Réponse de Berlin à l’appel à l'aide lancé par Rome pour faire face à l’afflux de réfugiés en provenance du Magreb sur l’île de Lampedusa: ce sera "nein" pour l’Allemagne. L’Autriche est sur la même longueur d'onde.
L'Italie redoute l'arrivée "de 200.000 à 300.000 réfugiés" en provenance de Libye et du Maghreb. Cette estimation est "empirique" reconnait le ministre de la Défense, Ignazio La Russa. Mais Franco Frattini, son collègue des Affaires étrangères, fait monter la pression en évoquant un risque d' "exode biblique": "Dix fois plus que les Albanais en 1991", à la chute du régime néo-stalinien.
Cette surenchère laisse le gouvernement allemand de marbre. Pour le ministre de l’Intérieur allemand, la situation ne ressemble en rien à un tremblement de terre…
L’Italie est certes touchée mais elle n’est pas encore débordée", affirme Thomas de Maizière, refusant par avance que Berlin participe au "partage" des réfugiés originaires d’Afrique du nord qui arrivent sur l’île de Lampedusa.
Et le ministre de rappeler quelques chiffres: en 2010, l’Allemagne a répondu favorablement à 40 000 demandes d’asiles. 30 000 réfugiés ont été accueillis en Suède, 20 000 en Belgique et seulement 7 000 en Italie. Dans ce contexte, de Maizière souligne que Rome peut encore faire un effort d’autant que sur les 6 000 réfugiés arrivés ces derniers jours, seule une cinquantaine devrait faire une demande officielle pour rester en Italie.
L’Autriche est, presque mot pour mot, sur la même longueur d’onde : la ministre de l’Intérieur estime que l’Italie "peut encore faire face".
Les deux ministres indiquent toutefois que la priorité de l’Union européenne doit plutôt être de rechercher comment aider le monde arabe à installer la démocratie et la stabilité et à offrir à leurs populations des conditions de vie acceptables.
L'Espagne veut une solution européenne
Les positions de l’Allemagne et de l’Autriche ne font pas l’unanimité. En Italie bien sûr, mais aussi en Espagne où le ministre de l’Intérieur Alfredo Pérez Rubalcaba demande une solution européenne au problème des réfugiés.
Nous ne pouvons pas fermer les yeux en attendant de voir ce qui va se passer", a-t-il indiqué.
L’Europe a des frontières qui doivent être "protégées" mais elle ne doit pas pour autant "fermer les portes" en minimisant les problèmes auxquels sont aujourd’hui confrontés les pays d’Afrique du Nord. L’Espagne comme l’Italie, la France, Chypre, Malte et la Grèce plaident pour la mise en place d’un fonds européen pour résoudre cette question des réfugiés.
Contestée par les pays riverains de la Méditerranée, la position de Thomas de Maizière est également critiquée par l’opposition allemande : le SPD, les Verts et die Linke se sont ainsi clairement prononcés en faveur d’une participation de Berlin à la résolution du problème des réfugiés.
Tout en dénonçant "l’hystérie italienne", die Zeit (hebdomadaire de centre gauche) remet, pour sa part, les pendules à l’heure : les discordes actuelles et les égoïsmes nationaux ne doivent pas faire oublier que depuis que l’Europe a décidé de se doter d’une politique d’immigration plus draconienne, ce sont des milliers de migrants qui, chaque année, sont refoulés aux frontières, parfois aux risques de leur vie, sans qu’aucun Etat ne s’en offusque vraiment.
Les révolutions en Afrique du Nord et dans le monde arabe demandent la mise en place d’une politique européenne active. La fermeture et l’intimidation sont de mauvais signaux", conclut die Zeit.