Parmi les Européennes dupées par les implants PIP, les "trans" sont souvent oubliées. Pas aux Pays-Bas: les assureurs néerlandais rembourseront intégralement les opérations de leurs prothèses mammaires.
Les implants PIP défectueux ont provoqué une vague de panique partout en Europe: en France, le ministre de la santé, Xavier Bertrand a exigé un rapport d’experts sur l’état des lieux des contrôles opérés sur la société Poly Implant Prothèse, à l’origine de ces implants non-conformes.
Les autorités sanitaires françaises estiment qu’environ 30.000 femmes portent des implants PIP présentant un risque de déchirure de la membrane ou d’écoulement du gel. Soit les implants produits entre 2001 et 2011. En Grande-Bretagne, elles seraient plus ou moins 40.000 selon le NHS (National Health Service – Service National de la Santé). Les assureurs néerlandais ont, eux, recensé environ 2.000 femmes ayant eu recours aux implants mammaires incriminés, que ce soit pour des raisons esthétiques ou médicales, suite à une ablation du sein pour cancer, notamment.
Qui sont ces femmes ? Difficile de le définir exactement. Mais un communiqué du TNN (Transgender Netwerk Nederland – Réseau Transgenre des Pays-Bas) vient apporter une précision: une partie importante des Néerlandaises ayant recours à l’implantation mammaires sont des transsexuelles.
Des opérations intégralement remboursées
TNN a donc prévenu ses membres, via un communiqué sur son site, que les assureurs néerlandais rembourseraient intégralement le coût des opérations de remplacement des prothèses PIP par des implants de qualité.
L’association des assureurs néerlandais a également publié une déclaration dans ce sens. Elle estime que
les assurées ne doivent pas être les dupes de ces produits non-fiables et que ce n’est pas à elles d’en supporter le coût"
Le directeur de l’association a ajouté que "la situation des femmes concernées est déjà suffisamment pénible, les assureurs en soin de santé ne désirent donc pas leur faire assumer le coût de tout cela."
L’association invite toutes les personnes qui ont recouru aux implants PIP entre 2001 et 2011 à en parler à leur médecin-traitant qui les renverra vers les services adéquats.
Les autorités sanitaires, pour leur part, publient une liste des 102 hôpitaux et 56 cliniques privées susceptibles d’avoir utilisé ces implants lors d’opération esthétiques ou thérapeutiques.
Une population méconnue
Combien de personnes transgenres ont recouru à ces implants? Personne ne le sait. Il n’y a même pas de chiffres fiables sur le nombre total des transgenres aux Pays-Bas. Celui-ci est même sujet à discussion. Le Bureau Central des Statistiques parle de 900 transsexuels résidant dans le Pays.
Parmi eux, 850 personnes, âgées de 15 à 65 ans aurait subi une opération de changement de genre entre 2005 et 2009. 62 % d’entre elles sont des hommes qui ont choisi la féminisation et 38 % des femmes qui ont opté pour la masculinisation.
La majorité de ces personnes sont d’origine néerlandaise et sont âgées de 34 à 54 ans (voir graphique). Les deux tiers d’entre ces personnes ne sont pas mariées et 16 % sont divorcé(e)s.
Aux Pays-Bas, il est possible de changer de genre depuis la fin des années 1970. Et depuis 2009 – derniers chiffres pris en compte par les statistiques officielles – de nombreuses personnes ont entrepris un changement de genre. Alors, savoir combien sont porteuses d’implants PIP semble aussi difficile que de chercher une aiguille dans une botte de foin…
Discrimination au travail et violences graves
Mais toutes les institutions néerlandaises s’accordent pour reconnaître que les "trans" constituent les principales victimes de la recrudescence de la discrimination et des violences contre les LGBT (Lesbiennes, Gay, Bi-sexuels et Transgenres, Ndlr).
Elles (ou "ils") souffrent davantage de discrimination au travail et sont surreprésenté(e)s dans les chiffres du chômage. Et lorsqu’elles travaillent, ces personnes ont, aux Pays-Bas comme ailleurs, en moyenne un salaire inférieur au reste de la population: alors qu’elles disposent souvent d’une éducation supérieure, 75 % d’entre elles ne disposent que d’une revenu très bas. La moitié d’entre elles vit seule et un tiers vit de l’aide sociale.
Le taux de suicide est également très élevé parmi les "trans": une récente étude américaine portant sur 6.400 personnes met en avant le chiffre incroyable de 41 % de personnes ayant tenté de se suicider contre 1.6 % au sein de la population dans son ensemble.
Un signal positif
Elles sont également victimes d’agressions violentes, voire de meurtres, comme le rappelait la militante "trans" philippine Sass Rogando Sasot lors de la dernière "journée du souvenir transgenre" (Transgender Gedenkdag 2011) qui s’est tenue près du Monument Homo (Homomonument) d’Amsterdam le 19 novembre dernier.
Le remboursement intégral des soins de santé entraînés par les implants PIP est, pour une fois, un signal positif des autorités néerlandaises à une population dont le lot quotidien est la stigmatisation et la discrimination.