Silvio Berlusconi a promis aux habitants de Lampedusa que tous les migrants seraient transférés en "60 heures". Les premières évacuations ont commencé ce matin. L'opposition accuse le chef du gouvernement, empêtré dans de multiples affaires judiciaires, de chercher à détourner l'attention.
Silvio Berlusconi a annoncé mercredi l’évacuation des réfugiés entassés sur la petite île de Lampedusa. Plus de 6 000 migrants, pour la plupart tunisiens, libyens et érythréens, à déloger en "60 heures". Les forces de l'ordre n'ont pas perdu de temps. L’identification des migrants a débuté dans la soirée: les migrants défilent sur le port pour être photographiés. La police relève également leurs empreintes digitales.
Les premières évacuations ont commencé ce matin (comme on peut le voir sur ces images). D'après la télévision suisse romande (TSR), quelque 1 450 personnes ont déjà quitté l'île pour la région des Pouilles, au Sud du pays. D'autres navires attendent toujours pour assurer le transfert. Un ferry devrait être posté en permanence afin de renvoyer les éventuels nouveaux immigrés arrivés en trop grand nombre.
Candidate aux prix Nobel de la Paix
En visite médiatique sur l'île, le président du Conseil a multiplié les promesses aux habitants: construction d’un golf à Lampedusa, voire même d’un casino, prise en charge des dépenses de la commune, carburants moins chers pour les pêcheurs. Jusqu’à la candidature de cette terre d’accueil au prix Nobel de la Paix. Autre coup d’éclat, l’achat d’un logement.
Je suis lampedusain moi aussi, j’ai cherché toute la journée une résidence sur Internet hier et je viens d’acheter une maison superbe,
a clamé l’homme politique de 74 ans.
Roberto Maroni, le ministre de l’Intérieur et figure de la Ligue du Nord, a fustigé, lui, la passivité des autres États européens:
L’Europe a laissé l’Italie affronter seule les débarquements d’Afrique du Nord et sa contribution en faveur du gouvernement italien est nulle (…) L’Italie, seule, ne peut pas gérer cette situation humanitaire.
Leurre médiatique
La cohabitation avec les 5 000 Lampedusains est certes devenue "absolument insoutenable", selon Laura Boldrini, la porte-parole pour l'Italie du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR). Et la situation sanitaire dramatique: les immigrés ne peuvent pas se laver. Ils n’ont que trois toilettes à disposition. La nourriture manque. L’OMS craint une "catastrophe humanitaire".
Mais, pour l’opposition, la visite de Silvio Berlusconi, son discours de fermeté et les promesses aux habitants de Lampedudsa sont, avant tout, une façon de détourner l’attention des procès contre le chef du gouvernement. Marco Pacciotti, le coordinateur du Forum Immigration du Parti démocratique:
Coïncidence ou calcul politique? L’île de Lampedusa est proche de l’implosion depuis plus d’un mois, mais Berlusconi s’y présente aujourd’hui comme l’homme providentiel. Il semble qu’il s’occupe plutôt de sa propre "providence" : il est en train de faire un coup médiatique pour se sauver de ses procès.