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L’anonymat du don de sperme et d’ovocytes divise les Européens

lundi, 18 juin, 2012 - 15:28

Le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande d’une femme née d’un don de sperme qui souhaitait accéder à certaines informations sur son donneur. La France s'accroche à l'anonymat du donneur de gamètes, mais chez nos voisins européens, certains ont franchi le pas.

En France, le débat sur l’anonymat du don de gamètes (sperme, ovocytes) lancé il y a deux ans par l’ancienne ministre de la santé Roselyne Bachelot, refait surface avec la demande d'une femme née d'un don de gamètes d'accéder à certaines informations sur son donneur.

En 2010, la ministre avait présenté au parlement un projet de loi relatif à la bioéthique. Celui-ci concernait uniquement les dons futurs. Il prévoyait la possibilité pour les enfants nés d’un don de gamètes d’accéder à des informations concernant leur donneur, et, si ce dernier donnait son consentement, à son identité.

Le projet ayant été rejeté, la loi française sur la bioéthique de 1994 est restée inchangée. Elle prévoit donc l’anonymat, et n’autorise en aucun cas de révéler à l'enfant ou à ses parents des informations concernant le donneur. Toutefois, les médecins peuvent avoir accès à certaines informations utiles à des fins thérapeutiques concernant l'enfant. Cette position n’est pas rare en Europe, mais certains pays ont toutefois opté pour des régimes plus favorables au droit de l’enfant de connaître ses origines.

La Suède lève l’anonymat dès 1984

En Europe, la Suède a été le premier pays à interdire l'anonymat du donneur, en 1984. 

Depuis cette date, les personnes nées d'un don de gamètes peuvent demander à connaître l’identité de leur donneur lorsqu'elles atteignent la majorité. Un lien de filiation est alors établi entre l'enfant et son donneur. Cependant, rien n'oblige les parents à révéler à leur enfant la manière dont il a été conçu.

Malgré l'existence de cette législation, en 2011 un seul enfant ayant atteint la majorité aurait adressé une telle demande. Une donnée qui laisse dubitatif quant à l’efficacité de ce système censé permettre aux enfants de jouir de leur droit à connaître leurs origines.

D’autres pays comme les Pays-Bas, la Norvège ou le Royaume-Uni ont, depuis, suivi l’exemple de la Suède et levé l’anonymat. D'autre encrore se sont contenté de l'assouplir.

En Espagne, un anonymat aménagé

La loi espagnole prévoit l’anonymat du donneur. Toutefois, les enfants nés d’un don de gamètes ainsi que les receveurs peuvent avoir accès à certaines "informations générales" qui ne révèlent pas l’identité du donneur. Lorsqu'un enfant est en danger de mort et que la révélation de l'identité du donneur peut le sauver, l'anonymat peut cependant être levé. Pour autant, aucun lien de filiation ne sera établi entre l'enfant et son parent biologique.

Le projet de révision de loi sur la bioéthique de Roselyne Bachelot se rapprochait sensiblement de cette position hybride.

En Italie, à chacun ses gamètes !

Si la législation française peut sembler stricte, l’Italie va encore plus loin  en interdisant purement et simplement le don de gamètes, depuis une loi de 2004 sur la procréation médicalement assistée.

Une position rare dans le paysage européen, puisque seules la Lituanie et la Turquie la partagent.

Pour le PS, pas de changement à l’horizon

En France, les revendications des enfants nés d'un don de gamètes désirant en savoir plus sur leurs origines sont de plus en plus nombreuses. Mais en 2010, lors du vote du projet de loi de Roselyne Bachelot, les députés PS avaient très majoritairement rejeté la disposition visant à lever partiellement l’anonymat des donneurs de gamètes. La Cour Européenne des Droits de l’Homme avait pourtant rendu un arrêt en 2003(1) reconnaissant à chacun le droit de connaître ses origines.

Ce refus du Parti Socialiste laisse peu d’espoir pour les cinq prochaines années aux personnes réclamant la levée de l'anonymat.


(1)Arrêt Odièvre c/ France, CEDH, 13 février 2003, n° 42326/98.
 




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