Après l'annonce par Berlusconi d'être pour la sixième fois candidat pour diriger le gouvernement, Mario Monti a pris de court le Cavaliere en démissionnant de la présidence du Conseil italien. Heureusement pour l'Italie, Berlusconi n'a, cette fois, vraiment plus la cote. Mais attention, comme Sarkozy, c'est un redoutable adversaire en campagne électorale.
Mario Monti a décidé de rendre son tablier.
Je démissionnerais après l’approbation du budget et de la loi de stabilité par les deux chambres"
a annoncé le chef du gouvernement italien après s'être entretenu avec le chef de l’Etat Giorgio Napolitano. Le vote du budget devrait avoir lieu d’ici le 20 décembre prochain. La démission annoncée de Mario Monti signifie des élections législatives anticipées de deux mois, certainement en février.
Estimant qu’il n’avait plus de majorité politique après la défection du Pdl (le parti "du peuple de la Liberté" créé sur mesure par et pour Berlusconi), le président du Conseil dit ne pas avoir eu le choix. D’autant que les berlusconiens avaient annoncé vendredi soir qu’une grenade serait dégoupillée mercredi prochain au parlement. Cela ne pouvait être que l'annonce officielle qu'ils ne soutenaient plus le gouvernement.
La messe était dite
En fait, la messe était dite pour Monti dés samedi quand Silvio Berlusconi a annoncé son comeback politique samedi après-midi en se déclarant candidat aux législatives initialement prévues en avril prochain.
Tous ces éléments laissaient clairement entendre que la droite berlusconienne avait décidé de mettre Monti dans l'incapacité de gouverner et de continuer à mettre en œuvre sa politique pour permettre au milliardaire de partir en campagne électorale pour la sixième fois depuis 1994.
Durant les derniers jours Silvio Berlusconi avait critiqué la politique d’austérité de son successeur qui ne laissait pas d’espace à la reprise.
Monti a détruit le pays et les Italiens ont toutes les raisons d’être en colère"
avait déclaré le Cavaliere vendredi dernier. On comprend que Mario Monti ait très mal pris la critique de sa politique économique de la part de son prédécesseur à la tête du gouvernement qui a laissé le pays financièrement sur les rotules.
Mauvaise nouvelle pour le "spread"
Reste que Silvio Berlusconi a été pris de court par la décision de l’ancien commissaire européen.
"Monti veut nous rendre responsable d’une probable réaction des marchés et d’une remontée en flèche de l’écart de taux " ["spread", écart des taux des emprunts obligataires émis par l'Italie avec l'Allemagne, Ndlr] a déclaré le Cavaliere.
Bien que sa position se soit améliorée grâce aux réformes et aux plans d’austérité mis en place par Mario Monti, la troisième économie de la zone euro est toujours sous observation. Face à cette nouvelle crise gouvernementale, qui plus est à la veille d'élections, les marchés ne peuvent que mal réagir. Le spread était déjà en hausse ces derniers jours.
Et maintenant ? Selon l’usage, le chef de l’Etat devrait commencer par renvoyer Mario Monti devant les deux chambres pour un vote de confiance.
Monti a les mains libres
Entre-temps, le premier ministre démissionnaire pourrait, lui aussi annoncer son entrée dans l’arène politique. Un gouvernement Monti-bis? Courtisé depuis des mois par les centristes, Mario Monti n’a jamais dévoilé ses intentions. "Mais il pourrait le faire cette semaine puisqu’il a désormais les mains libres après avoir démissionné" affirme un proche de Berlusconi.
Reste qu’une entrée en piste de l’ancien commissaire européen compliquerait le panorama électoral. La gauche a le vent en poupe. Derrière le Parti démocrate, elle est crédité dans les sondages de 34%. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Silvio Berlusconi aurait décidé de revenir sur le devant de la scène.
Après la victoire de Pierluigi Bersani dimanche dernier aux primaires du parti démocrate, Silvio Berlusconi n’avait pas le choix. Rappelons-nous que des centaines d’électeurs du parti démocrate ont salué cette victoire le poing fermé"
confiait vendredi un proche du Cavaliere à Myeurop. Le message est clair. Silvio Berlusconi ne peut pas laisser l’Italie tomber entre les mains des "communistes" ! Et d'ajouter:
Si le maire de Florence Matteo Renzi qui est centriste, avait gagné la course aux primaires des démocrates, les choses se seraient passées différemment car les libéraux du Pdl (le parti de Berlusconi) auraient voté pour lui et Berlusconi n’aurait pas participé à la course".
Billard à 4 bandes
Parlant de lui à la troisième personne comme à son habitude, le Cavaliere estime qu’
il n’y a pas d’autre Berlusconi en mesure de battre la gauche".
Crédité de 16% dans les sondages, son parti a pourtant peu de chances de remporter les élections. Selon un sondage réalisé avant sa candidature 73 % des Italiens ne souhaitaient pas qu'il se représente.
Avec le soutien des centristes chapeautés par Mario Monti, une partie des électeurs du maire de Florence et du centre-droit qui ne veut plus entendre parler de Silvio Berlusconi pourrait voter pour "super Mario".
Dans ce jeu billard à au moins quatre bandes – droite populiste/centre droit avec l'appoint d'une partie du centre gauche/centre gauche et gauche – l’Italie pourrait finalement se retrouver sans majorité claire au lendemain des élections.
Pour l’heure tous les scénarios sont ouverts tant que le président de la République n’aura pas annoncé sa décision après la démission de Mario Monti. Ce n'est qu'une question de jours.