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Et maintenant, pédale ! A Rome, Roland, livreur hongrois à vélo

vendredi, 13 janvier, 2012 - 16:11

C’est l’histoire d’un livreur hongrois, parti à vélo à la conquête de Rome. Au delà du job, il défend une nouvelle culture de la mobilité urbaine europénne. Comme lorsqu’il participe au championnat d’Europe des livreurs à vélo… Portrait.

Ce qui est très commode quand on doit interviewer un livreur, c’est que c’est lui qui se déplace. S'il est en vélo, le temps d’attente est encore plus court: Roland est de l’autre côté de Rome lorsque je l’appelle, mais en moins de 30 minutes, il est au rendez-vous… Et il n’halète pas comme vous ou moi après un tel trajet. Normal, Roland peut, certains jours parcourir dans les 170 kms en vélo ("c'est une évaluation en fonction du temps passé sur la selle et de ma vitesse moyenne car nous n’avons pas de compteur sur les vélos").

De Budapest à Rome

Hongrois, Roland Ruff connait l’Europe urbaine sur le bout de ses roues. Il a commencé, il y a dix ans, à pédaler pour livrer, à Budapest.

L’idée des livreurs en vélo semble être partie de San Francisco, mais pour les deux fondateurs de l’entreprise à Budapest, qui sont devenus mes associés, il s’agissait surtout de trouver quelque chose à faire".

Et avec un capital de départ proche de zéro.

Flash Back. A Budapest après la chute du mur, les deux amis Thoth Zoltan et Geresi Laszlo sont assis au bar à côté d’une cabine téléphonique qui leur sert de bureau. L’un prend les appels, l’autre livre en vélo… "Même le vélo n’était pas à eux, ils se l’étaient fait prêter par un ami". Aujourd’hui, l’entreprise fait plus de 1.000 consignes par jour.

Après avoir pratiqué la profession à Valence, en Espagne, Roland a créé, avec Thoth et Geresi, l’entreprise Eadessopedala ("Et maintenant, pédale") à Rome.

Et maintenant, pédale !

Après 3 ans d’activité, ils sont désormais 8 livreurs dans toute la ville. Et très compétitifs.

En vélo, sur les distances urbaines moyennes, nous allons bien sûr plus vite que les voitures, mais aussi que les scooters"

L’avantage de Rome, pour le business, et que la ville est justement peu habituée au vélo. "C’est simple nous n’existons pas, je peux passer au rouge ou emprunter un sens interdit devant un policier et il ne me regarde même pas". Une grande différence avec Budapest ou avec le reste de l’Europe, puisque les vélos peuvent y recevoir des amendes salées.

Et à Rome, la réception des clients est à la fois amusée et solidaire. "Les clients me disent toujours de ne pas aller trop vite (on les comprend, Roland va facilement à 35 km/h en ville) et cela les amuse beaucoup de nous voir arriver en vélo".

Tous les poids, toutes les mesures

Si la plupart des clients demandent de transporter des documents urgents qui doivent être signés et renvoyés dans l’heure, les livreurs peuvent aussi porter de grosses charges – jusqu’à 15 kg de colis – grâce à leurs sacs très ergonomiques.

Après avoir passé un accord spécial avec Zolle, l’un des principaux groupes d’achats solidaires de la ville, ce sont désormais les caisses de légumes qu'ils livrent, grâce aux 4 "Bullitt" : des vélos danois dotés de deux roues à l’arrière et d’un grand espace à l’avant.

"Fixed bike" : roulons vite, roulons sans frein

Pédaler pour travailler c’est bien entendu un gagne pain. Mais aussi une passion, un jeu. Roland utilise un "fixed bike". C’est un vélo à pignon fixe (pas de vitesses), très léger – c’est essentiel – et surtout, sans freins! "Les personnes les plus âgées reconnaissent ce type de vélo, c’est le même principe que les premiers vélos, avec la grande roue devant, et c’est très amusant à conduire".

Le groupe de livreurs – tous amis – s’organisent pendant leur temps libre des courses urbaines, et participent à de nombreuses compétitions amicales : "bike polo"; championnat européen des cyclo-livreurs; les courses Alley cat (une liste d'adresses et le premier coursier à effectuer les livraisons gagne la course) ou encore les Goldsprint'

Une sous-culture à pédale

"Avec ces compétitions, nous avons maintenant des connections dans toute l’Europe, par exemple une amie à Paris me disait justement que cela n’est pas facile de passer au rouge en France, on est arrêté immédiatement". Le rapport avec la voiture est, par contre, complètement décomplexé pour lui.

Je n’aime pas trop l’esprit 'Critical mass' où les cyclistes sont agressifs par rapport aux voitures. Moi, au contraire, j’ai de bons rapports avec les automobilistes, et j'y suis obligé, en étant toute la journée dans la rue".

S’il y a parfois de l’agressivité de la part des automobilistes c’est plutôt "parce qu’ils sont envieux de te voir passer tranquille, libre, sans être bloqué dans une boite au milieu des embouteillages".

Multiplier les services à vélos ? Dans les centres villes européens, saturés et contraints à une mobilité toujours plus compliquée, ce type de solution est très convaincant. A écouter Roland parler de son métier, on ne quitterait plus le vélo. "Quand tu fais du vélo, plus besoin d’aller dans les salles de sport, de payer pour bouger, c’est un peu comme une drogue. On se sent bien ensuite, on est relaxé, et on sourit au milieu des embouteillages".

Course de vélo Alleycat (épileptiques s'abstenir…)




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