Angela Merkel impose aux dirigeants européens ses décisions sur le sauvetage de la Grèce et l'avenir de la zone euro. L'Allemagne est aux manettes, la France à la remorque, pour éviter le pire. Pourtant, le pilote est affaibli dans son propre pays. Mercredi, la Chancelière doit absolument obtenir l'aval des députés, juste avant de retourner à Bruxelles pour le sommet crucial pour l'Europe.
Le contraste est saisissant. Vu de Bruxelles, Angela Merkel semble être la "kaiserin" qui impose ses quatre volontés à ses partenaires européens. Le défaut partiel d’au moins 50% de la dette grecque ? Une volonté de Berlin… La convocation publique de Silvio Berlusconi pour se faire remonter les bretelles et accepter un plan de rigueur budgétaire ? Une idée de la Chancelière… La recapitalisation des banques ? Une exigence de l’Allemagne…
Pourtant, la position de la docteur en physique, toujours considérée par le magazine américain Forbes comme la femme la plus puissante de la planète, ne cesse de s’affaiblir en république fédérale. Tiraillée par les membres de sa propre coalition et muselée par les partis d’opposition, elle ne cesse d’avaler des couleuvres depuis quelques semaines.
Suspendue à l'accord des députés
Lundi 24 octobre, elle a ainsi été contrainte d’accepter que les 620 députés du Bundestag se prononcent sur l'"optimisation" du Fonds européen de stabilité financière (FESF). Et ce quelques heures seulement avant un nouveau sommet de la dernière chance qui réunira, à Bruxelles, les dirigeants de la zone euro. La Chancelière aurait préféré recevoir l’aval des seuls membres de la Commission budgétaire mais l’opposition et les Verts en particulier l’ont forcé à convoquer l’ensemble des parlementaires avant de partir négocier un éventuel accord à Bruxelles.
Ce vote aura valeur de test pour Angela Merkel. Lors de l’adoption de la première extension du FESF, le 29 septembre 2011, elle avait du faire face à une autre rébellion, provenant des membres de sa propre coalition. Quinze élus issus de ses rangs avaient même voté contre ce programme d’élargissement.
Les tensions ne se sont depuis pas apaisées au sein de la majorité. La réunion de travail organisée vendredi dernier à la chancellerie entre les trois partis au pouvoir (CDU, CSU et les libéraux du FDP) s’est soldée par un échec. Furieux de ne pas avoir été consulté lors de la préparation du programme de baisse d’impôts qui a été annoncé la semaine dernière par le ministre des Finances (CDU) et celui de l’Économie (FDP), le patron de la CSU bavaroise, Horst Seehofer, a refusé d’approuver les propositions que la coalition souhaitait mettre en place durant les deux dernières années de sa législature.
Une "dame de fer" aux pieds d'argile
Impuissante, la Chancelière a du accepter cette claque sans réagir. Elle n’a ainsi jamais autant ressemblé à une "gamine" ("Das mädchen"), un vilain surnom que lui avait donné Helmut Kohl.
Cette faiblesse apparente commence à inquiéter son électorat. Les chrétiens-démocrates accumulent ainsi depuis quelques mois les revers "historiques" lors des élections régionales. Et si son parti recueille encore 31 % des intentions de vote au niveau national, Angela Merkel a vu sa cote de popularité passer de 85 % à ses débuts à 56 % aujourd'hui. Elle n'est même plus actuellement que la cinquième personnalité politique préférée des Allemands.
Les libéraux du FDP, qui plafonnent en-dessous de la barre de 5% dans les sondages, pourraient, quant à eux, ne plus siéger aux Bundestag après les prochaines élections législatives. La "Dame de fer" a des pieds d’argile…