Les Verts sont incontestablement les grands gagnants des élections régionales qui se sont déroulées ce week-end. Une victoire qui s'explique par la crise nucléaire japonaise et le débat sur l'avenir de l'atome en Allemagne. Mais la catastrophe de Fukushima n’a fait qu’amplifier une montée inexorable des Verts qui se renforcent de scrutin en scrutin.
Au lendemain de deux élections régionales, le Spiegel n’hésite pas sur son site à parler de "révolution verte". Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en recueillant 24,2 % des suffrages dans le Bade-Wurtemberg, les Verts doublent leurs résultats par rapport aux précédentes élections et coiffent d’une tête les sociaux-démocrates. Une prouesse qui devrait permettre à leur tête de liste, Winfried Kretschmann, de devenir le futur ministre-président de Land le plus riche et le plus prospère d’Allemagne – qu’il dirigera en coalition avec le SPD.
Une première qui ne doit pas masquer non plus le bon score enregistré par les Écologistes en Rhénanie Palatinat. Avec 15,4 % des voix, ils font mordre la poussière au SPD: le ministre-président sortant, Kurt Beck devra désormais s’associer à eux pour diriger le parlement régional.
La CDU résiste, les Libéraux s'effondrent
Le SPD ne capitalise pas sur le mécontentement des citoyens face à la coalition conservatrice-libérale au pouvoir à Berlin. Même en recul de 5% dans le Bade-Wurtemberg, la CDU, le parti de la chancelière Angela Merkel, reste cependant le premier parti en nombre de voix et progresse de 2,4 % en Rhénanie-Palatinat. Le terme de débâche n’est, en revanche, pas trop fort pour qualifier les résultats de son allié : les libéraux du FDP sont en chute libre dans les deux régions et n’arrive pas à dépasser la barre des 5% fatidique pour siéger au parlement de Rhénanie-Palatinat.
Effet Fukushima
La crise nucléaire japonaise a, sans aucun doute, joué un rôle majeur dans ces élections régionales et l’annonce par le gouvernement d’un moratoire de trois mois sur le prolongement de la durée de vie de centrales nucléaires n’aura pas été suffisante pour vaincre les réticences de la population envers l’atome.
Les manifestations organisées ce week-end contre le nucléaire dans plusieurs grandes villes allemandes ont d’ailleurs fait carton plein. Reste que la catastrophe de Fukushima n’a fait qu’amplifier une montée inexorable des Verts qui se renforcent de scrutin en scrutin outre-Rhin.
"Colère citoyenne"
Cette tendance est révélatrice de changements profonds: le vainqueur des élections de Bade-Wurtemberg, Winfried Kretschmann, a d’ailleurs indiqué, dès les résultats connus, sa volonté de mettre en place une "démocratie citoyenne", surfant sur la "colère citoyenne" de ses électeurs qui s’est, notamment, manifestée depuis cet automne par de nombreuses manifestations contre notamment les projets urbains et ferroviaires gigantesques autour de Stuttgart. Un sujet sur lequel le futur ministre président vient de demander un "nouveau débat".
Vieille ficelle
Ces résultats viennent en tous cas rappeler à quel point le débat citoyen est devenu puissant outre-Rhin, où sont clairement posés les enjeux, contrairement à ce qui se passe en France.
Les thèmes très controversés de l’immigration, vieille ficelle usée jusqu’à la corde, ont ainsi éclipsé, lors des cantonales, les débats sur la politique énergétique comme ceux sur la lutte contre le chômage ou la question du pouvoir d’achat qui sont pourtant, selon des sondages, jugés prioritaires par nombre d’électeurs.
Leçon pour les socialistes français
Si, contrairement à l’Allemagne, le parti socialiste français semble aujourd’hui tirer parti du mécontentement des électeurs par rapport au gouvernement Sarkozy, les résultats allemands devraient toutefois l’amener à plus de clairvoyance: sans discours alternatif crédible, ni chef de file incontesté, les sociaux-démocrates germaniques ont eu du mal à convaincre les électeurs, face aux Verts, capables eux d’impulser une nouvelle dynamique.
Une leçon qui apporte de l’eau au moulin aux propos de Cécile Duflot, secrétaire nationale d’Europe écologie les Verts rappelant à l’annonce des résultats hexagonaux l’obligation de dépasser "les vieilles recettes du XXe siècle".