La France a un an pour améliorer la qualité de l'air, faute de quoi la Commission pourrait lui infliger une amende de 40 millions d’euros. Le Conseil national de l'air propose de sanctionner de 68 euros les voitures qui émettent trop de particules fines et qui circuleraient dans des zones déjà très polluées.
Par une directive de 2008, le Conseil européen a fixé à 40 µg/m³ la concentration moyenne annuelle de PM10, des particules fines dangereuses pour la santé, à ne pas dépasser. De plus, le seuil de 50 µg/m³ ne doit pas être dépassé plus de 35 jours par an.
Ces particules résultent de la combustion incomplète de matériaux d’où leurs fortes concentrations en milieux urbains et industriels. Elles ont été retenues par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie afin de mesurer la pollution atmosphérique.
En 2010, 15 zones françaises telles que Marseille, Paris, Strasbourg et la Réunion n’ont pas respecté ces normes européennes, soit quatre localités de plus qu’en 2009. Ainsi, la concentration moyenne observée l’année dernière a atteint 49 μg/m3.
Des amendes pour les moteurs les plus polluants
Pour lutter contre la pollution atmosphérique, des Zones d’Action Prioritaire pour l’Air – évoquées dès le deuxième Grenelle de l’environnement en 2007 -, devraient être expérimentées de 2012 à 2015. Les ZAPA cherchent à réduire la pollution de l’air liée à la circulation routière en interdisant les véhicules les plus polluants à la circulation sous peine, préconise le Conseil national de l'air, d’une amende de 68 euro pour les particuliers et 135 pour les poids lourds.
A ce jour, six agglomérations (Paris, Saint-Denis, Clermont-Ferrand, Nice, Grenoble, Lyon, Aix-en-Provence, Bordeaux) se sont déjà portées volontaires pour instaurer des zones à faible émission. La liste pourrait s’allonger jusqu’au 13 juillet.
Succès européen des ZAPA
Mercredi dernier, la ministre de l’écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet a vanté les mérites des Zones d’Action Prioritaires pour l’Air :
La ZAPA, c’est un outil à la disposition des collectivités pour la reconquête du centre-ville. Il y a des ‘low emission zones’ dans 180 villes en Europe, et elles ont du succès, c’est une des seules solutions qui marchent.
En effet, adoptées dans neuf pays européens, les ZAPA auraient permis au bout de deux à quatre ans, une diminution des PM 10 de 19 % à Londres, 25 % à Berlin et jusqu’à 40 % à Stockholm.
Mesure impopulaire
Avant même leur mise en pratique, les ZAPA sont pourtant l’objet de vives critiques car elles ne prenant en compte que les PM10. Résultat: les moteurs diesel et les vieilles voitures, immatriculées avant 2006, seront les premières cibles de la mesure. Alors qu'un moteur essence dégage plus de CO2 et donc de gaz à effet de serre que les moteurs diesel.
Ainsi, Denis Baupin, adjoint chargé du développement durable, de l’environnement et du plan climat à la ville de Paris et membre d’Europe Écologie a fait savoir dans un communiqué de presse que
ne seraient essentiellement touchées que les catégories sociales les plus vulnérables.
Échapper à l’amende européenne
Il y a malgré tout urgence à lutter contre la pollution de l'air. Pour des raisons sanitaires, bien entendu, mais aussi pour des motifs plus terre-à-terre. En mai dernier, la Commission européenne a donné un an à la France (et à la Belgique) pour donner les preuves concrètes d’une amélioration de la qualité de l’air. Si rien n’est fait, la France encourt une amende spectaculaire de 40 millions d’euros avec des potentielles indemnités journalières allant de 150 à 300 000 euros.
Au ministère de l’écologie et du développement durable, on préfère ne pas s’avouer condamné d’avance : "on va tout mettre en œuvre pour ne pas l’être", tente de rassurer le service de presse.
La rencontre entre le Conseil national de l'air et la ministre de l’écologie (la semaine dernière) était la dernière étape avant l’élaboration d’un décret qui permettra la mise en place des ZAPA. Bien que la mesure soit impopulaire, ce texte devrait être "imminent" et posera un cadre général. Les collectivités l’adapteront ensuite aux problématiques locales en décidant par exemple quels véhicules sont interdits ou les heures de la journée à laquelle ils le sont.
Question sanitaire
Selon le ministère de l’écologie et du développement durable, certaines considérations politiques rentrent en jeu mais
la France n’a pas le choix avec cette condamnation [de la Commission européenne], il faut agir.
Un effort pédagogique accompagnera la mise en pratique des ZAPA afin d’informer la population sur cette "question sanitaire". Ces particules qui sont très fines et donc légères peuvent rester plusieurs jours en suspension et causer des problèmes cardiovasculaires, des cancers ainsi que de l’asthme.
En effet, Martial Saddier, président du Conseil National de l’Air et député UMP de Haute-Savoie, a rappelé la semaine dernière que
près de 40.000 personnes dans notre pays meurent chaque année prématurément à cause de ces dépassements de seuil.
Selon des travaux de l’OMS, le dépassement du seuil européen serait la cause de 400 000 morts prématurées par an en Europe.