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Don Verzé, un saint homme… d’affaires

mercredi, 11 janvier, 2012 - 17:11

Don Verzé n'avait pas fait veux de pauvreté. Monsieur le curé ne se déplaçait qu'en jet privé pour se reposer dans sa villa brésilienne ou surveiller ses plantations, ses hôtels, ses chevaux et même son université privée. Sa mort plonge le Vatican dans l'embarras.

La vie dorée de Don Verzé, le prêtre entrepreneur, a pris fin le 31 décembre dernier. Alors que les Italiens s’apprêtaient à fêter le Nouvel an, le Don Manager, comme l’avaient rebaptisé ses propres ouailles, s’est éteint à l’âge de 91 ans dans une chambre de l’Hôpital San Raffaele. C’est dans cet institut, qu’il avait crée en 1970 avec les deniers de l’Etat que tout avait commencé et que tout est fini. Enfin presque.

En partant sur la pointe des pieds, le Don n’a pas révélé tous ses secrets. Englué jusqu’au cou dans le scandale de la faillite de son hôpital en juillet dernier, impliqué dans le suicide d'une balle en pleine tête de son bras droit Mario Cal, le 18 juillet dernier, Don Verzé garde sa part d’ombre au-delà de la mort.

Selon certains, ce prêtre suspendu a divinis en 1970 par la curie milanaise choquée par ses excès, puis de nouveau autorisé à dire la messe quelques temps après, était un saint homme puisqu’il avait fondé un institut à la pointe dans le secteur de la Santé. Et qu’il multipliait – coté cour – les bonnes œuvres. Pour d’autres, il était tout simplement une magnifique canaille qui avait savamment détourné une partie des financements publics destinés au San Raffaele pour s’offrir quelques douceurs.

Charité bien ordonnée commence par soi-même

A commencer par une magnifique villa située au cœur du Brésil, des plantations de raisins sans pépins (!) et des groupes hôteliers sur la très chic côte Smeralda en Sardaigne. Sans oublier un jet privé d’une valeur de 20 millions d’euros, un zoo et un élevage de chevaux dans lequel il s’était choisi un étalon appelé "Empereur".

Enfin, une université comptant parmi ses membres les plus grands intellectuels italiens comme Massimo Cacciari, l’ex maire philosophe de Venise. Des opérations montées grâce à plusieurs sociétés écrans créées par Don Verzé pour mieux détourner les aides de l’Etat et les donations offertes par les contribuables attendris par le visage poupin et sous sourire permanent.

Pour Don Verzé, l’Etat de grâce avait commencé à prendre fin en juillet dernier quand l’hôpital San Raffaele endetté à hauteur de un milliard et demi d’euros avait fait faillite. Un rude coup pour le fondateur de cet institut qui avait accueilli Silvio Berlusconi en décembre 2010 après son agression. D’autant qu'à la suite de cette banqueroute, les juges milanais en charge du dossier avaient mis le nez dans les dossiers secrets du prêtre, qui jouissait du soutient de la classe dirigeante, notamment de l'ex-chef du gouvernement.

Ses amis? Berlusconi, Craxi et…Castro

Les deux hommes s’étaient connus dans les années 70. A l’époque le futur Cavaliere s’était offert plusieurs hectares dans la banlieue milanaise pour construire un vaste complexe immobilier qu’il aurait rebaptisé Milano 2. En fait, une cité dortoir.

Le curé, pour sa part, avait acheté des terrains mitoyens. L’occasion pour les deux larrons de faire connaissance et de nouer des relations de bon voisinage. Cette amitié avec Berlusconi a permis au saint homme d'affaires de rentrer dans le cercle privilégié des politiciens qui comptaient il y a un mois encore, c'est-à-dire avant la chute du Cavaliere. Et de renforcer d’autres amitiés utiles avec, notamment, Bettino Craxi, l’ancien leader socialiste chassé de son pays lors de l'opération "Mains propres" en 1993.

Sans oublier de fréquenter, en parallèle, des hommes comme Fidel Castro qui n’ont jamais eu bonne presse au Vatican comme auprès de la droite italienne.

Grâce divine

A la demande du Vatican, Don Verzé avait lâché le timon de l’hôpital San Raffaele en décembre dernier. Soit une semaine avant de mourir. L’homme avait bien essayé de résister, mais que pouvait-il faire face aux pressions de la hiérarchie de Saint Pierre, qui a déjà assez de casseroles avec les scandales de pédophilie qui tombent en cascade? D’autant que les juges milanais en charge du dossier San Raffaele n’avaient pas l’intention de lâcher le morceau. En grattant patiemment le vernis, ils avaient découvert les multiples activités illégales du prêtre.

Depuis une dizaine de jours, Don Verzé repose dans le cimetière de Vérone, sa terre natale. Un peu plus loin, à Milan, les juges enquêtent toujours sur les activités du prêtre tourmenté par la richesse. Et sur les bords du Tibre, le Vatican essaye de redresser la situation de l’hôpital San Raffaele en priant le Tout Puissant qu’il ait pitié des morts et des vivants et que sa grâce divine inspire les juges. Les défunts n'ont-ils pas droit à la rémission de leurs péchés!




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