Les Grecs ne sont pas tendres avec DSK. Le patron du FMI focalise à lui seul toutes les rancœurs engendrées par l'austérité drastique imposée à leur pays. Rien n'arrête les éditorialistes pour qui Dominique Strauss-Kahn est doublement coupable: envers les femmes comme envers leur pays. Florilège.
La plupart des medias grecs n'ont que faire de la présomption d'innocence: DSK est coupable, doublement coupable. "Que ce viol soit vrai ou non, le seul fait qu’il y ait eu abus de pouvoir montre la perversité de l’homme tant envers les Etats que les femmes" affirme Giorgos Delastik, éditorialiste à To Ethnos. Un autre quotidien titre: "notre bourreau mis en prison" et parle de
la femme de ménage [qui], elle, a osé résister au violeur du FMI.
Pour nombre de Grecs, Dominique Strauss Khan était la personnalisation même du Fonds Monétaire International, de la rigueur et de l’austérité imposés au peuple grec. Pour nombre de commentateurs, l’image de son pantin, brûlé sur la grande place de la Constitution d’Athènes lors de manifestations en décembre dernier, à l’instar de la coutume qui consume l’effigie de Judas la semaine sainte, était prémonitoire.
Différentes révélations (tractations secrètes entre DSK et Georges Papandréou, loyer exorbitant payé par le FMI pour ses locaux à Athènes, prix de la nuit d'Hôtel de DSK lors d'un récente visite en Grèce…) avaient déjà terni l’image du socialiste français, mettant en difficulté le premier ministre grec, accusé d’avoir menti au peuple.
"Il jouait sa carrière ici"
Hors de Grèce, on estime généralement que DSK a été particulièrement bienveillant avec les Grecs. Un ami, un allié qui a permis de redonner de la crédibilité à la Grèce, avec une volonté politique, une philosophie keynésienne permettant de redonner du poids aux Etats face aux marchés.
Il a accepté que le FMI soit le garant du prêt de 110 milliards d’euros accordé à la Grèce par le Fonds monétaire. Il a été le premier à avoir reconnu les limites du plan de sauvetage en donnant plus de temps au pays pour rembourser sa dette de 350 milliards.
Mais selon Giorgos Delastik, cette attention de DSK envers son pays n'était pas sans arrière pensée. Il le faisait pour se construire un profil international:
Il jouait sa carrière politique française avec le cas grec. C’est presque aussi vicieux qu’étouffer des Etats appauvris par de mauvaises politiques".
La disparition de DSK va-t-elle changer la donne ?
Le gouvernement, par la voix de son porte-parole, a annoncé hier que la Grèce négociait avec une institution et non pas avec un individu. Mais les commentateurs sont plus circonspects. Pour Yannis Hardouvelis, professeur d’économie :
C’est une phase délicate pour la Grèce. Les Européens vont vouloir des résultats et vite. On peut s’attendre à des coupes sur les dépenses sociales, plus de privatisations et une nouvelle cure de rigueur drastique. L’absence de DSK risque de bloquer les prochaines négociations pour la Grèce et de laisser libre court aux exigences d’austérité des Européens et de facto des Allemands".
Une chronique de l’essayiste Manolis Stefanikidis, dans le quotidien Proto Thema, sous le titre "Que ne subissons-nous, et en plus d’une femme de chambre", souligne encore plus le rôle personnel de DSK.
Je ne sais si c’est un complot ou pas, mais maintenant nous allons avoir affaire à un technocrate sec et inodore sans poids spécial face aux chefs européens (en référence à John Lipsky, intérimaire de DSK). Et ceci a son importance, pour les décisions qu’ils auront à prendre pour régler le problème urgent de notre nouveau sauvetage. La partie désormais se jouera exclusivement selon les règles allemandes, dont les autorités ne nourrissent pas les sentiments les meilleurs pour nous les Grecs. Parce il faut quand même le dire, Dominique lui, s’il ne pouvait contrôler sa libido, il pouvait cependant et il contrôlait dans une grande mesure, grâce à ses interventions, les événements européens et les décisions prise, avec un parfum politique qui lui était propre. Mais ses instincts bestiaux l’ont fait tomber au fond du trou… d’une femme de chambre et nous avec.