Les Italiens n'ont plus le choix: se sacrifier pour sauver l'Europe. Le gouvernement de Mario Monti a annoncé dimanche, une journée en avance, son plan de rigueur carabinée pour faire face à la crise de la dette. Entre autres "sacrifices", la réforme des retraites a été validée.
La ministre de l'Emploi et de la Prévoyance sociale, Elsa Fornero, a fondu en larmes hier soir en prononçant finalement le mot sacrifice pour justifier du réhaussement de l'âge du départ en retraite. Puis Mario Monti s'est adressé à la nation annonçant aux Italiens qu'ils allaient devoir verser des larmes et du sang. Atmosphère tragi-comique tendue pour la conférence de presse du gouvernement italien marquant une infléxion dans l'austérité.
Le président du conseil a déclaré que ces efforts devaient être consentis pour sauver la péninsule, l’euro et l’Europe. Il a annoncé qu’il participerait à l’effort collectif en renonçant à son salaire de premier ministre et de chargé du Trésor. Sur un ton grave, il a ajouté qu'il en allait de l’avenir du pays et que sans sacrifices, tout serait perdu, promettant que la classe politique toute entière se serrerait la ceinture et que l’Etat garantirait les banques pour qu’elles puissent payer.
30 milliards pour sauver l'Europe
Des mots d’autant plus nécessaires que la "manœuvre économique" peaufinée par le gouvernement de techniciens italiens nommé en remplacement de Silvio Berlusconi est de l’ordre de 30 milliards d’euros brut. Soit le chiffre requis par la Commission européenne.
Les mesures d’austérité et de croissance adoptées pour affronter la crise de la dette ont, de fait, été sollicitées par les partenaires européens, la Banque Centrale Européenne (BCE) et le FMI, alors que la survie de l’euro dépend de l’avis de tous, de la résolution de la crise italienne. Ce sont d’ailleurs les propos tenus la semaine dernière par la chancelière Angela Merkel et Nicolas Sarkozy durant un entretien téléphonique avec Mario Monti. "L’avenir de l’euro est entre les mains de l’Italie", aurait déclaré le couple franco-allemand selon la presse italienne.
Du coup, le président du Conseil italien n’a pas vraiment le choix. Et tout en affirmant qu’il ne demandera jamais "à l’Italie de faire des sacrifices parce que l’Europe le lui demande", Mario Monti a décidé d’appliquer les consignes qui lui ont été données par l’Union Européennes et les institutions monétaires. Ou l'art de ménager la chèvre et le chou.
Nous avons le choix : soit faire les sacrifices que l’on nous demande, soit accepter l’idée d’un Etat insolvable et d’un euro détruit à cause de l’infamie de l’Italie",
a déclaré le président du Conseil dimanche après-midi. Le message était clair: le temps des escamotages est révolu.
"Sauvons l'Italie"
Alors que les prévisions économiques ont été revues à la baisse pour les deux prochaines années (entre -0,4% et -0,5% en 2012 et une croissance "plate" en 2013), les mesures insérées dans le décret rebaptisé "Sauvons l’Italie" sont axées sur trois points essentiels:
- les finances publiques
- la prévoyance sociale
- le développement
Les réformes du marché de l’emploi évoquées au lendemain de la nomination du gouvernement Monti seront examinées avant la fin de l’année. Les estimations sur le PIB pour 2012 et 20113 ont été revues à la baisse. L’an prochain, les prévisions sont de -0,4% et -0,5%. En 2013, la croissance sera "plate".
Sur le front des retraites, l’un des dossiers chauds soulevés par Bruxelles, les Italiens devront désormais verser entre 40 et 42 annuités pour les hommes et 41 pour les femmes avant de partir en retraite. A partir de 2018, les hommes et les femmes partiront en retraite à 65 ans. En parallèle, le ministre de l’Emploi a annoncé une retouche vers le haut du taux d’imposition des travailleurs indépendants.
Coté impôts, la taxe sur la première propriété aboli pour des raisons électorales par le gouvernement Berlusconi en 2008 sera réintroduit. A partir du deuxième semestre 2012, la TVA sera augmentée de deux points. La "patrimoniale", la fameuse taxe sur les grandes fortunes et les revenus les plus élevés invoquée par les syndicats et les centre-gauche, n’a pas été introduite. Un recul que Mario Monti a justifié par l'importance de l'évasion fiscale et les faibles recettes à attendre d'une telle réforme.
Boucherie sociale
Pour tenter de parer à la colère des syndicats et la grogne des Italiens qui parlent de boucherie sociale aux dépends des classes moyennes et faibles, le gouvernement a introduit une taxe sur les voitures de luxe.
Dimanche soir, les syndicats faisaient publiquement état de leurs inquiétudes et de leur colère et brandissaient déjà l’arme de la grève générale. Cet après-midi, le gouvernement Monti présentera sa manœuvre au Parlement puis au Sénat.
Le vote devrait avoir lieu d’ici jeudi et il n’est pas à priori exclu que le président du Conseil pose la question de confiance. Une façon de vérifier l’état d’esprit des deux chambres et de voir si le gouvernement a une majorité confortable et peut par conséquent tenir les deux mains sur le guidon.