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Impôt révolutionnaire : la Justice veut faire payer les chefs d’entreprise

vendredi, 4 février, 2011 - 11:19

Deux chefs d’entreprise basques se retrouvent sur le banc des accusés pour avoir versé un tribut de 6 000 euros à l’ETA.

"Non, n’enregistrez pas notre conversation… Pas de prise de notes non plus… Finalement, je préfère qu’on annule tout". Il est parfois difficile d’interviewer certains chefs d’entreprise du Pays Basque espagnol, même quand le sujet ne concerne rien d'autre que la marche de leurs entreprises.

Ces réticences résultent souvent de la crainte que leur inspire l’organisation terroriste basque qui a fait des entrepreneurs de la région ses pourvoyeurs de fonds, le plus souvent contre leur gré.

Principal moyen d’extorsion, la lettre de menaces qui permet depuis au moins trente ans à l’ETA de prélever le fameux impôt révolutionnaire. En 2008, la police française estimait les recettes de l’organisation à environ 900 000 euros par an. Elles proviennent de l’impôt révolutionnaire à 90% ou 95%.

Omission ou soumission

Certains dénoncent ces menaces, d’autres préfèrent s’y soumettre. Quelle position adopter à l’égard de ceux qui se sentent obligés de "coopérer" avec l’ETA ? La justice espagnole doit trancher le sort de deux chefs d’entreprise, les sœurs María Isabel Bruño et Blanca Rosa Bruño, présidente et vice-présidente de Andrés Bruño e Hijos.

Elles sont jugées pour avoir versé "volontairement" la somme de 6 000 euros d’impôt révolutionnaire à l’ETA à la suite d’une lettre de menaces envoyée en 2003. L’organisation terroriste leur réclamait un apport de 120 000 euros.

Cette accusation rappelle l’affaire dite "Faisán" : six cadres de l’entreprise Azcoyen ont été arrêtés en octobre 2008 pour avoir versé, entre 1995 et 2001, plus de 220 000 euros à ETA. Lors de leur arrestation, le juge Garzón, responsable de l’enquête, avait fait la distinction entre ceux qui avaient "omis" de dénoncer les faits aux autorités et ceux qui avaient collaboré de façon "volontaire".

"chaleureuse accolade"

Cette fois-ci, la Justice reproche aux deux sœurs de s'être un peu trop facilement soumises aux demandes de l’ETA. Certains éléments viennent aggraver leur cas. L’une d’entre elle a été sur les listes électorales d’une organisation de gauche indépendantiste en 1999. L’autre a été membre d’un groupement électoral (en 2005), déclaré illégal par la suite et qui réclamait la légalisation du bras politique d’ETA, Batasuna.

Par ailleurs, l’une des missives de l’ETA qui leur était adressée se termine par une "chaleureuse accolade", un ton peu employé auprès des autres entrepreneurs extorqués, selon l’agence Efe.

Dans ce contexte, les deux femmes se sont déclarées victimes à la fois de l’ETA et de la Justice espagnole. Au bord des larmes, l’une d’entre elles a raconté durant sa déclaration :

Quand tu sortais de chez toi, parfois tu regardais sous la voiture… Tu avais toujours peur. Tu n’osais ni dénoncer ni faire quoi que ce soit. […] On a géré comme on a pu.

Le parquet réclame une peine de prison de cinq ans et 27 000 euros d’amende à leur encontre.




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