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Rome sonne le glas de l’immunité fiscale de l’Eglise

jeudi, 16 février, 2012 - 17:11

Mis en demeure par Bruxelles de taxer les biens immobiliers de l'Eglise, Mario Monti s'exécute. Des milliards qui sont bienvenus pour renflouer les caisses de l'Etat. Mais le Vatican va négocier ferme pour alléger la note.

Sacré Monti! Invité à la cérémonie officielle organisée par le Vatican pour fêter les Accords du Latran régissant les rapports entre le Vatican et l'Italie, le président du Conseil a offert un cadeau d’anniversaire empoisonné à l’Eglise: la fin de l’exemption de la taxe sur la propriété sur de ses biens immobiliers, à l'exception des lieux de culte.

Clouée au pilori de l’opinion publique par les Italiens en colère qui lui demandaient de participer à l’effort collectif en cette période de disette financière, l’Eglise défend son bien bec et ongle. Et jure, qu’au final, l’impôt rapportera des cacahuètes. C’est du moins la thèse défendue par "Avvenire", le journal de la Conférence épiscopale italienne (CEI), qui évalue à une centaine de millions d’euros le montant que devra désormais payer l'Eglise à l'Etat italien.

Erreur rétorque l' Anci, l’Association nationale des municipalités italiennes, pour qui la note annuelle serait de 700 millions à un milliard d’euros. L’Église serait propriétaire d’au moins 100 000 édifices, dont 9 000 écoles, 26 000 structures ecclésiastiques et près de 5 000 structures de santé (dispensaires, cliniques, hôpitaux, maisons de repos), selon l'Anci.

>>> Retrouvez l'article de notre correspondante sur le patrimoine de l'Eglise italienne:
"Les milliards du Vatican intéressent l'Italie ruinée"

Pour sa part, l’association de recherche et de développement social Ares évalue l’ardoise à 2,2 milliards d’euros par an. Les services fiscaux évoquent un montant similaire.

Mais c’est justement cette bataille sur les chiffres qui va poser un sérieux problème aux inspecteurs du fisc italien. D’autant que leur marge de manœuvre pour récupérer leur dû, est faible.

La solidarité a ses limites

Dans la pratique, le fisc pourrait expédier ses agents sur le terrain comme il l'a fait récemment dans la très peu prolétaire station de ski, Cortina d’Ampezzo.

Seules les rares églises qui profitent du statut d’extraterritorialité pourront échapper à cette traque. Mais on imagine mal le gouvernement très catholique de Mario Monti en train de lâcher ses inspecteurs dans les propriétés de l’Eglise pour obliger la curie à passer sous les fourches caudines du fisc.

Le plus simple sera de réunir les représentants de l’Eglise et ceux de l'administration fiscale autour d’une table pour dresser la liste des immeubles et faire le compte de l’obole annuelle que devra verser l'Eglise. En tenant compte des limites fixées par l’amendement qui prévoit l’exemption pour les lieux de culte, les oratoires, les cantines pour les pauvres…

Prise de court, l’Eglise italienne est dans l'embarras, ne voulant pas apparaitre comme avare de ses deniers et non solidaire d'un Etat italien aujourd'hui désargenté mais qui l'a longtemps comblé de ses bonnes grâces en fermant pudiquement les yeux sur sa fortune.

Nous étudierons le tout avec attention et un sens de la responsabilité aigue"

a expliqué le cardinal Bagnasco président de la conférence épiscopale italienne. Tout en ajoutant "qu’il faut tenir compte de la valeur sociale des institutions no profit". L’avertissement est clair : l’Eglise ne se laissera pas facilement dépouiller.

Mis au pied du mur par Bruxelles

Reste que l’Eglise italienne a, comme le fisc, une très faible marge de manœuvre car le gouvernement Monti ne peut pas reculer. Saisie en octobre 2010 par le parti radical italien, l’Union européenne menace la péninsule de lui infliger un carton rouge.

Selon Bruxelles, l’exemption accordée à l’Eglise italienne en matière d’impôt foncier communal constitue une aide indirecte de l’Etat susceptible d'être lourdement sanctionnée. Verdict en mai prochain avec à la clef, une amende salée pour la l'Italie et l’obligation pour les mairies de récupérer les arriérés auprès de l’Eglise en remontant jusqu’en 2005.

Mario Monti, ex-Commissaire européen à la Concurrence savait que la seule façon d'éviter les foudres bruxelloises était de prendre les devants. La procédure devrait ainsi être interrompue. Après avoir annoncé l'imposition des biens de l'Eglise, il a demandé dés mercredi soir à l'actuel Commissaire chargé de la concurrence, Joaquin Almunia, de suspendre cette procédure. 




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