Rigueur et désendettement obligent, Rome n'est plus candidate aux jeux olympiques 2020. Mario Monti a suivi les conseils de son homologue britannique. David Cameron lui a expliqué que les JO de Londres sont un gouffre financier.
En rentrant mardi soir de New York, Mario Monti a profité de ses huit heures de vol pour lire le dossier préparé par le cabinet d’études Fortis sur la candidature de Rome aux JO 2020. A en croire ce dossier, épais comme l’Ancien Testament, les Jeux Olympiques ne couteraient pas un euro à l’Italie. L’ancien commissaire européen pour la Concurrence aujourd'hui à la tête du gouvernement italien, n'a pas été convaincu.
Il s'est souvenu d'une petite discussion en janvier dernier avec un expert des dépenses olympiques: David Cameron.
Faites attention et ne vous laissez pas trop influencer par les études de marché. Pour les JO de Londres, nous avons même créé une autorité de régulation pour contrôler la régularité durant les appels d’offre. Au final, les dépenses ont carrément doublé",
lui avait confié le premier ministre britannique. Propos rapportés par la presse italienne.
"Souvenez-vous de JO d'Athènes"
Selon les prévisions dressées par les économistes qui entourent Mario Monti, le budget de départ estimé à 9,8 milliards d’euros dont la moitié à charge de l’Etat, aurait triplé d’ici 2020. Un montant "monstrueux" et synonyme de faillite pour le chef du gouvernement italien.
Et, n'en déplaise à Fortis, les conseillers économiques de Mario Monti, ne croient pas une seconde que les droits de retransmission, la vente des billets et autres produits dérivés seraient suffisants pour rentabiliser les dépenses.
Souvenez-vous de la Grèce, les JO de 2004 ont été le début de la fin",
a déclaré le chef du gouvernement italien mercredi matin durant le conseil des ministres. Les dépenses fastueuses engagées par l’Etat hellénique en 2004 ont transformé les Jeux Olympiques en un véritable désastre pour l’économie grecque. Alors que l'évaluation initiale était de 5 milliards d’euros, la note a grimpé à 8,95 milliards dont 7,2 à charge de l’Etat.
Brasse coulée
Et puis, l’Italie a, elle aussi, de très mauvais souvenirs en matière de compétition sportive. Les Mondiaux de natation de 2009 se sont soldés par un échec sur le plan financier. Les coûts ont triplé (90 millions d’investissement au lieu des 24 prévus) pour la construction de structures qui n’ont jamais été utilisées. D’autres, comme à Rome la cité du sport de Calatrava, sont toujours en chantier faute de financement.
Sans parler des scandales autour des appels d’offres orchestrés par des proches de Silvio Berlusconi comme le constructeur Anemone et l’ancien patron de la protection civile, Guido Bertolaso.
Ne pas fâcher Merkel
Reste une autre question épineuse: la candidature turque soutenue par l’Allemagne. Froisser Angela Merkel en faisant de Rome la concurrente d’Istanbul alors que les relations italo-germaniques sont déjà tendues en raison des divergences politiques et économiques n’aurait pas été une bonne idée.
Selon la presse italienne, cette théorie aurait été développée, toujours durant le conseil des ministres, par Giulio Terzi, le chef de la diplomatie italienne.
La candidature de Rome pourrait donner lieu à une nouvelle campagne anti-Italie. Certains pourraient remettre en question la solidité du plan de redressement de la péninsule si nous nous lançons dans des dépenses folles pour une histoire de JO. Je crains des coups bas et les marchés ne nous pardonnerait pas un nouveau faux pas,
aurait déclaré Mario Monti devant ses ministres. Et de conclure: en l’état actuel, l’Italie doit cultiver ses alliances en Europe et non pas se faire des ennemis.
Les sportifs font pâle figure
Le président du Conseil se serait également étonné en coulisse de la position de son homologue espagnol, Mariano Rajoy qui maintient la candidature de Madrid alors que la santé économique de son pays n'est pas enviable.
Tandis que les sportifs font pâle figure, la classe politique applaudit le choix de Mario Monti. "Une attitude responsable en une période aussi difficile", déclaraient à l’unisson la Ligue du Nord et le parti démocrate. Le chef de l’Etat Giorgio Napolitano, partisan déclaré de la candidature de Rome, a, quant à lui, mangé son chapeau en affirmant qu'il "y aura d’autres occasions". En 2024?