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Grimbergen encourage la délation des francophones

vendredi, 9 décembre, 2011 - 14:46

La commune flamande de Grimbergen, située à quelques kilomètres au Nord de Bruxelles, vient de mettre en place un système de délation entre citoyens. Les délits à rapporter à la mairie ? Le fait de parler français dans les lieux publics et les magasins. Des mesures fascisantes pour certains députés qui en appellent à l'Europe.

Grimbergen, une commune du Brabant Flamand, est surtout connue pour sa bière et son logo aux armes d’un phoenix renaissant de ses cendres et la devise latine sans doute inspirée de celle de Paris: Ardet nec consumitur"il brûle mais ne consumme pas" !

Et pourtant, à Grimbergen, brûle un feu communautaire qui n’est pas prêt de s’éteindre: la commune flamande multiplie les attaques contre la langue française. En 2010, la bourgmestre Marleen Mertens avait déjà fait circuler une pétition interdisant de parler français au club local de football, estimant que les enfants du territoire était surexposé à la langue "étrangère"…

Appel à la délation

Cette année, la bouillante bourgmestre de la ville récidive. Dans le journal municipal du mois de décembre, elle lance un appel solennel aux habitants:

La commune travaille pour préserver le caractère flamand (…). Malheureusement nous constatons que tout le monde ne le respecte pas (…). Vous avez vu des publicités en français ou entendu parler une autre langue? Vous pouvez déposer plainte à la commune."

Mieux, un "point de signalement" a été créé au sein de l’administration municipale afin de centraliser et de traiter ces plaintes.

Quelles sont les sanctions prévues? Si un commerçant s’avise d’afficher une annonce ou un communiqué en français, l’administration communale lui envoie une "lettre amicale" lui rappelant que Grimbergen se situe en territoire flamand et que donc, toute communication doit y être faite en flamand.

La cause de cette francophobie obsessionnelle, c’est l’installation de plus en plus fréquente de résidents francophones sur cette commune à la périphérie bruxelloise, en raison de la crise de l’immobilier dans la capitale belge. Les communes flamandes à proximité de Bruxelles offrent encore un cadre tranquille à des prix accessibles.

Des habitants plus tolérants que leurs autorités

Pour autant, tout le monde ne perçoit pas ces nouveaux arrivants comme autant d’envahisseurs. Des habitants de Grimbergen se montrent plus raisonnables que leurs autorités.

De plus en plus de francophones s’installent ici. Chacun est libre de vivre où il veut, mais il faut tout de même préserver le néerlandais",

déclarait un résident à la RTBF.

Un commerçant estime que "la bourgmestre ne peut pas décider à notre place de la langue que nous parlons. Je suis commerçant et j’accueille mes clients dans leur langue quelle qu’elle soit".

L’échevin (conseiller municipal) Patrick Vertongen indique qu'il s'agit d'une méprise.

Les francophones sont les bienvenus à Grimbergen, ils doivent simplement apprendre le néerlandais".

Mais de l’autre côté de la frontière linguistique, "trop is te veel" (trop, c’est trop !) comme disent les vieux Bruxellois !

Lettre à l'Europe

Frédérique Ries, députée européenne libérale francophone et ancienne présentatrice de RTL-TVI, adressait ce 9 décembre une lettre au Président de la Commission Européenne, Manuel Barroso, ainsi qu’à la Commissaire aux Droits fondamentaux, Viviane Reding.

Elle y expose la situation dans la commune flamande et dénonce la violation non seulement de la Constitution belge, mais également des traités européens signés par la Belgique.

Pour elle, ces actes ne sont pas

de simples tracasseries administratives comme on les qualifie si pudiquement en Belgique. Il s’agit d’atteintes aux libertés fondamentales et à la dignité humaine. Elles ne peuvent être admises dans l’Union européenne dont les valeurs universelles de tolérance, de respect et d’ouverture sont sensées rayonner à travers le monde".

Des "mesures fascisantes" qui menace l'équilibre communautaire

Le député libéral Denis Ducarme, pour sa part, parle de "mesures fascisantes" et se prépare à interpeller le tout nouveau gouvernement: il a déclaré aux journaux du groupe Sud-Presse "être étonné par l’absence du CD&V (démocrates chrétiens flamands), parti auquel appartient Madame Marleen Martens [la bourgmestre de Grimbergen]". Il propose de fonder un "Centre d’égalité des chances" à l’instar de celui qui existe pour les problèmes de racisme, mais qui se chargerait des questions linguistiques.

La ville au phoenix a allumé un feu communautaire qui risque peut être de se propager comme un incendie et de brûler la maison Belgique. Qui n’a pas vraiment besoin de ça en ce moment…




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