations sont en fait fournies par la même usine de transformation d’aliments biologiques, la société néerlandaise ForFarms, basée à Harreveld. Celle-ci a reçu, entre le 16 décembre 2009 et le 10 février 2010, des lots de maïs ukrainien accompagnés d’un certificat de teneur en dioxine conforme à la législation européenne, amenant ForFarms à traiter et à livrer à ses clients une nourriture pour volailles contaminée.
La lenteur de la réaction de la KAT et la difficulté d’identifier toutes les exploitations touchées, ont conduit certains fermiers à continuer d'écouler leur production pendant plusieurs semaines. Derrière ces problèmes, c’est toute l’organisation de la filière biologique, de plus en plus sujette à des pressions de production, qui est soulevée, comme le soulignait Matthias Wolfschmidt, vice-président de Foodwatch, organisation de défense des consommateurs de l’industrie agro-alimentaire.