En France, députés et sénateurs bénéficient d'une immunité parlementaire importante. Ils passent très rarement par la case prison pour délit. Leurs collègues européens, Britanniques notamment, ne bénéficient pas des mêmes protections.
Jacques Chirac sera-t-il finalement jugé pour les emplois fictifs de la mairie de Paris ? Rien n'est moins sûr… Et de fait, les hommes politiques en France sont rarement condamnés contrairement à leurs collègues européens. Le 2 mars, les sénateurs ont, de plus, refusé que soit réduite leur immunité parlementaire, c'est-à-dire le régime juridique dérogatoire au droit commun dans leurs rapports avec la justice. C'est "un très mauvais signal. Les parlementaires veulent être au-dessus des lois" avait pourtant avertit le centriste Hervé Maurey.
France
Selon la loi, les Sénateurs et les Députés français ont droit à l’immunité parlementaire pendant l’exercice de leurs fonctions (article 26 de la Constitution). Concrètement cela se traduit par deux choses :
– L'irresponsabilité, qui protège le parlementaire de toute mise en cause pour des actions accomplies dans le cadre de ses fonctions (discours, rapports, votes au Parlement).
– L'inviolabilité, qui, elle, couvre les activités extra-parlementaires: les élus peuvent alors être mis en cause, mais la mise en détention dans le cadre de l'instruction est soumise à un accord préalable de l'Assemblée ou du Sénat afin de leur permettre de poursuivre leurs activités parlementaires.
Des protections très importantes que les élus nationaux ont toujours refusé de remettre en cause, mais qui n'ont pas suffit dans, au moins deux fois dans l'histoire récente de la Vème République.
- Henri Emmanuelli, député des Landes et Président de l'Assemblé Nationale est mis en examen en 1992 dans l'affaire Urba en tant que trésorier du parti, il est condamné ès qualité pour complicité de trafic d'influences, le 16 décembre 1997, à dix-huit mois de prison avec sursis et à deux ans de privation de ses droits civiques et met fin à son mandat de député.
- Alain Carignon, ministre de l'Industrie et ex-député de l'Isère, est condamné, en 1994, à 5 ans de prison (dont 1 an avec sursis), 5 ans d'inéligibilité, et 400 000 francs d'amende pour corruption, abus de biens sociaux, et subornation de témoins. Il est libéré en 1998 après avoir été effectivement détenu pendant 29 mois, un record pour un homme politique en France.
Italie
Les journalistes Marco Travaglio et Peter Gomez ont publié un livre intitulé “Se le conosci li eviti” (Si tu les connais tu les évite – 2008), dans lequel ils dressent la liste détaillée des parlementaires italiens mis en examen et condamnés. Les chiffres sont les impressionnants : 83 parlementaires, au moins, ont été mis en examen alors qu’ils siégeaient au Parlement italien en 2008, et 25 ont été condamnés (contre 18 en Azerbaidjan, un pays qui n’est pas réputé pour la droiture de ses dirigeants, soulignent les auteurs).
Au hit parade des partis condamnés, Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi et en tête. Le chef du gouvernement italien pourrait d’ailleurs bien participer cette année à battre le record de son parti de 2008 avec 29 condamnations cette année là. Arrive ensuite l’Alliance nationale (droite) avec 14 élus condamnés. Puis viennent au coude à coude l’UDC (centre) et ses 10 condamnations et la Ligue du Nord avec 8. Les motifs vont de la corruption aux insultes raciales en passant par la participation à des organisations mafieuses.
Royaume-Uni
Plusieurs anciens parlementaires britanniques ont récemment été condamnés à de la prison après le scandale des dépenses abusives pour frais privés révélé durant l’été 2009 par le Daily Telegraph. Eric Illsley notamment, 55 ans et député depuis 1987, a été condamné au début du mois de février à un an de prison pour avoir falsifié ses notes de frais pour un montant global de 14.000 livres sterling (16.000 euros). Son avocat avait demandé le sursis mais a admis que "Mr Illsely reconnait que, pour ce cas, une condamnation à de l’emprisonnement est inévitable". Il avait démissionné de son poste quelques heures avant d’être condamné.
Un autre parlementaire travailliste, David Chaytor, a été condamné à 18 mois de prison pour s’être fait rembourser 18.350 livres sterling de plus que ses dépenses réelles. Deux autres politiciens, le parlementaire travailliste Jim Devine et un membre de la chambre des Lords, le conservateur Lord Taylor of Warwick, ont également été jugés coupables de fraudes, pour respectivement perçu 8.385 livres sterling et 11.277 livres sterling de remboursements en faisant de fausses notes de frais. Les juges n’ont pas encore rendu leur verdict.
Belgique
Les politiciens belges n'ont pas une réputation d'incorruptibles. Surtout ceux en provenance de Charleroi. Cette ancienne cité minière qui n'a jamais su se reconvertir (le chômage est d'environ 30%) a une très mauvaise réputation. Et non sans raison. S'est ouvert le 2 mars, le procès de la "Ville de Charleroi" pour des affaires de faux, détournements, fraudes aux marchés publics et corruption. Sur les bancs de la justice, on retrouve l'ancien maire de la ville Jacques Van Gompel (toujours conseiller municipal), d’anciens échevins carolos, des hauts fonctionnaires et des entreprises.
Mais l'affaire judiciaire la plus marquante mêlant un politicien fut celle d'Alain Van der Biest entre 1992 et 2002. Ancien ministre wallon en charge des Pouvoirs locaux et des Travaux subsidiés, il fut accusé et emprisonné (avant de se suicider) dans l'affaire de l'assassinat d'André Cools, son prédécesseur…