Le président souhaite l'étiquetage des viandes en fonction de la méthode d'abattage. Il y a neuf mois, le gouvernement français expliquait très précisément pourquoi il était contre cet étiquetage proposé par le Parlement européen.
Il y a parfois des rapprochements étranges. En meeting à Bordeaux samedi dernier, le président Nicolas Sarkozy a pris une position 'tranchée' dans le débat sur la viande résultant d'abattages rituels. Une viande dite "halal" dans le cas d'abattages effectués selon les rites musulman ou bien "casher" dans le cas de rite juif.
Reconnaissons à chacun le droit de savoir ce qu'il mange, halal ou non. Je souhaite donc l'étiquetage des viandes en fonction de la méthode d'abattage.
Cette déclaration pourrait faire écho à des demandes anciennes de la communauté musulmane exigeant la mise en place d'un vrai label "halal France". Car de nombreux Musulmans se sont émus ces dernières années du fait que, selon des experts du ministère de l'agriculture, "90 à 95% de la viande vendue en France et réputée halal ne l'est en fait pas!". En réalité, dans le buzz médiatique sur la soit-disante omniprésence de la viande halal lancé à la mi-février par le Front national, la préoccupation est toute autre, puisqu'il s'agit d'éviter aux populations non musulmanes d'ingérer de la viande halal à leur insu.
La position de Nicolas Sarkozy est donc empreinte d'une certaine logique, même si un très grand nombre de personnes, y compris dans les communautés religieuses concernées, s'y opposent en raison du risque de stigmatisation de certaines pratiques. Le seul problème est que cette position est diamétralement contraire à celle exprimée par le gouvernement français il y a neuf mois.
En l'occurrence, il s'agit d'une réponse écrite à une question du député Nicolas Dupont-Aignan figurant au Journal Officiel du 24 mai 2011. Ce dernier avait demandé la raison pour laquelle le gouvernement français n'était pas favorable à la mise en place d'une mention obligatoire de la méthode d'abattage.
Voici le texte de la réponse du gouvernement:
Le Parlement européen a en effet, dans sa résolution législative du 16 juin 2010 (…) introduit en première lecture un amendement visant à la mise en place d'une mention obligatoire de l'abattage sans étourdissement sur la viande issue d'animaux abattus selon les rites musulman ou israélite. Le Gouvernement français n'y est pas favorable. En effet, il considère que cette approche revient à porter une attention particulière sur un type de viande en fonction du mode d'abattage, alors même que les viandes concernées n'ont pas de différence organoleptique, sanitaire ou de mode de production. Par ailleurs, elle serait susceptible de stigmatiser, aux yeux du consommateur, des pratiques d'abattage ayant des fondements relatifs à la liberté religieuse. Enfin, un tel étiquetage différentiel serait de nature à déstabiliser les marchés de la viande de manière durable.
La question est maintenant de savoir pourquoi, ce qui, il y a neuf mois, "était susceptible de stigmatiser des pratiques" ne l'est désormais plus. Ou bien le contexte a complètement changé et il n'y a plus de risque de stigmatisation. Ou bien l'objectif est désormais de stigmatiser…