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Libye: l’Europe irresponsable mais pas coupable

jeudi, 17 mars, 2011 - 17:09

L'Union européenne est la cible de toutes les critiques pour sa passivité face à Kadhafi. Une "honte" pour Martine Aubry alors que Guy Verhofstadt est "dégoûté". Mais que peut faire l'Europe? Rien. Le sort des insurgés libyens va se jouer dans les prochaines heures. Hier soir à l'ONU, le conseil de sécurité a voté un une résolution autorisant le recours à la force contre le régime de Kadhafi, soutenue par l'UE.

Martine Aubry a "honte pour l'Europe", Guy Verhofstadt se dit "dégoûté" par la passivité de l'Union européenne face à la contre-offensive du colonel Kadhafi qui risque de se terminer rapidement par un massacre des insurgés pris au piège à Benghazi.

Cette indignation envers l'Europe impuissante apparait, a priori, bien légitime, mais la première secrétaire du PS et le chef de file du groupe libéral à Strasbourg se trompent de cible.

Certes, le Parlement européen aurait pu voter une motion pour condamner fermement le despote libyen (quand les eurodéputés condamnent, c'est toujours avec "fermeté"…). A Tripoli, l'assassin en chef de son peuple en tremblait d'avance.

Invitation cordiale

Mais les eurodéputés se sont contentés la semaine dernière d'"inviter" la "haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et les États membres à se tenir prêts si le Conseil de sécurité de l'ONU décidait d'instaurer un zone d'exclusion aérienne". Catherine Ashton serait donc prête à réagir au feu vert onusien! Bigre.

En fait, dans cette résolution du Parlement européen, seule compte la demande faite aux "États membres". Car, quelque soit l'indignation affichée par à Martine Aubry et Guy Verhofstadt, l'Union européenne n'a même pas à avoir honte de son attitude munichoise, puisqu'elle ne dispose d'aucun moyen pour agir.

Combien de divisions?

Comme Staline pour le Vatican et avec le même cynisme commun à tous les dictateurs, Kadhafi peut ironiser en se posant la question hautement stratégique "L'Europe, combien de divisions?". Quand au poids diplomatique de l'Union européenne, il ne pèse pas bien lourd. Comment pourrait-il en être autrement, alors qu'elle n'existe pas à l'ONU, alors que la France et le Royaume-Uni sont deux membres permanents aux cotés des États-Unis, de la Russie et de la Chine?

En acceptant le poste de "haute représentante pour les affaires étrangères", Mme Ashton savait qu'elle était la représentante des États de l'Union et non de l'Union européenne elle-même. États qui se sont empressés de la cantonner au rôle de grande muette au nom de la souveraineté diplomatique des pays membres.

Quant à l'Allemagne, membre du Conseil de sécurité par intermittence, elle est, traditionnellement hostile à toute intervention militaire. Cette répulsion, contrecoup du militarisme germano-prussien, reste vivace: 88% des Allemands étaient hostiles il y a quelques jours encore à une intervention militaire de leur pays en Libye.

La presse allemande brocarde le "comportement irrationnel" de Nicolas Sarkozy, qui aurait miné la possibilité d'une action concertée européenne. Action concertée et non action commune. C'est toute la nuance.




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