La primaire socialiste a permis non seulement à François Hollande d'être le candidat socialiste aux présidentielles, mais aussi à se faire connaître hors de l'Hexagone. Nos voisins apprécient cet "anti Sarkozy", un "homme tranquille" qui a des idées.
Si certains éditorialistes européens ou correspondants en France voient encore dans Hollande un homme "gris et compassé", la plupart mettent en avant sa métamorphose récente.
Royaume-Uni: "plus méchant et plus sérieux"
Il était connu comme l’homme tranquille [en français dans le texte], une personne aimable et traînant des pieds qui aimait parler, mais pas de lui, qui était plein d’esprit, bien intentionné, normal et juste un peu terne. L’éternel garçon dans les coulisses du parti socialiste, faisant les boulots essentiels et dignes, mais restant résolument en dehors de la lumière".
Le Guardian entame son article sur le nouveau favori de l’élection présidentielle française en parlant du François Hollande au passé. Le quotidien de gauche précise pourtant que si "sa réputation de perpétuel homme dans l'ombre semblait inexorable", François Hollande
a renouvelé son image et a dépoussiéré ses ambitions. Exit les costumes froissés et les montures de lunettes à l’ancienne, les kilos de trop et l’apparence de l’homme entre deux âges. Exit aussi, selon certains, son très apprécié sens de l’humour et sa bonhomie, mais les Socialistes ne pouvaient pas tout avoir. A la place arriva un Hollande plus fin, plus méchant et plus sérieux ; un homme qui pourrait – si les sondages désastreux de Sarkozy persistent – devenir président".
Le correspondant du quotidien populiste de droite The Daily Telegraph perçoit en lui "un air inassumé de vendeur de province, un homme consensuel et modéré qui n’a jamais été ministre". Celui du Times, de centre droit, voit plutôt que le nouvel homme fort du Parti Socialiste "a changé d’image, imitant les gestes et la façon de s’exprimer de François Mitterrand (..). Son côté 'normal' est à son avantage face au style ostentatoire de l’actuel président. Il est convaincu de pouvoir rassembler l’aile gauche et les électeurs de centre-droit qui ont rejeté 'Super Sarko' ".
Pays-Bas: "Celui que l'on aimerait pour voisin"
Pour la presse néerlandaise François Hollande est un candidat "près de ses électeurs", l'exact opposé de Nicolas Sarkozy. Alors que ce dernier est présenté comme un "président bling-bling", Hollande est décrit par la plupart des journaux comme le rassembleur, "celui qu'on aimerait avoir pour voisin". Il est perçu comme celui qui unit, qui rassure un électorat échaudé par l'omni-présidence trublionne de Sarkozy.
Certains journaux de gauche rappelle d'ailleurs le mot de Hollande à propos de Sarkozy devenu président "pour aider ses copains". D'autres, par contre, rappellent aussi le mot d'Aubry à propos de Hollande : c'est "un candidat du système et de l'œuf à la coque (sic)"… Mais tous s'accordent sur le fait qu'en cas de victoire, il devra affronter une présidence difficile avec tous les problèmes laissés par son prédécesseur : chômage élevé, dette, immobilier inabordable et sécurité sociale en panne.
Allemagne: "Un professionnel impressionnant"
Le Spiegel souligne surtout l'aspect "simplement normal" de Hollande. Le magazine rappelle notamment que pendant longtemps "l'humble député de Corrèze a été considéré par ses compatriotes comme un homme sans qualités". Mais qu'il "est en réalité un professionnel impressionnant". Il rappelle sa lente mais sûre ascension, depuis les trente ans qu'il est dans la politique. Et il conclut que "la course pour l'Elysée a commencé ce week-end avec un candidat de l'opposition à prendre au sérieux".
Tous soulignent sans exception le succès des primaires, au niveau de la participation citoyenne. "Cela montre que la demande des citoyens pour plus de transparence et de codécision est très grande", selon le journal de gauche Tageszeitung. Le quotidien ne s'attarde d'ailleurs pas trop sur la personnalité de Hollande. Il souligne, par contre, que ce sont les attaques d'Aubry contre Hollande (le traitant de "gauche molle") qui lui ont fait perdre les primaires parce que "la majorité des sympathisants n'apprécient pas quand les socialistes de disputent entre eux en public".
Le fait qu'il ait de réelles chances de gagner contre Sarkozy au vu des derniers sondages est également souligné dans la plupart des médias allemands.
Sur son programme, les quotidiens et hebdos soulignent qu'il était concentré sur quelques points, et moins détaillé que celui des autres candidats. Voici comment le magazine Focus le décrit:
Dans son programme, Hollande vise plus de dépenses pour l'éducation, des incitations pour les entreprises à embaucher des jeunes gens, et une réduction du déficit public. Sur la politique étrangère le programme reste vague, mais propose un pacte avec l'Allemagne pour faire avancer le projet européen."
Les médias allemands insistent beaucoup sur l'unification de la gauche après ces primaires. Selon die Welt, les anciens candidats à la primaire "veulent donner l'image d'une famille socialiste unie". Le journal insiste notamment sur l'image d'Aubry félicitant Hollande devant le bâtiment du parti. Mais le quotidien souligne tout de même que cette unité semble un peu factice, et le fait que les Français vont peut-être avoir du mal à y croire. Le journaliste ne le dit pas directement, mais cite Nadine Morano qui a dit qu'il "sera très difficile pour Martine Aubry de rendre son soutien à Hollande plausible après qu'elle l'ait traité de représentant de la gauche molle et de candidat du système."
Italie: Lui, "il a des idées"
"Compassé", "gris", "modéré"pour la presse italienne de droite, "monsieur tout le monde", "l’anti Sarkozy" pour celle de centre-gauche. La victoire de François Hollande n’a pas laissé les Italiens indifférents, mais la presse transalpine n'est pas vraiment séduite par le candidat socialiste. Les grands titres de la presse quotidienne soulignent la "victoire sans hésitations" du candidat socialiste à la présidentielle 2012. Dans un pays où les partis de droite comme de gauche sont laminés par les disputes entre chefs et sous-chefs, la primaire socialiste fait cependant envie. Non pas sur le principe, le PS ayant exporté en France le modèle des primaires, mais pour son programme. La presse a déjà largement décrit le programme de François Hollande, comme pour mieux fustiger l’opposition de centre-gauche italienne accusée de manquer d’idées et de courage face à Silvio Berlusconi.
Portugal: "Les Français en ont marre de Sarkozy"
Hollande tout sourire fait la Une du Público, le grand quotidien de centre-gauche, avec photo ¾ de page avec pour légende: "Le candidat "normal" a battu martine Aubry avec 56 % des voix". Et il titre: "Victoire de la 'gauche solide' sur la 'gauche forte'".
Le quotidien consacre une page entière à la primaire. "Celui sur lequel aucun media n’aurait parié un euro lorsqu’il a annoncé sa candidature, a finalement été élu par la gauche pour être candidat à la présidentielle" précise le Público.
Dans le Diario de Noticias, autre quotidien de référence, tendance plus centre droit, figure en bonne place un article titré: "Nous allons gagner. Les Français en ont marre de Sarkozy" au dessus de Hollande les bras levés pour la victoire encadré de mesdames Royal et Aubry.
Quant aux autres medias portugais, ils ont tous relaté l’évènement, sans y donner une emphase particulière. Mais les biographies de François Hollande soulignent très souvent sa non expérience gouvernementale, et font presque systématiquement référence à ses célèbres compagnes, Ségolène, l’ex, et Valérie, l’actuelle.