Les Urgences des grands hôpitaux romains sont une vraie cour des miracles. Les malades peuvent attendre des jours avant d'être soignés s'ils ne sont pas décédés avant. Le gouvernement promet de remettre de l'ordre, sans trop savoir comment, faute de moyens.
Des médecins au bord de la crise de nerf, des malades soignés à même le sol, d’autres entassés dans des cagibis par manque de place. Une femme plongée dans le coma attachée sur une civière reléguée au fond d’un couloir pendant quatre jours. Bienvenue dans les Urgences des hôpitaux romains !
Le nouveau scandale qui frappe de plein fouet la Santé italienne a éclaté avec la publication de photographies prises dans les services des urgences d’un établissement romain important: le San Camillo. Des images faisant état d’une situation extrêmement dégradée avec des malades placés sous perfusion et entassés pendant plusieurs jours dans un couloir par manque de place dans les autres services.
Tandis que le parquet de Rome ouvrait une enquête, une deuxième affaire était versée au dossier. Cette fois encore, le scandale concerne un grand hôpital, la polyclinique universitaire Umberto I. Une femme plongée dans le coma, a été attachée pendant quatre jours – sans avoir été alimentée par perfusion – sur une civière oubliée dans un couloir des Urgences.
Des gynécologues deviennent orthopédistes
Après avoir relevé de leurs fonctions deux dirigeants de l’hôpital Umberto I et le chef du département des urgences du San Camillo, le ministre de la Santé, Renato Balduzzi, a annoncé la création d’une force de frappe.
"Cette équipe sera composée de médecins, managers et juristes spécialisés. Il ne s’agit pas seulement de dresser un tableau de la situation dramatique et de mettre les coupables à l’index. L’objectif est aussi de trouver des solutions pour remettre le système en ordre" , a promis le ministre.
Mais pour remettre de l’ordre dans les 500 Urgences hospitalières, il faut de l'argent. Or, le gouvernement de technocrates de Mario Monti n'en a pas, l’opération de redressement des comptes publics limitant les dépenses de tous les ministères, y compris celui de la Santé, au strict minimum.
La situation dramatique des hôpitaux italiens est le résultat des coupes claires effectuées par le gouvernement Berlusconi en 2004 et de l’incompétence des régions qui ont plombé leurs budgets et se retrouvent aujourd’hui dans une situation de redressement"
analyse Adolfo Elio Cardinale sous-secrétaire d’Etat à la Santé.
"Redressement", autrement dit du "cost killing" généralisé pour remettre les finances régionales sur les rails.
C’est ce qui se passe notamment dans le Latium, la région de Rome, où le secteur public de la Santé est endetté à hauteur de 1,4 milliards d’euros pour 2011.
Après avoir réduit le nombre de lits disponibles, la direction s’attaque maintenant aux ressources humaines. En temps normal et selon la loi, le service des Urgences est assuré par six chirurgiens et huit généralistes. La direction de notre hôpital veut réduire ce nombre et laisser seulement des médecins qui feraient tout. Un gynécologue, par exemple, devrait aussi jouer les orthopédistes. Lorsque nous avons répondu que nous ne sommes pas spécialisés en tout, la direction nous a dit de ne pas nous inquiéter, qu’elle va tout arranger. C’est absurde!"
s'énerve un urgentiste.
Plaie béante
Reste que les scandales dans la santé romaine ont mis le doigt sur une plaie béante qui concerne l’ensemble du système sanitaire italien.
Chaque année, quelques 28.000 plaintes sont déposées pour erreurs médicales et disfonctionnement des structures publiques. Et selon une enquête effectuée par une commission parlementaire, 25 décès dont ceux de quatre enfants en bas âge, ont été enregistrés durant les deux dernières années dans les services d’urgences.
Toujours en raison du disfonctionnement des structures. A Catane en Sicile, une femme de vingt six ans est morte la semaine dernière dans des douleurs atroces. Le service de réanimation affichait complet.