Le Vatican, qui ne paye aucun impôt, se dit prêt à apporter son obole à l'Etat italien pour rembourser sa dette. Mais combien? Des milliards ou des millions? Seule certitude, le Saint Siège a les moyens. Etat des lieux de son impressionnant patrimoine.
Cela fait longtemps que les Italiens réclament la révision des Accords du Latran de 1929 qui permettent au Vatican d’échapper au fisc. Mais aucun gouvernement, de droite comme de gauche, n’a jamais eu le courage politique de remettre en cause cette exemption fiscale qui risquait de lui coûter une partie de l’électorat catholique.
Malgré tout, depuis que le gouvernement de Mario Monti a demandé aux Italiens "des sacrifices" pour sauver l’Italie de la faillite, les sacrifiés sur l'autel de l'extrême rigueur budgétaire estiment que le Saint Siège, dans sa grande bonté, devrait, lui aussi, mettre la main à la poche.
Un groupe qui vient d'être créé sur Facebook compte déjà 168.000 "amis". Au parlement, une vingtaine de députés du parti démocrate ont rédigé un document réclamant l’abolition ou, pour le moins, la révision du concordat de 1929, déjà révisé en 1984 par le gouvernement Craxi… pour le plus grand bénéfice du Vatican.
Le Saint Siège prêt à porter sa croix
Du coup, le gouvernement de technocrates formé par l’ancien commissaire européen pour la Concurrence qui, dans un premier temps, n’a pas voulu inscrire le Saint Siège sur la liste des institutions imposables, pourrait revoir sa copie. Et, miracle, pour éviter le Golgotha et la lapidation publique, le Vatican se dit prêt à porter sa croix en participant à l’effort collectif.
Mais, charité bien ordonnée commence par soi-même, à laissé entendre le cardinal Angelo Bagnasco, qui dirige la conférence épiscopale italienne, en réaffirmant qu'il n'était pas question pour l'Eglise d'accepter une abolition du Concordat, mais tout au plus un aménagement. Une façon de dire que l’Eglise est prête à payer son obole mais pas trop.
L’Eglise de Saint Pierre économise chaque année 2,2 milliards d’euros sur l’impôt sur la propriété et 4 autres milliards en échappant à la TVA, la taxe sur les sociétés, l’impôt sur le revenu et la taxe régionale sur les activités productives.
115.000 immeubles, 9 000 écoles
Autant d’avantages ont également fait sursauter l’Union européenne. Selon l’UE, une partie de la curie mettrait à profit son impunité fiscale pour concurrencer les cliniques, les écoles et les hôtels qui payent leurs impôts. Or Bruxelles est profondément allergique aux distorsions de la sacro-sainte concurrence libre et non faussée.
Mais à combien s’élève le patrimoine du Vatican ? En l’absence de chiffres réels, le Vatican échappant grâce au Concordat aux lois du cadastre, reste l’estimation à la louche. L’administration du patrimoine du Siège apostolique (Apsa) fait preuve d'une incommensurable modestie en évaluant ce patrimoine à 50 millions d'euros.
Non seulement ce chiffre est ridicule, mais il n'est pas actualisé. Or chaque congrégation religieuse a un empire immobilier qui ne cesse de s'étoffer.
A Rome, dix mille testaments sont rédigés chaque année en faveur du clergé. Les estimations non officielles font un état d'un trésor impressionnant: 115.000 immeubles, 9 000 écoles et plus de 4 000 hôpitaux et centres sanitaires.
Cadeaux fiscaux de Berlusconi
Rien que dans la Cité éternelle, le Vatican détient 23.000 terrains et immeubles, 20 maisons de repos, 18 instituts de soins et 6 hospices. A titre d’exemple, le patrimoine de Propaganda Fide, la congrégation pour l’évangélisation des peuples, pèse quelques 9 milliards d’euros. Des immeubles cossus situés en plein centre de Rome comme le magnifique palais qui nargue la Place d’Espagne.
Laissez venir à moi les petits sous. Une maxime que le Vatican applique à la lettre grâce au soutien des gouvernements italiens. Pour faire plaisir au Saint Siège, le gouvernement Berlusconi avait exempté d’impôt tous les immeubles appartenant aux instituts "no-profit" en 2005. Une loi qui favorise les 214 maisons de vacances recensées par la fédération des hôteliers italiens dont le chiffre d’affaires annuel frôlent les 700 millions d’euros.
Business is business
Il ne faut également pas oublier le très lucratif business du tourisme religieux qui fait tomber 4 milliards d’euros chaque année dans les caisses du Vatican. Pour augmenter ce chiffre d’affaires, de nombreux couvents et séminaires ont été reconvertis en hôtels ou découpés en appartements dont la vente et la location génèrent des centaines de milliers d’euros.
Un peu de générosité envers l'Etat italien lourdement endetté, ne serait-ce que quelques malheureux milliards, seraient la preuve que l'Eglise sait, quand il le faut, se détacher des contingences bassement matérielles.