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Espagne: la presse ne s’en sort plus

lundi, 28 mars, 2011 - 09:58

Près de 40 ans après sa création, le premier groupe de presse espagnol, Prisa, lance un grand plan social. La Promotora de Informaciones Sociedad Anónima, comprenez  Prisa, propriétaire du quotidien espagnol El Pais, fait face à une situation économique difficile: 18% de son personnel seraient concernés par des licenciements.

Entre 800 et 5000 salariés (selon les sources) de Prisa ont manifesté le 19 mars dernier contre le plan social qui prévoit le départ de 2500 personnes, soit 18% des travailleurs du groupe de presse espagnol. Déjà, pendant plusieurs semaines entre fin 2010 et début 2011, les rédacteurs du quotidien économique Cinco Días appartenant au groupe, avaient refusé de signer leurs articles en signe de protestation contre un projet de licenciement de 25 salariés du journal.

 

Un groupe dans la tourmente

La situation financière du premier groupe mondial d’information en langue espagnole, et actionnaire du groupe Le Monde (5%), n’est certes pas reluisante. Une source proche du secteur affirme même qu’en avril 2010,  "Prisa a failli disparaître". Depuis, les banques créancières de Prisa ont finalement accepté de refinancer sa dette qui était de près de 5 milliards d’euros il y a un an. Il était moins une pour Prisa : une partie de ce refinancement était la condition sine qua non pour que le fonds américain Liberty entre au capital du groupe et remette (en partie) ses finances à flots.

En 2010, le groupe espagnol a perdu 73 millions d’euros malgré une hausse des revenus de 12%, à cause de provisions à hauteur de 130 millions d’euros. Il est par ailleurs toujours lesté d’une dette de près de 3 milliards d’euros, soit 4,9 fois l’Ebitda (les revenus avant intérêts, impôts et taxes), et ce malgré un ensemble de cessions d’actifs ayant permis au groupe d’engranger près de 2 milliards d’euros en 2010.

 

Aux grands maux, les grands remèdes

Dans ce contexte, Prisa a décidé d’appliquer la recette classique de la baisse des coûts : la réduction du personnel. Unidad Editorial, deuxième groupe de presse en Espagne, et contrôlé par les Italiens de RCS Mediagroup (Corriere de la Serra), avait aussi lancé un plan social en 2009 pour réduire les coûts.

La presse écrite en Espagne traverse en fait les mêmes difficultés qu’ailleurs : les audiences sur Internet sont bonnes mais elle est incapable de les exploiter, et la bonne santé de la presse régionale ne suffit pas à porter les groupes nationaux qui en sont propriétaires.

 

La crise économique, toujours

A l’origine de ces situations, la chute vertigineuses des recettes publicitaires et des ventes, le puit sans fond que représentent les télévisions et radios que certains de ces groupes possèdent… et des opérations corporatives pas toujours bien calibrées. Une source du secteur explique:

Unidad Editorial a acheté Recoletos en 2007 juste avant la crise… Avec la crise, ce qui aurait dû être une bonne affaire a rendu la situation financière du groupe très difficile".

Des rumeurs circulent sur le fait que le groupe chercherait un partenaire pour une fusion. L’OPA de Prisa pour contrôler 100% du groupe de télévision câblée Sogecable en 2007 a aussi été source de nombreux problèmes financiers pour le groupe.

 

Une situation particulière

Non seulement elle doit se réinventer comme les autres, mais elle doit le faire dans un contexte de crise économique brutale. La logique voudrait qu’il y ait plus de concentrations de groupes de presse, que les journaux soient plus courts et plus porteurs d’opinion"

analyse ce connaisseur du secteur.

Quoiqu’il en soit, selon lui, le bout du tunnel ne sera pas visible dans les deux ou trois ans à venir.




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