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« Service public », l’émission anti-RAI qui passionne l’Italie

mardi, 8 novembre, 2011 - 13:26

Michele Santoro, ex-présentateur vedette de la RAI a fait appel à la générosité des téléspectateurs pour lancer Servizio Pubblico, émission qui se veut "révolutionnaire" diffusée exclusivement sur internet et sur les chaines locales ou satellites indépendantes. Pari gagné: elle fait un tabac en Italie.

Sur le site "Service public" (Servizio Pubblico) le journaliste italien Michele Santoro explique qu’il se sent un peu comme Mohamed Bouazizi, le jeune vendeur de fruits et légumes qui s'est immolé il y a un an à Sidi Bouzid, acte de désespoir qui avait déclenché la révolution tunisienne. "Nous sommes, nous aussi, en train de pousser notre petite charrette en cherchant à vendre nos fruits et légumes sur internet, sur les télévisions régionales et les réseaux satellites".

La différence avec Bouazizi, c’est que le présentateur vedette de la télévision italienne n'a jamais eu l'intention de s’immoler, bien au contraire:

Nous ferons nos émissions quoiqu’il arrive, même sur une place publique s’il le faut, mais nous la ferons. L’enjeu de cette bataille médiatique: dessiner un futur différent pour le système télévisé et l’information actuelle".

10 euros pour un vrai  "Service public"

Début septembre, après un été de négociations, il est clair que Michele Santoro ne verra pas son contrat reconduit par la Rai pour son émission Anno Zero. C'est pourtant l'un des meilleurs audimat de la télévision italienne, mais le présentateur et son équipe posent des questions trop dérangeantes pour Berlusconi.

Anno Zero ayant été interdit d'antenne, une émission retransmise seulement sur internet avait enregistré un record d’audience. L’idée était là.

Santoro lance alors une collecte nationale est lancée pour, dit-il, faire une télévision "publique" sur le web financée par son public.

Un million d’euros sont arrivés dans les caisses",

annonce Santoro fin septembre. 100 000 italiens ont versé "10 euros pour un vrai service public". Le site diffuse 26 émissions par an qui sont également reprises sur d'autres sites internet et des télévisions locales ou satellites indépendantes du pouvoir. Autrement dit, des chaines berlusconiennes ou de la RAI, la télévision publique officielle.

L’avenante Chiara Danese

Comment se déroulent ces émissions? En ce jeudi de novembre, dans les studios de la Cinecittà, à Rome nous avons assisté à un enregistrement. Le public? des Indignati (Indignés) assis sur des échafaudages.

Michele Santoro a invité les deux journalistes d'investigation célèbres, Sergio Rizzo et Gian Antonio Stella, auteurs du livre "La Caste". Sur le plateau, tous les journalistes de feu AnnoZero. Autres invités, sur des chaises en bois: le maire de Naples, De Magistris et le patron de Ferrari, De La Valle.

Fidèle à sa tradition d’enquête, l’émission propose des interviews exclusives avec un homme de main de Berlusconi, Lavitola, réfugié à l’étranger pour échapper à la justice italienne ou encore de l'avenante Chiara Danese qui a déposé plainte contre Berlusconi dans le procès Ruby et qui explique comment le président du Conseil "faisait visiter la maison en nous touchant les fesses" durant les fêtes dans sa résidence d’Arcore.

Brêche dans le "duopole-monopole"

135 000 "J'aime" sur Facebook après une heure et demi d’émission. Les premières estimations sont de plus 3 millions de téléspectateurs sur les télévisions régionales. Le site du quotidien Reppublica annonce 300 000 visiteurs sur son site pour l’émission en Streaming.

De même, le Corriere della Sera titre "Santoro, le boom de l’audimat" en mettant en avant les 400 000 visiteurs sur leur propre site qui a rediffusé l'émission, ainsi que 400 000 autres spectateurs entre le site il Fatto quotidiano associé à Servizio pubblico.

L’émission a remporté 12 % de parts marchés. Une première et les premiers pas d’une révolution médiatique réussie ? Sur son blog du Fatto quotidiano, le journaliste d’investigation Peter Gomez salue la dimension historique de l’évènement:

Un jour nous nous rendrons compte de l’importance de la page écrite par Servizio Pubblico. A l’improviste, le duopole-monopole qui a cimenté, appauvri et censuré la télévision italienne pendant des années est apparu pour ce qu’il est: vieux et insensé".  




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