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Sans papiers: l’Europe régularise par vagues ou au fil de l’eau

lundi, 3 décembre, 2012 - 12:29

La France vient d'assouplir sa réglementation concernant la légalisation des immigrés illégaux. Mais des régularisations massives ou par vagues ne sont pas prévues. A la différence de ce qui s'est passé ailleurs en Europe, notamment au sud. 

Les sans papiers by Myeurop

Manuel Valls a présenté la semaine dernière en conseil des ministres, une circulaire modifiant les règles de régularisation des 350 000 à 500 000 étrangers en situation irrégulière en France. Il s'agit d'un assouplissement qui "n'a pas vocation à augmenter le nombre de régularisations", de l'ordre de 30 000 par an ces dernières années, affirme le ministre de l'Intérieur.

Ce qui signifie que ces régularisations vont continuer de se faire "cas par cas" et non sous forme de programmes ponctuels, limités dans le temps et plus ou moins ciblés, comme c'est en général le cas ailleurs en Europe.

Les nouvelles règles sont les suivantes:

• Pour pouvoir régulariser leur situation, les étrangers sans titre de séjour devront désormais pouvoir prouver qu'ils sont en France depuis au moins 5 ans et avoir un enfant scolarisé depuis trois ans.
• Par ailleurs, si les deux parents sont en situation irrégulière, ils pourront néanmoins faire une demande de régularisation, alors que, jusqu'à présent, il fallait au moins que l'un des deux parents soit dans une situation régulière.
• Autre évolution importante: une famille pourra bénéficier du regroupement familial en France après 18 mois de vie commune contre 5 ans auparavant.
• Les sans-papiers et célibataires qui travaillent au noir pourront demander une légalisation de leur situation en justifiant de 5 ans de présence en France et 8 mois de travail sur les 2 dernières années avec une promesse d'embauche, ou 3 ans de présence et 2 ans de travail, ou encore, 7 ans de présence et 8 mois de travail, mais, dans ce dernier cas, une promesse d'embauche ne sera pas nécessaire.

Le fait que ces régularisations nécessitent que l'employeur au noir d'un sans-papiers se dénonce limite considérablement la portée de la circulaire. Il n'y aura "aucune amnistie" précise le Ministère de l'Intérieur. Il faudra donc que l'entreprise accepte de payer un redressement fiscal sur les charges sociales impayées pour que son salarié officieux soit officialisé!

Une spécificité française: le cas par cas

La méthode française de "cas par cas" est donc très spécifique en Europe. Non pas que ces régularisations individuelles ne se pratiquent pas chez nos voisins. Mais la majeure part des régularisations s'y font dans le cadre de programme définis et limités dans le temps: il s'agit de régulariser, pendant une courte période, un nombre donné d'immigrés clandestins en précisant parfois les secteurs ou les nationalités concernées.

La France n'a procédé à des régularisations systématiques que deux fois: en 1981, au début du septennat de François Mitterrand et en 1997, après l'arrivée de Lionel Jospin à Matignon. Depuis, les régularisations de font au fil de l'eau à un rythme d'environ 30.000 annuelles.

Le sud légalise en masse

Cette année, il y a eu deux programmes de régularisation en Europe: en Pologne, pour répondre à 5.000 demandes, et surtout en Italie où la régularisation de 150.000 sans papiers a été examinée entre le 15 septembre et le 15 octobre dernier.

Mais pour se faire une idée des réalités de la régularisation en Europe, on dispose des chiffres du "migration policy institute" qui porte sur la décennie ayant précédé la crise, c'est à dire 1997-2007.

On voit ainsi que 1,2 million de clandestins ont été régularisés en Italie, 1 million en Espagne, 425.000 en Grèce, 250.000 au Portugal. Bref, tous les pays d'Europe du sud ont régularisé massivement. En proportion de leur population, L'Allemagne et la France viennent très loin derrière, avec 185.000 immigrés légalisés dans chaque pays.

Le Royaume-Uni, pays très restrictif

Quant au Royaume-Uni, il ne dépasse pas le chiffre de 40.000 sur cette période. Un faible chiffre qui pourrait surprendre venant d'un pays réputé très accueillant pour les réfugiés. En fait, le Royaume est surtout un pays très informel, où récemment encore la carte d'identité n'était pas obligatoire, les papiers comptant moins qu'ailleurs.

En outre, les critères britanniques pour être régularisé sont particulièrement sévères puisqu'il faut présenter un passeport valide, être indépendant économiquement et, surtout, avoir séjourné au moins dix ans dans le pays, et parfois 14 ans selon les périodes.

Durée minimum de séjour: brève en Italie et Espagne

Au regard des cinq ans de séjour exigés par la France, la norme est sévère. Mais l'Allemagne impose également des durées élevées de présence sur le territoire: de 6 à 8 ans selon le programme. La Belgique et la Pologne – respectivement 5 et 4 ans – ont des exigences comparables à celle de la France. En revanche, l'Espagne n'exige 2 à 3 ans de séjour. Quant à l'Italie, elle est très peu regardante sur la question du séjour puisque le programme 2012 de régularisation n'exige que 9 mois de présence et trois mois de travail à plein.

Situation difficile pour les chômeurs sans papiers

C'est sur la question du travail que la France apparait comme accomodante. La dernière circulaire n'impose que huit mois de travail sur les deux dernières années alors que des pays comme l'Allemagne ou le Royaume-uni exigent "l'indépendance économique", autrement dit des revenus suffisants.

En Espagne, il faut travailler depuis un an ou justifier l'existence d'un contrat ferme proposé. Quant à l'Italie, la demande de régularisation doit être faite par l'employeur, ce qui suppose d'être effectivement au travail.

Un nombre de sans papiers comparables

Les estimations concernant le nombre de sans papiers présents sur les territoire est, par définition, difficile à préciser. S'il l'on s'en tient à des ordres de grandeurs (fourchettes), on retient pour l'Allemagne une chiffre compris entre 500.000 à 1 million d'immigrés illégaux, de 500 à 800.000 pour le Royaume-Uni d'environ 500.000 pour l'Italie et 450.000 pour l'Espagne. Ce qui, en proportion de la population, fait de ce dernier pays l'un des plus "peuplés" en matière de sans papiers. Quant à la France, l'ordre de grandeur en général retenu est de 350/400.000 à 500.000.




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