Syndicate content

Accord franco-allemand sur le contrôle des banques

jeudi, 18 octobre, 2012 - 15:42

Lors du sommet européen de Bruxelles, Angela Merkel et François Hollande ont finalement entériné la mise sous contrôle au niveau européen des banques de la zone euro. Mais cela se fera progressivement. Sur les autres dossiers, notamment l'aide à l'Espagne, les divergences franco-allemandes restent profondes.

Personne ne s'attendait à  un accord sur les décisions essentielles qu'il serait pourtant urgent d'adopter pour tenter de sortir l'Europe de la crise économique et financière lors de ce Conseil européen à Bruxelles. Herman Van Rompuy, président de ce conclave réunissant les dirigeants européens, estimait avant la réunion qu'il s'agissait d'un simple "sommet d'étape". Figure de style habituelle pour expliquer qu'il ne se passera probablement rien à Bruxelles. Et effectivement il ne s'est rien passé de très concret pour les citoyens européens confrontés à la crise.

Pourtant, ce matin, tard dans la nuit, Angela Merkel et François Hollande sont arrivés, à l'issue d'un tête à tête, à un accord de principe sur la supervision au niveau européen des banques des pays de la zone euro.

Bien des détails restent encore à préciser. S'agit-il vraiment, comme le souhaite Paris de toutes les banques ou simplement des plus grandes banques? Coté français on affirme que les 6000 établissements bancaires de la zone euro sont concernés. Cela semble être le cas, et c'est indéniablement une concession majeure de la part d'Angela Merkel qui ne souhaitait pas que Bruxelles ait un droit de regard sur ses caisses régionales dont certaines sont dans une situation financière fragile. 

Autre question majeure: le calendrier de mise en place de contrôle par la Banque centrale européenne. Et là la presse allemande n'a aucun doute:  Der Spiegel estime que la chancelière "est demeurée ferme et a imposé son calendrier", C'était l'essentiel pour elle: "Le calcul de Merkel, c'est que l'aide bancaire du MES ne sera lancé qu'après les élections fédérales".

En fait, la supervision des banques par la BCE se fera progressivement l'année prochaine. D'abord pour les banques ayant bénéficié d'aides publiques, suivies des banques "trop grosses pour faire faillite" et, en dernier des banques de taille plus modeste. Au 1er janvier 2014, l'ensemble des établisements de la zone euro devraient ainsi être sous la surveillance de la BCE, appuyée par les banques centrales nationales.

"Eurobond", "eurobills", "fonds de rédemption", c'est "nein"

Sur les autres dossiers, c'est le point mort. Contrepartie officieux de ce compromis sur les banques, l'Espagne Madrid doit tirer un trait sur la recapitalisation rapide européenne de ses propres établissements. Le chef du gouvernement italien, Mario Monti veut cependant encore croire qu'elle "aura lieu en 2013, mais quand, on ne le sait pas encore".

Ce n'est pas une surprise. François Hollande avait dressé la liste de ses divergences avec Angela Merkel à la veille de ce Conseil européen lors de son entretien accordé à six quotidiens européens.

Le président français insiste sur la nécessaire "mutualisation partielle des dettes à travers les eurobonds". Réponse de Berlin par la voix du ministre délégué allemand aux Affaires européennes, Michael Link:

Vous pouvez le tourner comme vous le voulez: qu’on appelle ça des 'eurobills', des 'fonds de rédemption de la dette' ou, comme auparavant, des 'eurobonds', ce type d’émission de dette commune ne pourra se faire avec notre gouvernement".

Le désaccord franco-allemand est également total sur les priorités et le calendrier pour renforcer l'Europe politique. Pour François Hollande, rien ne presse.

L'union politique, c'est pour après les élections européennes de 2014".

Pas question de remettre du sel sur une cicatrice à peine fermée au PS. Une intégration renforcée avec une redéfinition des pouvoirs des institutions européenne nécessiterait, comme hier, un referendum.

Or, "en 2005, nous avons essayé cette formule et elle n'a pas donné les résultats escomptés" se souvient le président français. Et d'ajouter: "Prenons nos décisions à 17, sans ceux qui ne veulent pas de l'euro. Pourquoi faudrait-il qu'ils viennent nous dire comment doit être dirigée la zone euro?".

Une position diamétralement inverse à celle de la Chancelière allemande pour laquelle l'intégration politique va de pair à une intégration économique avec des pouvoirs de contrôle des budgets nationaux au niveau européen.

Constat lucide mais sans espoir

Le ministre allemand des Finances vient ainsi de proposer de renforcer ce contrôle des budgets des Etats. "Nous devons faire un grand pas en avant en matière d’union budgétaire" affirme Wolfgang Schäuble. Il préconise de donner les pleins pouvoirs au commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, afin qu'il puisse rejeter un budget national "aussi bien lors de sa présentation qu’après son vote par le parlement du pays". Cette position maximaliste n'est toutefois pas celle de la chancelière allemande. Elles est "plus prudente" reconnait son ministre.

Si François Hollande souhaite se hâter avec lenteur sur la réforme institutionnelle, il est, à l'inverse, et avec raison, beaucoup plus pressé sur les dossiers brûlants de la Grèce et de l'Espagne. Il souhaite une solution "d'ici à la fin de l'année". Mais, cette fois, c'est Berlin qui traine des pieds en estimant, en substance, qu'il ne faut pas confondre vitesse et précipitation sous peine de prendre les pieds dans le tapis du fait de la complexité de ces dossiers.

Complexité d'autant plus importante qu'Angela Merkel doit remettre son mandat de Chancelière en jeu en septembre 2013. Or ses électeurs sont très majoritairement hostiles à une aide aux "pays du Club med".

C'est le couple franco-allemand qui permet l'accélération, et donc qui peut aussi être un frein s'il n'est pas en phase"

soulignait avec lucidité François Hollande. 


Article initialement publié le 18/10/12 à 18h puis modifié avec les conclusions du sommet européen le 19/10/12 à 11h30




Pays