Le bleu de Prusse, un antidote pour les irradiés de Fukushima?
Un pigment connu sous le nom de "Bleu de Prusse" est efficace, en cas de irradiation, pour éliminer le Césium 137 du corps humain. Une entreprise allemande le commercialise sous forme médicamenteuse depuis plusieurs années. Avec les accidents nucléaires de Fukushima, sa demande pourrait exploser. Histoire d'un bleu peu banal.
Un bleu sombre, tirant vers le noir, comme un ciel d’orage. Le "Bleu de Prusse", appelé aussi "Bleu de Berlin", "Bleu de fer" et même, "Bleu de Paris", est un pigment découvert en 1706 à Berlin par le peintre Heinrich Diesbach, grâce à l’huile animale de l’alchimiste Joseph Conrad Dipple, faite à base d’os d’animaux concassés.
Un peintre chanceux
À la recherche d’une nuance de rouge, le peintre eu la surprise de découvrir, au contact de l’huile de Dipple, un bleu profond, le bleu de Prusse. Avant cette invention, le bleu était la nuance la plus compliquée à reproduire en peinture, synonyme de sacré et extrêmement coûteuse.
Avec le bleu de Prusse, la teinte fit une entrée fracassante dans le monde de l'art, à bien meilleur coût! Le bleu de Prusse servira aussi à teindre les uniforme prussiens.
Multi-usage
Après avoir révolutionné la peinture, ce ferrocyanure ferrique, mélange de fer, d’azote et de charbon, connaît aujourd’hui une seconde jeunesse: il se révèle étonnamment efficace pour éliminer le Césium 137, un élement radioactif, du corps humain.
Heyl, une entreprise familiale d’une centaine d’employés, localisée en Thuringe, avec une filiale à Berlin, commercialise cette substance en tant que médicament. Elle s’est spécialisée dans une niche de marché: les médicaments qui permettent d’éliminer des substances toxiques du corps et les antidotes en cas d’empoisonnement, au plomb ou au mercure. Mais le Césium 137 et le Plutonium font aussi partie de son champs de compétences. D’après Johann Ruprecht, directeur scientifique de la firme:
Les demandes d’information sur le Bleu de Berlin sont en augmentation constante depuis les problème de réacteurs à Fukushima. Ceux qui doivent se rendre au Japon, ou connaissent des personnes qui y vont, ont commencé à se renseigner auprès pharmacies allemandes".
Efficacité prouvée
En octobre 2010, la firme a obtenu le droit de vendre du Bleu de Prusse, commercialisé sous le nom "Radiogardase" aux marchés allemand, américains et japonais. On l’obtient sur ordonnance, 46 euros pour 30 capsules.
Le césium radioactif se fixe sur le pigment, et peut ainsi être éliminé dans les selles et les urines",
explique Christopher Hauss, représentant de l’entreprise allemande.
Le Césium 137, contrairement à l’iode radioactif qui peut être éliminé en quelques jours, a une durée de vie de 30 ans dans l’atmosphère. Dans le corps humain, il est stocké dans le foie, éliminé par la bile, mais une fois dans l’intestin, le césium est à nouveau réparti dans l’organisme. Après 110 jours, seule la moitié est éliminée.
Le Bleu de prusse absorbe le césium et n’est pas assimilé par l’organisme. Il accélère l’élimination, et n’a pas d’effets secondaire, à part une coloration bleue des selles",
rassure Christopher Hauss.