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La « dévaluation interne », sujet de discorde entre Hollande et Merkel

mardi, 15 mai, 2012 - 16:06

Faute d'une impossible dévaluation monétaire, la "dévaluation interne", solution allemande pour relancer les économies des pays les plus malades de la zone euro, est incompatible avec les mesures en faveur de la croissance européenne défendues par François Hollande. 

Les économistes allemands ont inventé un nouveau concept économique: la "dévaluation interne". Faute de pouvoir dévaluer l'euro, cette "dévaluation interne" dans un pays des salaires et des prix doit lui permettre de relancer sa croissance. Il fallait y penser et c'est ce qu'à notamment fait Jörg Asmussen, ex-conseiller pour les affaires économiques d’Angela Merkel, maintenant membre du Conseil de la banque centrale européenne. Sa démonstration est simple :

La rigueur budgétaire ne suffit pas, parce qu'il y a plusieurs pays qui ont un problème de compétitivité accumulé depuis plus de 10 ans. Nous avons besoin d'une sorte de dévaluation interne, à commencer par les salaires."

Cette dévaluation des rémunérations a ainsi, à la demande de Bruxelles, été mise en œuvre. De 2010 et 2012, les salaires ont, en moyenne, baissé de plus de 20% en Grèce, de plus de 10% au Portugal et en Irlande. En Espagne ce recul est d'environ 6%. 

Pas de miracle en Irlande

Le coût du travail est la raison la plus souvent mise en avant par les experts pour expliquer le "miracle allemand" durant la dernière décennie. Les "réformes Hartz" du Chancelier social-démocrate Gerhard Schröder ont permis de stabiliser les salaires. Exemple qui devenait, dés lors, le modèle à suivre.

En Grèce, Irlande, Portugal, Espagne, Italie et même en France, les prix à la consommation étaient trop élevés par rapport à ceux des pays du Nord. Pour corriger cette différence qui engendre des pertes d'emplois, Berlin ne voit que cette solution: baisser les salaires. Cela engendre, dans un second temps, une baisse des prix et une stabilisation de ce pouvoir d'achat. 

Mais le miracle promis se fait attendre. L'Irlande, premier pays de la zone euro à avoir pratiqué à la lettre cette "dévaluation interne" a toujours bien du mal à retrouver un semblant de croissance durable.

Une solution pour Bruxelles, mais pas pour le G-20

Et Bruxelles estime que l'Espagne, le Portugal et la Grèce prévoit que les réductions des salaires prendra encore plus de temps qu'en Irlande avant d'engendrer des "résultats positifs".

"Il y a déjà eu un rééquilibrage significatif dans l'UE, qui se fait sentir dans les balances commerciales. L'ajustement devrait se poursuivre, quoiqu’à des taux plus modérés, même au-delà de 2013"

selon le rapport de la Commission.

En fait, malgré l'optimisme affiché par l'exécutif européen, il est évident que cette solution de réduction des salaires, des prix et les coupes budgétaires afin de regagner la confiance sur les marchés peine à être efficace. Le G-20 et le FMI ont blâmé l'Allemagne précisément du fait de ce manque de résultats.

Autre solution : combler le fossé en matière de compétitivité entre l'Allemagne et ses voisins européens en augmentant les salaires outre-Rhin. Mais cela va à l'encontre du dogmatisme anti-inflationniste de Berlin.

Ce dont l'Europe a vraiment besoin est une augmentation des salaires en Allemagne"

confirme pourtant Guntram Wolf, directeur adjoint du think tank Bruegel.

François Hollande ne dit rien d'autre en voulant un volet croissance au pacte de stabilité malgré les risques de reprise de l'inflation. Il aura cependant bien du mal à convaincre Angela Merkel.

La Chancelière s'est néanmoins félicitée des augmentations de 1,5% des salaires après des années de quasi-stagnation. Sous-entendu, cette reprise des salaires en Allemagne prouve qu'il n'est pas nécessaire d'augmenter le poids de la dette pour accélérer maintenant une hausse des salaires qui serait néfaste à la compétitivité germanique.

Seule certitude, le dialogue au sein du  nouveau couple franco-allemand va être, pour le moins, difficile.
 




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