Le britannique John Foley se bat depuis trois ans, pour faire reconnaître les droits des pilotes et du personnel navigant. Il dénonce des salaires au ras des pâquerettes et des contrats léonins.
Les médias anglo-saxons le qualifient d'"activiste aérien". Actif, il l'est. Son combat? Dénoncer les conditions de travail chez Ryanair. John Foley est de toutes les manifestations. La dernière en date l'a conduit sur le toit de l'aéroport John Lennon (voir photo), à Liverpool, puis devant la justice. Il a finalement été reconnu "non coupable" d'intrusion dans une propriété privée.
Depuis trois ans, la campagne baptisée "Ryanair don't care" prend l'essentiel de son temps. L'année dernière, il a mis la clé sous la porte de son entreprise pour pouvoir s'y consacrer pleinement.
Tout a commencé en novembre 2009, quand sa fille de 18 ans a été licenciée par la compagnie. Il s'explique:
Il faut d'abord savoir qu'il y a deux sortes de recrues chez Ryanair, ceux qui sont sous contrat avec la compagnie, et ceux qui sont embauchés par des agences, qui sont en probation. Ma fille faisait partie de la seconde catégorie. Elle a été licenciée à Dublin, sans billet d'avion pour rentrer à la maison. Pour moi, ma fille s'est faite arnaquée".
Embauches et départs permanents
John Foley s'est rapidement rendu compte qu'elle n'était pas la seule dans ce cas, bien au contraire.
Selon nos informations, 4 000 des 5 000 stewards et hôtesses de Ryanair seraient en période dite 'probatoire'. Quand j'ai posé la question à Michael O'Leary, le patron de Ryanair, il m'a affirmé qu'il n'en avait que 1000 ayant ce type de contrat, mais c'est faux. Les agences recrutent des jeunes, des étudiants et leur promettent un emploi. Ces jeunes payent une formation parfois jusqu'à 3 000 euros, pour se retrouver licenciés au bout de 6 mois ou un an. Le turn-over est énorme".
Un peu partout en Europe, des cabinets de recrutement embauchent en permanence des jeunes avec ce contrat probatoire pour compenser les départs.
Il y a quelques semaines, à Manchester, dans une de ces journées de recrutement organisée par l'agence Crewlink, John Foley était présent.
Une centaine de jeunes étaient là pour être recrutés. Je ne leur dis pas de ne pas y aller. Je leur donne juste des informations sur les conditions de travail, le salaire, les licenciements. C'est ensuite à eux de prendre leur décision. Ryanair essaye de dire que notre action n'a aucune conséquence, mais leur taux de recrutement est en baisse depuis que nous agissons. Après, je comprends ces jeunes, ils veulent du travail et avec la récession, ce phénomène s'est accentué. Je veux seulement qu'ils puissent y réfléchir en ayant toutes les cartes en main. Je veux que ce genre de désillusion n'arrive pas à d'autres."
Salaires en rase motte
Une partie non négligeable des revenus de la compagnie proviennent de ce qui est vendu en cabine (sandwich, boissons et même billets de loterie…). Les membres de l'équipage sont donc soumis à une pression constante pour. Les hôtesses et stewards "en probation" doivent remplir des objectifs toujours plus grands, au risque de ne pas être reconduits.
Ce qui est parfaitement injuste, c'est de laisser croire qu'on leur propose un vrai travail dans l'aviation, alors que ce n'est pas vrai".
John Foley dénonce également les méthodes de Ryanair pour rogner sur des salaires déjà au ras des pâquerettes.
La compagnie dit que les membres du staff gagnent dès le début en moyenne 1 400 euros par mois, mais c'est faux, certains ont un salaire mensuel de 600 euros. Les hôtesses en probation ne sont payées que pour leur temps de vol, leurs heures au sol, même si l'avion a un problème, ou si le trafic est bloqué ne sont pas comptées. Le salaire mensuel dépend des commissions. De plus, des frais sont déduits de leurs salaires, comme, par exemple, la location de l'uniforme (30 euros/mois). Ryanair essaye de gagner de l'argent à tous les niveaux".
"C'est de l'esclavage"
La campagne de John Foley n'est pas la seule à remettre en cause les méthodes de recrutement de la compagnie aérienne. Au mois de septembre, Michael O'Leary et d'autres responsables de Ryanair se sont retrouvés devant la justice britannique, pour répondre à des accusations d'esclavage.
Il y a quelques semaines, un ancien membre du personnel en Norvège, David Puglisi a dénoncé, à la télévision norvégienne, les conditions de travail et surtout les salaires:
Parfois, nous travaillons huit heures, pour 300 couronnes (38 euros), c'est de l'esclavage"
La défense de la compagnie low coast face à ces accusations diverses est toujours la même: ce sont des mensonges propagés en sous-main par la concurrence qui se sent menacée et qui ne supporte pas de voir Ryanair au top.