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Erdogan, le Pharaon de Turquie

vendredi, 27 mai, 2011 - 15:59

A la tête de la Turquie depuis 8 ans, Recep Tayyip Erdogan veut marquer l’histoire du pays de son emprunte. Le Premier ministre turc se lance dans une frénétique politique d’urbanisme, avec une multitude de "projets fous".

Des "projets fous". Le Premier ministre Erdogan ne veut rien de moins pour Ankara. De la capitale turque, avec ses 5 millions d'habitants, il veut faire une "capitale du monde" pour célébrer le centenaire de la République, en 2023.

Quand Ankara est devenue capitale, en 1923, ce n’était qu’une petite bourgade de 40 000 habitants. Malheureusement, elle s’est développée de manière chaotique", 

a déclaré Recep Tayyip Erdogan, mercredi dernier, en dévoilant une série de projets pour tenter de résoudre ce problème.

Une ville entièrement nouvelle devrait ainsi faire son apparition au Sud d’Ankara (Güneykent) afin d’accueillir 50 0000 personnes. En parallèle, les milliers de gecekondu, ces maisons construites en une nuit et sans autorisation que compte la capitale, devraient être rasées.

Insatiable

Recep Tayyip Erdogan prévoit aussi la construction d’un stade de 40 000 places, d'un hôpital et d'un tribunal géants, la création du plus grand zoo du Moyen-Orient et la réalisation d'un tunnel de 15 Km pour faciliter la traversée de la ville. Et pour rehausser le prestige et “l’indépendance” du pays, le Premier ministre souhaite faire d’Ankara le centre des industries spatiale et de l’armement via la production de tanks, d’hélicoptères ATAK et même de jets, dès 2020.

Insatiable, Edogan le Grand bâtisseur avait déjà annoncé fin avril deux “projets fous” pour Istanbul, cœur économique et culturel du pays dont la population dépasse les 13 millions. Au menu, la construction d’un canal de 50 km de long reliant la mer de Marmara à la mer Noire. Le but affiché de ce projet pharaonique — dont ni le budget ni le financement n’ont été annoncés — est de dévier la circulation des 50 000 navires commerciaux et tankers qui empruntent chaque année le détroit du Bosphore.

Dans le même temps, le Premier ministre, qui a été maire d’Istanbul de 1994 à 1998, a annoncé la création de deux nouvelles villes d’un million d’habitants chacune, situées sur les rives anatoliennes et européennes,  destinées à soulager le centre historique d’Istanbul et à accueillir des Stambouliotes actuellement installés en zone sismique. 

"Bon pour l’image du pays"

Ce sont de bons projets, estime Necmet Tufan, serveur dans un restaurant à Istanbul et supporter de l’AKP. Ce sera bon pour l’image du pays. En revanche, je ne pense pas m’installer dans ces nouvelles villes. Y trouvera-t-on du travail ?”

Conçus comme des outils de prestige par un gouvernement soucieux de redorer le blason de la Turquie, ces projets gigantesques suscitent  l’enthousiasme du secteur du bâtiment. Des investisseurs turcs et étrangers sont déjà dans les rangs et selon M. Erdogan, certaines sociétés seraient prêtes à débourser plus de 35 milliards de dollars pour la construction du canal. Canal dont le coût est véritablement évalué à 10 milliards de dollars.

Populisme avant les élections

Revers de la médaille, le gouvernement a essuyé une pluie de critiques.

Istanbul a une capacité de 17 millions d’habitants, or ces projets vont lui faire dépasser les 25 millions”,

prédit Eyüp Muhcu, président de la chambre des architectes.

J’espère qu’ils ne trouveront pas les financements et que ces projets ne verront pas le jour”,

lance de son côté Tayfun Karaman, président de la chambre des urbanistes d’Istanbul, qui critique une politique gouvernementale encourageant la spéculation foncière.

Les écologiques s’alarment aussi face à la construction de villes en pleines zones forestières et au-dessus d’importantes nappes phréatiques. Quant au parti nationaliste, il évoque un gaspillage de l’argent public.

Récusant les accusations de populisme, Recep Tayyip Erdogan ne compte toutefois pas s’arrêter en si bon chemin. Pour les cent ans de la République, en 2023, il souhaite donner un nouveau visage à Izmir, troisième ville du pays. Encore un “projet fou” qu’il dévoilera début juin, à la veille des élections législatives (le 12) pour lesquelles tous les sondages donnent déjà son parti gagnant.




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