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Grèce: et maintenant?

lundi, 13 février, 2012 - 15:35

Après avoir fait voter le nouveau plan de rigueur, les jours du gouvernement grec sont comptés. Des élections anticipées auront lieu en avril. Cela suffira-t-il à calmer la colère des Grecs ? Sans doute pas, mais cela devrait au moins permettre de temporiser et d'éviter dans l'immédiat une explosion sociale généralisée.

Le peuple grec est aujourd’hui à genoux et s’enfonce dans la pauvreté. Les deux grandes centrales syndicales (GSEE privé et ADEDY public) ont lancé un appel à la grève générale illimitée. Une situation insurrectionnelle? Pas vraiment. Mais l'annonce d'élections anticipées ne va probablement pas suffire face aux extrêmes tensions sociales engendrées par la fuite en avant dans l'austérité imposée par Bruxelles.

Si les fonctionnaires sont vent debout avec un syndicat fort de 375.000 adhérents sur 700.000 agents du secteur public, il n’en est pas de même des salariés du secteur privé oscillent entre résignation et combativité.

Les employés du petit commerce, de la restauration et du tourisme s’accrochent à leur travail, tant qu’ils en ont encore et rechignent à faire grève. Par ailleurs, la GSEE, divisée en trois tendances politisées -socialiste, communiste et conservateur- n'est pas en position de force. C'est la tendance communiste (le PAME) qui est en pointe de la combativité et des manifestations alors que la direction socialiste de la GSEE est largement déconsidérée.

Emeutes sporadiques

Mais des émeutes sporadiques et des violences issues d’une jeunesse qui n’a plus rien à perdre, sont à craindre. Des actions spontanées face à la politique d'austérité renforcée qui vient d'être votée à la demande express des créanciers du pays. 

Outre la crise économique et sociale, la Grèce va devoir faire face à une profonde crise politique. Le gouvernement de Loukas Papadimos, ancien de Goldman Sachs, formé le 9 novembre dernier, marie la carpe et le lapin: conservateurs de la Nouvelle Démocratie, socialistes du PASOK et néo poujadistes liés à la fraction réactionnaire de l’église orthodoxe.

Or pour les Grecs, ce gouvernement est illégitime car il n’a pas été élu. Une première depuis le 21 avril 1967 avec le coup d’Etat des colonels! Depuis 1974 et le retour à la démocratie, c’est toujours le président du parti vainqueur qui forme le gouvernement, sauf pendant l’intermède de 1989-1990 avec trois gouvernements d’experts.

Dimanche, Antonis Samaras, président de la Nouvelle Démocratie (ND) avait demandé la tenue de législatives anticipées début mars et a obtenu gain de cause. Le gouvernement n'a plus que "un mois à un mois et demi de travail devant lui", a annoncé ce lundi son porte-parole. Des élections législatives anticipées auront lieu en avril.

Ceci alors que face aux conservateurs, les socialistes désertent les rangs du PASOK. Il sera, sans nul doute, le grand perdant de ce scrutin. La ND est également discréditée et ne doit pas, pour autant, s'attendre à un bon score. En revanche les extrêmes devraient progresser : le LAOS à droite et les deux "familles" communistes (KKE et Syriza). Mais s’est certainement le parti des abstentionnistes qui devrait être le grand vainqueur, malgré le vote obligatoire en Grèce.

Impasse politique pour la droite et la gauche

Les Grecs n'ont pas la mémoire courte et n’ont plus confiance dans leurs deux grands partis traditionnels. Ils se souviennent que le trafic des statistiques publiques, notamment sur la dette de l'Etat, a commencé en 2001 sous le gouvernement socialiste de Kostas Simitis, chef de file de la tendance sociale démocrate du PASOK. Pour ce faire, il avait payé grassement des experts de Goldman Sachs pour manipuler les chiffres. C’est ainsi que la Grèce annonçait des déficits de 2,6-2,8%.

En 2004, quand la ND est revenue aux affaires. Elle a trouvé des déficits de l’ordre de 4,5%. Le gouvernement de Kostas Karamanlis avait alors révélé le pot aux roses. Puis après quelques mois, il s’est mis, à son tour, à trafiquer les comptes. De retour au pouvoir en 2009, le PASOK ne pouvait plus cacher la poussière sous le tapis, les déficits étant alors de l’ordre de 8-9% du PIB.

C’est pour cela que le nouveau gouvernement issu des prochaines élections sera, certes, légitime démocratiquement, mais toujours illégitime pour une grande partie de l’opinion publique hellène. 


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