Des manifestations ont lieu aujourd’hui dans 80 grandes villes d'Espagne avec heurts particulièrement violents à Barcelone, contre les nouvelles coupes budgétaires annoncées par le gouvernement Rajoy. Les Espagnols, étranglés par la crise et un taux de chômage de près de 25%, ne comptent pas s’arrêter là.
De Bilbao à Séville, de Barcelone à La Corogne, la colère des Espagnols est montée d’un cran dès jeudi soir. Des manifestations se sont poursuivies aujourd’hui dans 80 villes d'Espagne contre les nouvelles mesures d’austérité adoptées hier par les députés espagnols. A travers le pays on dénombrait en fin d'après-midi, 176 interpellations et plus d'une centaine de blessés.
Hier, les députés espagnols ont avalisé les coupes budgétaires de 65 milliards d’euros décidées par le gouvernement. Tous les partis, hormis le Parti Populaire du Premier ministre Rajoy, ont voté contre.
Mais pour le quotidien italien La Reppublica, même la majorité du gouvernement Rajoy pourrait être divisée :
L'écho de la déclaration "choc" de Cristobal Montoro résonne encore : 'nous n'avons plus d'argent'. Montoro est un spécialiste de ce type de d'intervention, qui n'ont pas toujours l'effet escompté. Cette fois-ci, son alarmisme pourrait avoir un but de politique interne : resserrer les rangs au sein de la majorité conservatrice sur les mesures dramatiques d'austérité dans un climat de plus en plus tendu."
Cristobal Montoro, le ministre espagnol du budget, a justifié les lourdes mesures d'austérité en déclarant que les caisses de l'Etat étaient désespérément vides.
Une manifestation impressionnante
La réaction des Espagnols n’a pas tardé à se faire entendre. D’après le journal El País, ils étaient des centaines de milliers, dont 100 000 rien qu'à Madrid, dans les rues hier à défiler dans les plus grandes villes du pays, répondant ainsi à l'appel des plus grands syndicats espagnols.
Jeudi soir, pompiers casqués en uniformes, policiers, enseignants, professionnels de la santé, de la justice… tous sont descendus dans la rue à l'appel des syndicats mais aussi de collectifs de citoyens pour dire 'non' à la hausse de la TVA, 'non' à la baisse des indemnités chômage à partir du 6e mois, 'non' à la suppression de la prime de Noël pour les fonctionnaires, soit l'équivalent d'un mois de salaire… Hier soir à travers toute l'Espagne, la fonction publique était sur le pied de guerre"
explique le Figaro.
Une fonction publique étranglée par la crise, "qui ne veut plus payer les pots cassés", rappelle le quotidien français. "Des efforts, des sacrifices… Les fonctionnaires, au contraire, sont las d'en faire".
Plus tôt dans la journée, plusieurs fonctionnaires en colère ont bloqué les artères principales de Madrid, crevant les pneus de douzaines de véhicules anti-émeutes pour protester contre les nouvelles mesures d’austérité, la récession et un taux de chômage de 24%"
note, pour sa part, le quotidien britannique The Guardian.
La droite agit, la gauche agite ?
A l'inverse d'El País, le journal espagnol de droite La Razón minimise la mobilisation et blâme la gauche.
La Gauche agite la rue alors que les marchés dénoncent l'Espagne"
titre le quotidien.
Environ 40 000 personnes, selon les chiffres du ministère de l'intérieur – 10 000 de moins que lors de la manifestation contre la réforme du travail – ont participé à la manifestation contre les mesures d'austérité organisée par les syndicats Comisiones Obreras (Commissions Ouvrières) et UGT (Unión General de Trabajadores)".
L’étau se ressert
Pour le gouvernement espagnol, l’étau se ressert depuis jeudi, "malgré l’annonce d’un nouveau plan de sauvetage de 100 milliards d’euros des banques espagnoles auquel les Allemands vont participer" souligne The New York Times.
Les accords récents de la BCE et des pays membres de la zone euro ont réduit les taux d’emprunt pour les pays réputés sûrs pour les investisseurs, tels que l’Allemagne ou les Pays-Bas, puis, dans une moindre mesure, la France et la Belgique."
Mais pour l’Espagne, c’est une autre histoire. Le pays n’a jamais emprunté à des taux aussi élevés, preuve, si besoin l'est encore, que la crise est loin d’être terminée au sud des Pyrénées.
Même le ministre allemand des Finances, qui a approuvé l'aide de 100 milliards d'euros, estime que ce n'est pas suffisant. Selon lui, l'Espagne aurait besoin d'au moins 300 milliards d'euros d'aide d'ici à fin 2014. Les prochains mois s'annoncent terriblement difficiles pour les Espagnols.