Trois anciens joueurs de l’équipe nationale pakistanaise et un agent de joueurs ont été condamnés à de la prison ferme pour corruption. Le Commonwealth et la gentry sont sous le choc.
Le Commonwealth est ébranlé. Rien à voir avec la crise de l’euro ou avec le G20, qui agite surtout les Grecs et quelques Européens du "Continent", comme les Britanniques désignent le reste de l’Europe.
La crise, la véritable crise, concerne l’élément fédérateur de ces pays si épars et si différents: le cricket. Trois anciens joueurs de l’équipe nationale pakistanaise, dont l’ancien capitaine Salman Butt, viennent d'être condamnés par une cour de justice anglaise à des peines de prison allant de six à trente mois pour avoir truqué un test match face à l’Angleterre en août 2010. L’agent de joueur Mazha Majeed a, lui, été condamné à deux ans et huit mois de prison.
L’affaire a éclaté à la fin de l'été 2010 avec la publication par le site du défunt tabloïd de Rupert Murdoch, News Of The World d’une vidéo montrant un agent recevant 150.000 livres sterling [oit plus de 176.000 euros] contre l’information du moment précis du match où deux joueurs pakistanais recevront une pénalité pour mauvais lancer de balle.
Ce type de données s’avère très utile lors des paris réalisés autour des rencontres. Mazha Majeed est arrêté le jour même par la police anglaise et les téléphones portables des joueurs concernés sont saisis.
Le capitaine de l’équipe pakistanaise est impliqué, il sera accusé et condamné pour avoir servi de lien entre l’agent et les autres joueurs de son équipe. Il avait reçu 10.000 £ en échange de son aide, les deux autres joueurs 65.000£ et 2.500£. Outre les peines de prison, ils ont tous trois été condamné à payer des amendes de 30.937£, 9.389£ et 8.120£.
Tâche indélébile
Lors de l’énoncé de son verdict, le juge a justifié sa décision pour le mal fait à ce sport mythique:
Désormais quand les spectateurs ou les téléspectateurs seront surpris par un événement surprenant lors d'un match ou d’un résultat, ceux qui ont payé cher pour assister à une partie ou pour le suivre à la télévision se demanderont s’il y a eu un arrangement.
Pour l’establishment du monde du cricket, quintessence du conservatisme, c'est une tâche indélébile sur ce sport de la landed gentry, la bonne société "so british", avec ses interminables parties pouvant durer jusqu’à cinq jours.
Comme le résume le porte-parole du bureau d’administration du cricket pakistanais,
au lieu d’avoir de la fierté de jouer pour leur pays, ces joueurs ont choisi d'en endommager l’image, de décevoir leurs supporters et de délabrer ce noble jeu qu’est le cricket.
Ce sport passionne de nombreux amateurs en Angleterre mais aussi en Australie, Bangladesh, Inde, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Afrique du Sud, Sri Lanka, Indes occidentales (l’amalgame d’une vingtaine de pays des Caraïbes) et au Zimbabwe (le seul pays non membre du Commonwealth à être membre à part entière du conseil international du cricket).
Ravalé au rang du cyclisme
Les rencontres entre chacune de ces nations provoquent autant d’attention et de couverture médiatique en Angleterre qu’un match du tournoi des six nations de rugby ou des rencontres internationales de l’équipe de football anglaise. A la seule différence que ce sport avait, jusqu’à présent, toujours été préservé des dérapages, liés à la professionnalisation, du football et du rugby.
Ce n’est désormais plus le cas. Les trois joueurs condamnés resteront dans l'histoire comme les tricheurs qui ont mis fin à la pureté du cricket. Le responsable de ce sport à la BBC, veut cependant croire que ces condamnations sont suffisamment dissuasives pour restaurer l’intégrité du cricket:
Désormais, ceux qui seraient tentés de truquer des parties savent qu'être pris est synonyme de prison.
Les affaires de dopage dans le cyclisme, malgré des sanctions lourdes, pour ne parler que de ce sport, montrent pourtant que la dissuasion ne fonctionne pas toujours.