Renégocier l’aide internationale au Portugal ? La question se pose après qu'un off entre des ministres portugais et allemands a été rendu publique. Si le gouvernement portugais nie toute intention de renégocier les 78 milliards d’euros alloués par l’aide internationale, l’asphyxie gagne au Portugal. Et la méfiance envers l’Allemagne aussi.
Les deux hommes parlent doucement. Le ministre des finances portugais, Victor Gaspar, et son homologue allemand, Wolfgang Schäuble, discutent avant la réunion de l’Eurogroupe qui s’est déroulée à Bruxelles jeudi 9 février. Le ministre allemand garantit à son homologue portugais : "S’il y a besoin d’un ajustement du programme portugais, nous serons prêts".
Un off qui dégénère
La conversation n’était pas censée être publique, mais elle a été diffusée par la chaine privée portugaise TVI. La bronca qui s’en est suivie au Portugal s’est déroulée à deux niveaux. D’abord un intense ballet d’explications et de justifications sur le bien-fondé d’une telle diffusion, et ensuite, un véritable étonnement quand au contenu de la conversation entre les deux ministres.
Car, et la répétition tient lieu de catharsis, le gouvernement de Lisbonne nie toute idée de renégociation, tant sur le montant de l’aide attribuée au Portugal – 78 milliards d’euros – que sur les délais pour appliquer les mesures d’assainissement nécessaires. L’imperturbable Victor Gaspar, le ministre des finances, s’est tout de même empêtré dans des explications confuses d’où il ressort qu’il ne s’agissait, en fait, que de revenir sur ce qui a toujours été convenu entre les partenaires européens: des aménagements seront possibles pour les pays qui sauront mené à bien leur programme de redressement des finances, et seulement à l’issue du plan, après 2013.
L'Allemagne a du mal à tenir sa position
Les observateurs sont, en effet, de plus en plus nombreux à critiquer le rôle de l’Allemagne dans la gestion de la crise. Angela Merkel soutient la Grèce et, partant, le maintien de la zone euro. Fortement attachée à la politique d’austérité, Merkel doit multiplier les efforts pour convaincre son opinion publique de continuer à la soutenir. En cas d’échec ce sera la chute. Et Schlaüble le ministre des finances allemand, semble vouloir de moins en moins être emporté dans la chute.
A Lisbonne, la stratégie allemande est de plus ouvertement critiquée. Samedi 11 février, le leader de la CGTP – la Confédération Générale des Travailleurs Portugais -, qui a réuni une grande manifestation dans le centre de Lisbonne, a vertement critiqué les dirigeants portugais qui soutiennent une stratégie asphyxiante dictée par le FMI et l’Union Européenne.
Des milliers de personnes ont alors conspué le gouvernement.
Fausse modestie portugaise ?
Pour le journaliste Fernando Sobral (Jornal de Negócios) le Portugal met en place une "stratégie à la Bart Simpson" : il fait semblant d’être bon élève, se dit victime incomprise et se fait régulièrement assassiner par un Homer quelconque pris de folie.
La comparaison est osée et serait risible si la farce n’était pas plutôt une tragédie. La récession redoutée est déjà là : le PIB a reculé de 2,7 % au cours du quatrième trimestre de 2011. Une conséquence directe de la diminution du pouvoir d’achat des Portugais avec la diminution des primes de Noël et l’augmentation de la TVA et des prix. Mais la politique d’austérité va se poursuivre, le Premier ministre Pedro Passos Coelho le répète à l’envie.
Nouvelle mise à l'épreuve
Cette semaine débute la troisième visite des bailleurs de fonds internationaux à Lisbonne. Une nouvelle fois les comptes de l’État vont être passés au peigne fin. Si les deux premières visites se sont soldées par un satisfecit et l’attribution d’une tranche d’aide d’un montant total de 78 milliards d’euros, cette fois Lisbonne est sur la défensive.
Les dépenses de l’État devraient déjà être épongées, les bailleurs de fonds ont accordé un sursis. Dans quinze jours tombera le verdict. En cas de réponse négative ce sera à coup sûr la spirale Athénienne qui touchera Lisbonne.
Un scénario catastrophe que tout le monde redoute.