La vague de suicides de petits patrons italiens, mais aussi de salariés licenciés et de retraités qui ont vu leurs retraites fondre, n'est pas prête de s'arrêter en Italie. Le gouvernement annonce une récession beaucoup plus forte que prévue. La dépression est générale.
Accablés par les dettes, étranglés par les banques, des centaines de petits entrepreneurs se sont donnés la mort depuis le début de la crise. Selon le centre d’études de la CGIA, un syndicat de PME et d’artisans, ils seraient 23 depuis le 1er janvier dernier. La semaine dernière, un petit patron s’est tiré une balle en pleine poitrine à Rome après avoir fait faillite. Dans le nord de la péninsule, ancien fleuron de la petite industrie transalpine avant la crise, deux autres entrepreneurs ont également mis fin à leurs jours.
Des salariés licenciés et des retraités se sont aussi suicidés. Au tout début du mois, un ouvrier d’origine marocaine a essayé de s’immoler par le feu devant la mairie de Vérone car il ne touchait plus son salaire depuis 4 mois. En Sicile, à Gela, une femme âgée de 78 ans, s’est jetée par la fenêtre. Sa pension mensuelle de 800 euros venait d’être réduite de 200 euros par mois par la Caisse des retraites italiennes, l’Inps.
Situation insoutenable
Les banques ne prêtent plus d’argent, l’Etat accumule les défauts de paiement, mais en même temps, le gouvernement de Mario Monti traque les spécialistes de la voltige fiscale pour faire rentrer de l’argent dans les caisses publiques. L’ancien commissaire européen a, certes, hérité d’une situation extrêmement difficile, mais sa politique d’austérité assaisonnée de multiples coupes budgétaires a plombé la croissance. Résultat, la déprime est générale.
Ce matin, le gouvernement de technocrates a revu ses prévisions à la baisse. Mario Monti a annoncé qu’il table désormais sur une contraction du PIB de 1,2% d’ici la fin de l’année. En décembre dernier, le Président du Conseil prévoyait une baisse de seulement 0,4%. L’exécutif a aussi retouché ses estimations sur le retour à l’équilibre budgétaire et s’attend désormais à un déficit de 0,5% en 2013 et non plus 0,1%.
Tout cela va rendre la situation un peu plus insoutenable pour de nombreux petits patrons qui sont déjà contraints de licencier et de mettre la clef sous le paillasson alors que le chômage a atteint le chiffre record des 9,3% en février.
1.725 suicides en 2011
Nous nous battons tous les jours pour éviter le destin dramatique de la Grèce, cette crise impose un prix très élevé aux familles, aux jeunes, aux travailleurs, aux entreprises et parfois ces expériences s'achèvent dans le désespoir"
a déclaré Mario Monti. Il a ajouté que
Les 1.725 suicides sont les effets dramatiques de la crise".
Ce chiffre, est celui publié hier par l'Instat, [L'institut national de la statistique, ndlr] du nombre de personnes qui se sont suicidées en Italie l'année dernière. Mais la crise n'est pas, loin de là, seule responsable de ces centaines de morts.
Une façon pour le moins surprenante de répondre aux accusations d'Antonio Di Pietro. L’ancien juge vedette de l’opération "Mains propres" qui a crée le parti "L’Italie des Valeurs" avait, en effet, déclaré, il y a une dizaine de jours, que Mario Monti avait les suicides des entrepreneurs sur la conscience en raison de sa politique d’austérité.
Manifestation à la mémoire des suicidés
Si les associations de petits patrons et les syndicats ne vont pas aussi loin que le célèbre juge, ils accusent l’Etat.
Les entrepreneurs et les salariés se sentent seuls, isolés, incompris face à un système qui refuse de les aider. D’où la multiplication des suicides"
a déclaré Valter Gianmaria, président de Confesercenti, la fédération des PME qui regroupe 353.000 entreprises. Pour obliger le gouvernement à faire pression sur les banques pour qu’elles prêtent, à alléger la pression fiscale et à inciter l’administration à régler ses factures, Confesercenti et une vingtaine d’autres associations et syndicats manifestent ce soir près du parlement. Une manifestation silencieuse à la mémoire des entrepreneurs, salariés et retraités qui se sont suicidés.