Au lieu de s’inspirer du fameux "modèle allemand" le Premier ministre français devrait observer ce qui se passe en Belgique.
Là, un peuple sans gouvernement depuis plus de treize mois ; un peuple dont les salaires sont – horreur ! – indexés sur les prix ; un peuple dont les prélèvements obligatoires sont d’un poids à peu près égal à ceux des français. Ce peuple fait la course en tête. Il fut un des tout premiers, dès l’automne 2010, à recouvrer son activité économique d’avant crise.
Selon Eurostat (voir graphique), la Belgique surpasse même l’Allemagne, dont François Fillon vient pourtant de vanter les résultats, obtenus selon lui grâce aux baisses d’impôt et à la modération salariale. C’est ce qu’il a affirmé mardi devant les députés :
Il y a un pays qui fait mieux que nous, c’est l’Allemagne. Pourquoi fait-elle mieux que nous ? Parce que, sous le gouvernement de M. Schröder, elle a lancé plus tôt les réformes que nous sommes en train de mettre en œuvre en ce moment, la réforme du marché du travail, la modération salariale et la baisse de la fiscalité, avec, en particulier, la suppression de la fiscalité sur le patrimoine."
Et il ajoutait :
C’est Dans cet esprit de cohérence que nous travaillons aujourd’hui. Oui (…), la réforme de la fiscalité du patrimoine (…) s’inscrit dans un effort de rapprochement des pays de la zone euro et de l’Allemagne."
On ne saurait mieux dire que le gouvernement français va désormais chercher à appliquer le modèle allemand aux Français. Le débat interne à la majorité est ainsi clairement tranché. Cela n’allait pas de soi.
Rappelons-nous ce qu’en disait Christine Lagarde il y a un peu plus d’un an, dans une interview au Financial Times, traduite ici par Le Monde :
Il est clair que l'Allemagne a accompli un extrêmement bon travail au cours des dix dernières années environ, améliorant la compétitivité, exerçant une forte pression sur ses coûts de main-d'œuvre. Je ne suis pas sûre que ce soit un modèle viable à long terme et pour l'ensemble du groupe [de la zone euro]. Il est clair que nous avons besoin d'une meilleure convergence."
La ministre française de l’Economie tentait alors de faire pression sur Berlin, afin que le gouvernement allemand renonce à sa politique d’austérité et relance la consommation intérieure, aidant ainsi les pays européens en déficit courant à rééquilibrer leur situation.
C’était maladroit. Les Belges, eux, ont continué de tourner le dos au modèle allemand sans mot dire. Avec d’heureux résultats.
(Aticle également publié par Jean-François Couvrat sur son blog "Déchiffrages")