Les groupes d’extrême-droite essaient souvent de se faire passer pour des clients ordinaires. Les autorités allemandes viennent de rédiger une brochure pour aider les hôteliers et les restaurateurs à reconnaître ces fauteurs de troubles.
Imaginez que vous êtes propriétaire d’une charmante auberge dans une petite bourgade d’Allemagne de l’Est et qu’un groupe réserve le gite et le couvert pour cent personnes au nom d’une association vinicole. Une aubaine ? Pas vraiment.
En janvier dernier, ce n’est pas une centaine de vignerons en séminaire mais une horde de néo-nazis qui a envahi l’Hotel Seegarten à Grünheide près de Berlin, à la plus grande surprise de l’hôtelier. Ces militants d’extrême-droite, membres du NPD (Nationalistische Partei Deutschland), n’en étaient pas à leur premier coup du genre.
Pour que ce genre d’événements cesse de se répéter, Olaf Lücke de l’Associations des Hôteliers vient de présenter une brochure à la chancellerie d'État du Brandebourg afin de démasquer les néo-nazis: Comment ne pas se faire avoir par les Néo-nazis : un guide destiné à l’industrie hôtelière et à la restauration.
Personne n’est obligé de servir des militants d’extrême droite"
a rappelé Martina Münch, Ministre de l’Education du Brandebourg, lors de la présentation officielle du document.
D’après Olaf Lücke, tous les restaurateurs et les hôteliers de la région vont recevoir ce guide.
Ne pas de fier au nom de la réservation
Si le crâne rasé et les rangers sont toujours connotés comme des signes d’appartenance à des mouvements d’extrême droite, les militants néo-nazis utilisent bien d’autres codes. La brochure a donc pour mission d’aider les restaurateurs à démasquer les fauteurs de troubles.
Les néo-nazis n’ont pas pour habitude de frapper à une porte en disant ‘Heil Hitler ! Mes amis, le Führer, le Reich et moi, souhaiterions réserver une chambre non-fumeur s’il vous plait' "
ironise Der Spiegel.
D'ailleurs, les noms des organisations peuvent être trompeurs. Prenons par exemple le cas de la Société pour l’Histoire et la Culture. Personne ne se doute que se cache un groupuscule d’extrême-droite sous cette dénomination prestigieuse.
Certains signes ne trompent pas
Premier indice ? Les symboles néo-nazis : le triangle de Gau, par exemple, utilisé par les nazis dans les camps de concentrations et interdits en Allemagne depuis 2002. Moins connus, le triskel, insigne de la 27eme division SS, formée principalement de volontaires ou le soleil noir, qui comprend trois svastika dans son motif.
La brochure renseigne aussi les restaurateurs et les hôteliers sur le calendrier des "vacances de la communauté d’extrême-droite". Oui, les néo-nazis ont leur propre calendrier, avec certaines dates clés telles que le 18 janvier, date de la fondation du Reich allemand en 1871. Ou bien le 25 février, date du bombardement de la ville de Cottbus par les Alliés. Ne pas oublier le 24 septembre, "l’anniversaire de la mort de Ian Stuart Donaldson, le fondateur du label néo-nazi Blood & Honor" et par la même occasion, chanteur du groupe skinhead Skrewdriver.
Est-ce bien légal ?
Der Spiegel rapporte qu’en mars dernier, l’ancien leader du NPD Udo Voigt, a vu sa réservation annulée avant même de pouvoir passer la porte d’un hôtel thermal de Brandebourg.
La Cour Fédérale de Justice explique que les propriétaires d'établissements privés ont tout à fait le droit de refuser un client pour ses opinions politiques. Néanmoins, une fois que la réservation a été validée par l’hôtel, le propriétaire ne peut pas faire machine arrière, sauf en cas de nuisance ou de dégradation.
Cela demande un vrai courage civique. Il faut prendre position"
rappelle la ministre de l'Education du Brandebourg.
Le guide fournit une aide juridique aux hôteliers en matière de clauses d’annulations. Pourtant "cela ne changera pas grande chose. Les hôteliers resteront livrés à eux-mêmes avec leurs convictions comme seule arme pour se défendre" note le quotidien allemand.
En effet, le NPD est un parti légal en Allemagne et plusieurs de ses membres siègent dans certains parlements régionaux.
Lien vers l'article de Der Spiegel: State Teaches Hoteliers How to Identify Neo-Nazis