En pleine Coupe du Monde de Football Féminin, les préjugés sont encore bien présents à l’encontre de ces athlètes féminines de haut niveau à qui l'on impose des humiliants "tests de féminité"!
"Les footballeuses sont toutes des lesbiennes", "les joueuses de rugby ne sont pas vraiment des femmes", "les hockeyeuses ne savent pas jouer". Fréquemment encore, les sportives professionnelles sont caricaturées en tant que "garçons manqués" par un public qui a du mal à les comprendre.
Ce type de préjugés, trop largement répandus, peuvent même avoir des effets dévastateurs, comme l'a montré l'affaire Caster Semenya, du nom de cette athlète sud-africaine soupçonnée d'être un homme, lors des Championnats du Monde d’Athlétisme de Berlin en 2009.
Cette affaire a médiatisé une pratique étonnante dans le monde du sport: le test de féminité, imposé aux sportives à l’allure un peu trop masculine, afin de démontrer qu’elles sont bien du genre féminin !
Second chromosome X ?
Cet examen, qui permet de vérifier que les sportives ne sont pas des hermaphrodites ou des androgynes, a été introduit pour la première fois en 1966 lors des Championnats d’Europe d’athlétisme à Budapest. A cette époque, les sportives de l’Est raflaient une bonne partie des médailles, ce qui suscitait une rivalité très forte à l’Ouest. Curieusement, on ne les soupçonnait peu de dopage, mais surtout d’être des hommes.
Ce premier test consistait en un contrôle gynécologique couplé avec un test de souffle. Ensuite, aux Jeux Olympiques d’hiver, à Grenoble, un second test a été introduit : il s’agissait du test du corpuscule de Barr, qui visait à repérer, grâce à un prélèvement de salive, le second chromosome X. Peu crédible et fiable, il a rapidement été abandonné.
Les tests de féminité ont été officiellement abolis par le Comité International Olympique en 1999 à la suite d'une résolution passée en 1996 lors de la Conférence mondiale du CIO sur les femmes et santé. Au niveau olympique, aujourd’hui, seul le Conseil Olympique Asiatique les pratique toujours.
Test de masculinité pour Candeloro !
Par contre, dans le monde sportif en général, en cas de doute sur l’identité sexuelle de certaines sportives de haut niveau, les tests de féminité demeurent autorisés, ce qui reste perçu comme une humiliation profonde pour ces femmes qui évoluent dans des milieux très durs et qui ont énormément sacrifié pour y parvenir. Des injustices et des inégalités subsistent, en effet.
A-t-on jamais imposé à Philippe Candeloro un test de masculinité parce qu’il pratiquait du patinage artistique de haut niveau, sport féminin par excellence dans l’imaginaire collectif ?
Une question fondamentale se pose alors : si une femme est rapide, forte ou puissante, pourquoi faudrait-il automatiquement penser qu’elle est un homme ? Pourquoi mettre en doute l’exploit féminin lorsqu’il s’agit d’une femme qui la réalise ? La réponse est partiellement culturelle et partiellement sociologique.
Sports d'hommes pour les femmes
La polémique sur ces "sports d'hommes pratiqués par les femmes", comme l’athlétisme, le football, le hockey, le rugby ou la boxe, nait d'une incompréhension du public masculin sur la raison pour laquelle ces athlètes mettent en danger leur intégrité physique, leur féminité et leur attractivité au nom du sport. En outre, beaucoup de sports de contact ne se sont féminisés que très récemment, ce qui n’a apparemment pas encore laissé suffisamment de temps aux mentalités pour évoluer.
Néanmoins, force est de constater que les performances de ces sportives fidélisent les médias et trouvent un engouement de plus en plus marqué auprès du public. Pour preuve, c’est la première fois cette année que la Coupe du Monde de Football Féminin, qui se déroule en Allemagne, reçoit une couverture presse et une popularité auprès du public aussi importantes.
La couverture télévisée de l'événement est sans précédent pour le football féminin. Pour la première fois, toutes les rencontres sont retransmises en haute définition, avec deux caméras dans les buts. En Allemagne, les chaînes publiques ARD et ZDF diffusent les 32 matchs en direct. En Europe, tous les matchs sont disponibles sur Eurosport (1) dans 34 pays et territoires tandis que l'Union européenne de radio-télévision prend en charge la couverture radiophonique.
Aujourd'hui, mardi 5 juillet, la France affronte l’Allemagne en quart de finale. Un match qui risque d’être historique et qui nous proposera des femmes qui jouent contre des femmes. Parce que la performance n’est pas exclusivement masculine et que la reconnaissance est au bout du chemin !