Paupérisation, inégalités, chômage : tous les voyants de l'exclusion sont au rouge en Espagne. Le pays affiche l'un des bilans sociaux les plus sombres d'Europe.
La pauvreté progresse en Espagne, l’exclusion délite sa société, et les indicateurs la place déjà à la traine de l’Europe. La série de publications rendues publiques cette semaine par l’ONG Caritas et la Fondation FOESSA sont venues plaquer sur les chiffres de la crise espagnole les sombres réalités sociales qui en résultent. Le secrétaire général de Caritas, Sebastián Mora, dresse le portrait d’un pays touché de pleine fouet par "une pauvreté plus étendue, plus intense, et plus chronique", frappant "une société qui tourne toujours un peu plus à deux vitesses".
Nous ne parlons plus de situations de pauvreté passagères, mais d’années passées sous le seuil de pauvreté, y compris pour des gens qui ont un emploi et continuent comme 'travailleurs pauvres'."
Aujourd’hui, l’Espagne doit encaisser un niveau de pauvreté parmi les plus élevés de l’UE27 : 21,8%, selon cette étude, soit plus d’un Espagnol sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté. Un chiffre semblable aux deux pays dont les populations sont les plus démunies de l’UE, la Roumanie (21,1%) et la Lettonie (21,3%) [Eurostat]. Juste au dessus du fatidique "seuil" de pauvreté, le "risque" de pauvreté (autre indice de l’exclusion) concerne, cette fois, quelque 11,7 millions de personnes en Espagne: un quart de la population (25,5%).
Et la courbe descendante est dangereusement régulière. Les Espagnols ont ainsi perdu 4% de revenu entre 2007 et 2010. La société espagnole se paupérise et se polarise. Sur la même période, l’écart de revenu entre les 20% les plus riches et les 20% les plus pauvres a progressé en Espagne comme nulle part ailleurs en Europe.
Tout en bas de l’échelle, 3,3% des foyers ne recevaient, à la fin 2011, aucun revenu : ni salaire, ni allocation chômage, ni prestation sociale. 580.000 foyer, c’est une augmentation de 34% par rapport à l’avant crise économique.
Les disparités entre les régions se creusent également. A titre d’exemple, l’étude cite celui, édifiant, de deux communautés autonomes espagnoles, de Navarre (Nord) et d’Estrémadure (Sud Ouest) : en 2010, la première affiche un niveau de pauvreté de 7,3% quand la seconde pointe à 38,2%.
Et l’étude de rappeler les tristes records nationaux : le taux de chômage le plus élevé d’Europe en 2011 (23%), surtout chez les jeunes (plus de 48%), une contraction du PIB de 1% prévue en 2012…
Depuis le 23 février, Madrid reçoit d’ailleurs la visite des fonctionnaires de la Commission européenne ont été détachés à Madrid. Ils sont chargés de l’aider à réorienter les fonds structurels vers l’emploi des jeunes, l’urgence nationale.
L’Espagne peut en effet compter sur 10 milliards d’euros qu'elle n'a pas dépensés, émanant de l’UE (FEDER, FSE, fonds de cohésion), et que la Commission aimerait voir sagement employés.